AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Silvallac, société anonyme, dont le siège est ...,
en cassation d'un jugement rendu le 18 mai 1995 par le tribunal d'instance de Mulhouse (4e section civile), au profit :
1°/ du syndicat CFDT Hacuitex du Haut-Rhin, dont le siège est ...,
2°/ du syndicat CGT SA Silvallac, dont le siège est société anonyme Sylvallac ...,
3°/ du syndicat CFE-CGC société anonyme Silvallac, dont le siège est société anonyme Silvallac ...,
défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mai 1996, où étaient présents : M. Lecante, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Pams-Tatu, conseiller référendaire rapporteur, MM. Bèque, Le Roux-Cocheril, Ransac Mme Aubert, conseillers, Mme Barberot, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Pams-Tatu, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Silvallac, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat du syndicat CFDT Hacuitex du Haut-Rhin, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le second moyen :
Vu l'article L. 431-1-1 du Code du travail, ensemble les articles L. 132-4, L. 426-1 et L. 438-10 du même Code;
Attendu qu'il résulte de la combinaison des textes susvisés que, si dans les entreprises dont l'effectif est inférieur à deux cents salariés, le chef d'entreprise a la faculté, après avoir consulté les délégués du personnel et, s'il existe, le comité d'entreprise, de décider que les délégués du personnel constituent la délégation du personnel au comité d'entreprise (délégation unique), le nombre de ces délégués peut être augmenté par des conventions ou accords collectifs;
Attendu que, pour annuler les élections de la délégation unique du personnel de la société Silvallac des 20 avril et 4 mai 1995, le jugement attaqué a retenu que l'article L. 431-1-1 du Code du travail, qui ne faisait qu'ouvrir une faculté, ne revêtait pas de caractère impératif; que, dans la mesure où la loi elle-même prévoyait la possibilité du maintien du système antérieur à la loi du 20 décembre 1993, une dérogation conventionnelle plus favorable aux salariés ne pouvait être écartée;
Qu'en statuant ainsi, alors que pour déterminer le nombre des délégués du personnel de la délégation unique, le juge du fond doit comparer le nombre de ces délégués, tel qu'il figure à l'article R. 423-1-1 du Code du travail, avec celui des délégués du personnel et membres du comité d'entreprise conventionnels, et retenir le nombre le plus élevé des trois, le tribunal d'instance a violé les textes susvisés;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 18 mai 1995, entre les parties, par le tribunal d'instance de Mulhouse; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance d'Iltkirch;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande présentée par le syndicat CFDT Hacuitex du Haut-Rhin;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du tribunal d'instance de Mulhouse, en marge ou à la suite du jugement annulé;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé en son audience publique du vingt-cinq juin mil neuf cent quatre-vingt-seize par M. Bèque conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile.