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26/11/1996 | FRANCE | N°94-21208

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 novembre 1996, 94-21208


Donne acte à la SDBO de son désistement envers M. Z..., M. E..., M. C..., ès qualités, MM. D... et A... ;

Attendu, selon les arrêts critiqués (Paris, 18 mars et 25 novembre 1992, et 2 novembre 1994), que, le 16 mai 1984, en vue d'une prise de participations dans le capital de deux sociétés de droit américain, les assemblées générales extraordinaires des sociétés en nom collectif Z... et compagnie et A... et compagnie (les SNC), dont le capital social était de 3 000 francs, ont décidé de porter ce capital à la somme de 33 000 000 francs pour la première de ces SNC, et

à celle de 22 000 000 francs pour la seconde, les souscriptions pouvant ...

Donne acte à la SDBO de son désistement envers M. Z..., M. E..., M. C..., ès qualités, MM. D... et A... ;

Attendu, selon les arrêts critiqués (Paris, 18 mars et 25 novembre 1992, et 2 novembre 1994), que, le 16 mai 1984, en vue d'une prise de participations dans le capital de deux sociétés de droit américain, les assemblées générales extraordinaires des sociétés en nom collectif Z... et compagnie et A... et compagnie (les SNC), dont le capital social était de 3 000 francs, ont décidé de porter ce capital à la somme de 33 000 000 francs pour la première de ces SNC, et à celle de 22 000 000 francs pour la seconde, les souscriptions pouvant être fractionnées ; qu'à cette fin des comptes intitulés " augmentation de capital " ont été ouverts à la Société de banque occidentale (SDBO) ; que M. Paul B..., aux droits duquel se trouve M. Michel B... et Mme Jacqueline X..., veuve B..., a souscrit, en deux temps, à l'augmentation du capital de la SNC Z... et compagnie pour un montant total de 2 000 000 francs ; que Mme B... a apporté 1 000 000 francs à la SNC A... et compagnie ; que, les augmentations de capital prévues n'ayant pu être entièrement réalisées, il a été convenu que les SNC restitueraient leurs apports à M. et Mme B... ; qu'en fait seule Mme B... a pu obtenir le remboursement d'une somme de 500 000 francs ; que M. et Mme B... ont, notamment, demandé des dommages-intérêts à la SDBO, à laquelle ils reprochaient d'avoir disposé dans des conditions anormales des fonds qu'ils avaient versés, en les débloquant au fur et à mesure qu'elle recevait une copie du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire que tenait chacune des SNC en cause, soit les 20 mars et 26 avril 1985 pour la SNC Z... et compagnie et les 1er mars, 26 avril et 3 juin 1985 pour la SNC A... et compagnie, pour décider de modifier son capital social initial à raison du nouvel apport de fonds qu'elle constatait ;

Sur le moyen unique pris en sa première branche :

Attendu que la SDBO reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. Michel B... et à Mme Jacqueline B..., née X..., la somme de 2 000 000 francs à titre de dommages-intérêts, et à Mme Jacqueline B..., née X..., la somme de 500 000 francs à titre de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, qu'aucune des dispositions légale ou réglementaire, découlant de l'article 2.1° de la loi du 24 janvier 1984, voire de la législation antérieure sur les établissements de crédit, ne l'obligeait en sa qualité de dépositaire des fonds que les consorts B... destinaient aux augmentations de capital des deux SNC, à ouvrir un compte spécial à cet effet ; qu'elle n'avait pas plus à se faire juge de la validité des assemblées générales extraordinaires de 1985, susmentionnées, et de leur conformité avec les résolutions initiales du 16 mai 1984, ayant prévu des augmentations de capital d'un montant nettement plus important ; que si le déblocage des fonds a permis aux dirigeants malhonnêtes des deux SNC d'organiser une " évasion " des fonds au détriment des souscripteurs, il n'a pas eu, nonobstant les imperfections d'ordre administratif relevées à son encontre, alors qu'elle n'était pas tenue d'ouvrir un compte spécial et qu'elle avait observé, quant aux justifications remises par lesdites SNC, le principe de non-immixtion dans les affaires des clients de la banque, de lien causal avec la disparition, due aux seules malversations, des fonds des consorts B..., ayant du reste pris, en 1984, des risques spéculatifs en investissant de façon importante dans des sociétés sans aucune surface ; qu'ainsi les condamnations prononcées contre elle procèdent d'une violation des articles 1382 et 1383 du Code civil, ensemble 2.1° de la loi du 24 janvier 1984 ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la SDBO avait ouvert, au nom de chacune des deux SNC, un compte intitulé " augmentation de capital ", ce qui rend inopérant le grief en ce qu'il conteste l'existence d'une obligation légale d'ouverture d'un compte spécial pour la réception des fonds provenant de souscriptions à des augmentations de capital, la cour d'appel a retenu que, si les résolutions prises au cours des deux assemblées générales extraordinaires du 16 mai 1984 autorisaient un fractionnement des apports, elles ne prévoyaient qu'une augmentation de capital pour chacune des SNC, et non des augmentations progressives ; qu'elle a constaté par ailleurs que les deux certificats de dépôt de fonds délivrés le 7 juin 1985 par la SDBO aux époux B... montraient que cette banque connaissait parfaitement l'obligation qui pesait sur elle de ne débloquer les fonds qu'au jour où les augmentations de capital décidées le 16 mai 1984 seraient atteintes ; qu'elle a pu en déduire que la SDBO avait commis une faute en débloquant les fonds au fur et à mesure qu'elle recevait les procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires tenues les 20 mars et 26 avril 1985, pour la SNC Z... et compagnie et les 1er mars, 26 avril et 3 juin 1985 pour la SNC A... et compagnie, alors que ces documents précisaient que l'augmentation partielle de capital intervenue était faite en exécution de la décision de chaque assemblée générale extraordinaire du 16 mai 1984, et alors qu'il n'était justifié d'aucune modification des statuts des sociétés en conséquence des délibérations de ces assemblées générales extraordinaires de 1985 ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur la seconde branche du moyen :

Attendu que la SDBO fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer 50 000 francs de dommages-intérêts pour résistance abusive aux demandes des consorts B..., alors, selon le pourvoi, qu'en déduisant abstraitement sa mauvaise foi, pourtant démentie par l'expert Y..., de ce qu'elle aurait consciemment violé les règles professionnelles les plus élémentaires, bien qu'elle n'ait pas eu l'obligation d'ouvrir un compte spécial et qu'elle se soit conformée au principe de non-immixtion lors du déblocage des fonds, sans lien causal direct avec la perte des fonds, la cour d'appel de Paris a, par les deux arrêts des 18 mars 1992 et 2 novembre 1994, violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que c'est au terme d'une motivation concrète et circonstanciée que la cour d'appel a retenu que le comportement de la SDBO avait été particulièrement fautif et qu'en conséquence, la résistance de cet établissement de crédit aux demandes des consorts B... était abusive ; qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé en sa seconde branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 94-21208
Date de la décision : 26/11/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° BANQUE - Responsabilité - Transfert de fonds - Fonds à ne débloquer qu'au jour de la réalisation de l'augmentation de capital - Fonds débloqués au fur et à mesure des assemblées générales - Préjudice causé au souscripteur.

1° Ayant, d'une part, retenu que, si les résolutions prises au cours des deux assemblées générales extraordinaires de 1984 autorisaient un fractionnement des apports, elles ne prévoyaient qu'une augmentation de capital pour chacune des sociétés en nom collectif et non des augmentations progressives et, d'autre part, constaté que la banque connaissait parfaitement l'obligation qui pesait sur elle de ne débloquer les fonds qu'au jour où les augmentations de capital seraient atteintes, une cour d'appel a pu en deduire que cette banque avait commis une faute en débloquant les fonds au fur et à mesure qu'elle recevait les procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires tenues en 1985, alors que ces documents précisaient que l'augmentation partielle de capital intervenue était faite en exécution de la décision de chaque assemblée générale extraordinaire de 1984, et alors qu'il n'était justifié d'aucune modification des statuts des sociétés en conséquence des délibérations de ces assemblées générales extraordinaires de 1985.

2° ACTION EN JUSTICE - Défense - Résistance injustifiée - Faute - Constatations suffisantes.

2° Ne peut être censurée la cour d'appel qui, au terme d'une motivation concrète et circonstanciée, retient que le comportement d'un établissement de crédit avait été particulièrement fautif et qu'en conséquence sa résistance aux demandes de ses clients était abusive.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 mars et 1992-11-25, 1994-11-02

A RAPPROCHER : (1°). Chambre commerciale, 1988-03-22, Bulletin 1988, IV, n° 112, p. 78 (rejet). A RAPPROCHER : (2°). Chambre commerciale, 1977-05-23, Bulletin 1977, IV, n° 150 (2), p. 126 (rejet) ; Chambre sociale, 1980-11-27, Bulletin 1980, V, n° 850, p. 628 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 nov. 1996, pourvoi n°94-21208, Bull. civ. 1996 IV N° 281 p. 240
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 IV N° 281 p. 240

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : Mme Piniot.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Dumas.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Le Bret et Laugier, la SCP Lesourd et Baudin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.21208
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