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18/06/1996 | FRANCE | N°92-43677

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 juin 1996, 92-43677


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mme Christine X..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 28 avril 1992 par la cour d'appel de Metz (chambre sociale), au profit de la Société d'équipement du Bassin Lorrain (SEBL), dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 mai 1996, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Merlin, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Monboisse, Desjardins, Finance, conseiller

s, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, MM. Richard de la Tour, Soury, c...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par Mme Christine X..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 28 avril 1992 par la cour d'appel de Metz (chambre sociale), au profit de la Société d'équipement du Bassin Lorrain (SEBL), dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 mai 1996, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Merlin, conseiller rapporteur, MM. Waquet, Monboisse, Desjardins, Finance, conseillers, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, MM. Richard de la Tour, Soury, conseillers référendaires, M. Terrail, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre;

Sur le rapport de M. le conseiller Merlin, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de Mme X..., de Me Jacoupy, avocat de la Société d'équipement du Bassin-Lorrain, les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;

Attendu que Mme X... a été engagée à compter du 5 décembre 1962, en qualité de sténo-dactylographe, par la Société d'équipement du Bassin Lorrain (SEBL); que prétendant que l'employeur lui avait supprimé le versement d'un supplément familial, réduit sa rémunération à compter du mois d'avril 1987 et omis de réviser son salaire par application de l'échelle et de l'indice prévus à son contrat par référence à celui d'une autre société, la salariée a saisi la juridiction prud'homale en réclamant le paiement de rappel de salaires, d'indemnités de congés payés afférents et de dommages-intérêts; que l'employeur ayant procédé, en cause d'appel, au licenciement de la salariée par lettre du 26 avril 1991, la salariée a présenté des demandes complémentaires en paiement d'indemnité de licenciement au taux légal à compter du 12 juillet 1991, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnités de congés payés pour les années 1989-1990 et d'indemnités journalières complémentaires;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande de rappel au titre du supplément familial, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résulte tant de l'exposé par la cour d'appel des moyens de la salariée que des conclusions déposées en son nom devant la cour d'appel, le 20 janvier 1992, que la salariée a soutenu que le supplément familial dont elle bénéficiait a été supprimé à compter du mois de janvier 1986 et non pas intégré dans sa rémunération; qu'ainsi, en énonçant qu'il n'était pas contesté que ce supplément familial avait été intégré au salaire de base de la salariée, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, violant ainsi l'article 4 du nouveau Code de procédure civile; et alors, d'autre part, que dans ses conclusions devant la cour d'appel du 27 juin 1991, la salariée soutenait qu'une intégration du salaire dans le supplément familial n'était pas plus avantageuse pour les salariés, dès lors que cette intégration impliquait que l'évolution de la situation familiale ne serait plus prise en compte à dater du 31 décembre 1987 pour les augmentations, privant ainsi la salariée d'une augmentation éventuelle de ce supplément; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que le supplément familial avait été intégré dans la rémunération versée à la salariée sans qu'il en résulte un quelconque préjudice pour l'intéressée; que par ces seuls motifs, répondant aux conclusions invoquées, elle a légalement justifié sa décision;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que, la salariée fait aussi grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de rappel de salaire en raison de la réduction de sa rémunération à compter du mois d'avril 1987, alors, selon le moyen, que, d'une part, l'inspection du travail ne dispose, relativement aux conflits entre employeurs et salariés en ce qui concerne le montant du salaire stipulé par le contrat de travail, d'aucun pouvoir de décision ni d'aucune obligation de faire injonction à l'employeur de respecter les stipulations contractuelles ;

qu'en retenant, pour dire que l'employeur avait commis une erreur matérielle dans la fixation de la rémunération de la salariée au 1er janvier 1987, l'absence de manifestation de l'inspection du travail après réception de la lettre de l'employeur du 15 juin 1987, la cour d'appel a violé les articles L. 611-1 et suivants du Code du travail et a statué par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil; alors, d'autre part, que la cour d'appel s'est abstenue de répondre aux conclusions de la salariée devant la cour d'appel, du 27 juin 1991, alléguant que le courrier qui lui avait été adressé par la direction de la SEBL, le 22 janvier 1987, lui précisait qu'elle bénéficierait non seulement d'une augmentation de 3 %, mais aussi d'un complément d'un montant variable, ce qui expliquait que son salaire mensuel brut ait été porté à la somme de 8 000 francs; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu que sous couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par les juges du fond qui, sans reconnaître un quelconque pouvoir de décision à l'inspection du travail dans un conflit entre employeur et salarié sur le montant du salaire, ont constaté que l'employeur s'était borné à corriger l'erreur qu'il avait commise dans le calcul de la rémunération de l'intéressée; que le moyen n'est pas fondé;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que la salariée fait en outre grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral résultant des fautes commises à son encontre par l'employeur dans l'exécution du contrat de travail, alors, selon le moyen, qu'un employeur qui, par l'énoncé d'affirmations dont il n'apporte pas la preuve, cause un préjudice au salarié, en doit réparation à celui-ci; qu'il appartenait ainsi à la société SEBL d'apporter la preuve que les avertissements qu'il avait délivrés à la salariée ne l'avaient pas été, contrairement aux affirmations de celle-ci, pour des motifs fallacieux; qu'en déboutant la salariée de sa demande, faute de preuve par celle-ci des faits allégués à l'encontre de l'employeur, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil;

Mais attendu que la cour d'appel, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis a, sans inverser la charge de la preuve, constaté que la salariée n'apportait pas la preuve des faits allégués à l'encontre de l'employeur comme constitutifs d'une faute; que le moyen manque en fait;

Sur le cinquième moyen :

Attendu que la salariée fait au surplus grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que, d'une part, en s'abstenant de rechercher si les absences de la salariée avaient contraint l'employeur à son remplacement définitif, la cour d'appel, qui se borne à constater que l'employeur avait eu recours au recrutement d'intérimaires pour la remplacer, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-14-3 et L.122-45 du code du travail; alors, d'autre part, que selon l'article 41 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseil (Syntec), la maladie du salarié ne constitue pas une cause de rupture du contrat de travail, le licenciement n'étant possible que si l'employeur y est obligé par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise; qu'en relevant qu'il y avait lieu d'admettre que le licenciement de la salariée était justifié, sans relever de circonstances de nature à rendre une telle mesure nécessaire pour l'employeur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de la disposition conventionnelle précitée;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que les absences longues et répétées de la salariée avaient désorganisé l'entreprise, a légalement justifié sa décision; que le moyen n'est pas fondé;

Sur le sixième moyen :

Attendu que la salariée fait encore grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande de condamnation de l'employeur aux intérêts légaux des sommes que l'employeur avait reconnu devoir, alors, selon le moyen, que les intérêts légaux courent de plein droit au jour de la demande, même s'ils ne sont pas réclamés par un chef spécial des conclusions; qu'en déclarant que les chèques établis par l'employeur remplissaient la salariée de ses droits, sans prononcer condamnation de l'employeur au versement des intérêts légaux ayant couru du jour de la demande à celui de la mise à disposition effective des chèques à la salariée ou à son représentant, la cour d'appel a violé l'article 1153 du Code civil;

Mais attendu que la cour d'appel ayant constaté que la salariée avait refusé de recevoir, antérieurement à la demande de la salariée, les sommes que l'employeur reconnaissait lui devoir, ce dont il résultait que la salariée avait commis une faute ayant empêché l'employeur de s'acquitter du montant de sa dette, la cour d'appel a légalement justifié sa décision;

Sur le septième moyen :

Attendu que la salariée fait enfin grief à la cour d'appel d'avoir rejeté sa demande de rappel d'indemnités de congés payés pour les années 1989-1990, alors, selon le moyen, que tout jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens; que l'arrêt attaqué ne contient aucune indication relativement au moyen soutenu par la salariée à l'appui de sa demande de rappel d'indemnités de congés payés; qu'il a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu que le grief ne fait pas état du moyen qui aurait été présenté devant la cour d'appel; que les juges du fond pour exposer les prétentions et les moyens des parties ne sont astreints à aucune règle de forme particulière; que la cour d'appel qui a constaté que la salariée avait été remplie de ses droits à congés payés a satisfait aux exigences du texte susvisé; que le moyen ne peut être accueilli;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 135-2 du Code du travail ;

Attendu que pour rejeter la demande de la salariée en paiement d'un rappel de salaire par application de l'indice prévu à son contrat de travail, la cour d'appel énonce que cet indice ne constitue pas un élément intangible de son contrat de travail, que l'employeur a appliqué à bon droit la convention collective nationale des bureaux d'études techniques cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseils (Syntec) et que la salariée ne rapporte pas la preuve qu'à longue échéance son alignement sur cette convention collective soit moins favorable que le maintien de l'indexation contractuelle;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur ne pouvait modifier les conditions de la rémunération de la salariée prévue par son contrat de travail sans l'accord de cette dernière et sans constater que la rémunération versée à la salariée en application de la convention collective était plus favorable que le salaire qu'elle aurait perçu par application de l'indice de référence prévu à son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;

Sur la demande présentée au titre de l'article 7OO du nouveau code de procédure civile :

Attendu que l'employeur sollicite, sur le fondement de ce texte l'allocation d'une somme de 10 000 francs;

Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement dans ses dispositions rejetant la demande de la salariée en paiement d'un rappel de salaire fondé sur l'application de l'indice figurant à son contrat de travail, l'arrêt rendu le 28 avril 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Metz; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy;

Laisse à chaque partie la charge respective de ses dépens ;

Rejette la demande présentée par l'employeur sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Metz, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale , et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-huit juin mil neuf cent quatre-vingt-seize.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 92-43677
Date de la décision : 18/06/1996
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz (chambre sociale), 28 avril 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jui. 1996, pourvoi n°92-43677


Composition du Tribunal
Président : Président : M. GELINEAU-LARRIVET

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:92.43677
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