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12/06/1996 | FRANCE | N°94-18004

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 12 juin 1996, 94-18004


Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 mai 1994), que, suivant un acte notarié du 16 octobre 1984, M. Sommer a vendu un appartement aux époux X... ; que, devenue seule propriétaire de ce bien à la suite d'un divorce, Mme X... s'est engagée, le 14 juillet 1991, à le vendre aux époux Renaud et à acheter un autre appartement ; qu'il est apparu que l'appartement de Mme X... était grevé de deux hypothèques judiciaires provisoires prises, successivement, les 12 mars et 5 août 1991 à la requête de la banque Paribas en garantie d'un

e créance à l'encontre de M. Sommer ; que, soutenant que ces inscript...

Sur le moyen unique du pourvoi principal :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 mai 1994), que, suivant un acte notarié du 16 octobre 1984, M. Sommer a vendu un appartement aux époux X... ; que, devenue seule propriétaire de ce bien à la suite d'un divorce, Mme X... s'est engagée, le 14 juillet 1991, à le vendre aux époux Renaud et à acheter un autre appartement ; qu'il est apparu que l'appartement de Mme X... était grevé de deux hypothèques judiciaires provisoires prises, successivement, les 12 mars et 5 août 1991 à la requête de la banque Paribas en garantie d'une créance à l'encontre de M. Sommer ; que, soutenant que ces inscriptions, prises indûment, l'avaient empêchée de réaliser les opérations envisagées, Mme X... a assigné la banque Paribas et le conservateur du bureau des hypothèques, en réparation de son préjudice ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de condamner, in solidum, les héritiers du conservateur avec la banque Paribas à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, d'une part, que le conservateur des hypothèques ne peut refuser le dépôt d'un acte dont la publicité est requise, ou rejeter la formalité que dans les cas limitativement prévus par la loi, c'est-à-dire, notamment, en cas de discordance entre les mentions relatives à l'identité des parties ou à la désignation de l'immeuble et les énonciations contenues dans les bordereaux des titres déjà publiés ; qu'il est toutefois spécifié par le décret du 14 octobre 1955 qu'il n'y a pas discordance, justifiant le rejet, lorsque le titre de la personne indiquée comme disposant ou dernier titulaire a cessé de produire effet en raison d'un acte ou d'une décision de justice postérieure ; qu'il s'ensuit que le changement d'identité du propriétaire du lot n° 16 n'était pas de nature à révéler une discordance emportant le pouvoir pour le conservateur des hypothèques de rejeter la formalité ; qu'en décidant du contraire la cour d'appel a violé les articles 2148 du Code civil et 34-2 du décret du 14 octobre 1955 ; d'autre part, que la responsabilité du conservateur des hypothèques ne pouvait être engagée que si la faute reprochée avait effectivement été à l'origine de l'échec du projet de vente de Mme X... ; que, pour affirmer que l'inscription d'hypothèque litigieuse avait empêché Mme X... de réaliser cette vente avant la mainlevée, la cour d'appel s'est fondée sur une lettre du bénéficiaire de la promesse qui avait renoncé à l'acquisition en en déduisant que " rien ne démontre que celui-ci n'ait pas donné suite à cet acte pour des motifs purement personnels " ; qu'en laissant ainsi incertaine la question de savoir si le bénéficiaire de la promesse de vente avait renoncé en raison de motifs purement personnels ou en raison de l'inscription d'hypothèque litigieuse, la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien de causalité entre la faute et le préjudice, entachant par là même son arrêt d'un défaut de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement retenu, par motifs adoptés, que le conservateur des hypothèques devait s'assurer de la concordance du document déposé et des documents publiés antérieurement, le titre de Mme X..., dernier titulaire au sens de l'article 32, paragraphe 1er, du décret du 14 octobre 1955, n'ayant pas cessé de produire ses effets postérieurement à sa publication au fichier immobilier au moment de l'inscription de l'hypothèque ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que, compte tenu de la lettre écrite le 7 septembre 1991 par le bénéficiaire de la promesse, rien ne démontrait que celui-ci n'ait pas donné suite à cet acte pour des motifs personnels, et que l'indication du propriétaire figurant aux ordonnances des 12 mars et 5 août 1991 étant manifestement erronée puisque le lot n° 16 n'appartenait plus depuis de nombreuses années au débiteur de la Banque, le conservateur devait rejeter la formalité de l'inscription, la cour d'appel a pu en déduire qu'en ne le faisant pas, le conservateur des hypothèques avait commis une faute professionnelle se trouvant dans un lien de causalité directe avec le préjudice dont se prévalait Mme X..., et a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le moyen unique du pourvoi provoqué :

Attendu que la banque Paribas fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que, dans ses conclusions, la banque Paribas faisait valoir que le bénéficiaire de la promesse consentie par Mme X... avait déclaré par écrit renoncer à la vente, dès le " 28 septembre 1991 " ; qu'en omettant de s'expliquer sur ce point au regard de la tardiveté prétendue de la mainlevée, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'avisée par son notaire depuis le 27 août 1991 de l'erreur, ce n'est que le 8 novembre suivant que la banque Paribas avait consenti à la mainlevée sur le bien de Mme X... de l'hypothèque, contribuant ainsi directement et fautivement au préjudice invoqué par cette dernière, la cour d'appel, devant laquelle la banque Paribas s'était bornée à soutenir que l'acquéreur du bien n'avait pas donné suite à son projet pour des raisons personnelles, et sans aucun lien avec l'hypothèque litigieuse, a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant souverainement que, compte tenu de la lettre écrite le 7 septembre 1991 par le bénéficiaire de la promesse et contrairement à ce qu'affirmait la banque qui n'en rapportait pas la preuve, rien ne démontrait que celui-ci n'ait pas donné suite à cet acte pour des motifs personnels ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 94-18004
Date de la décision : 12/06/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

HYPOTHEQUE - Conservateur des hypothèques - Obligations - Inscription - Concordance du document déposé et des documents publiés antérieurement - Vérification .

Ayant exactement retenu que le conservateur des hypothèques devait s'assurer de la concordance du document déposé et des documents publiés antérieurement, la cour d'appel qui a relevé que l'indication du propriétaire figurant aux décisions ayant ordonné l'inscription de deux hypothèques judiciaires provisoires à la requête d'une banque étant manifestement erronée puisque le lot visé n'appartenait plus depuis de nombreuses années au débiteur de la banque, le conservateur devait rejeter la formalité de l'inscription, a pu en déduire qu'en ne le faisant pas, le conservateur des hypothèques avait commis une faute professionnelle.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 10 mai 1994


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 12 jui. 1996, pourvoi n°94-18004, Bull. civ. 1996 III N° 145 p. 93
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 III N° 145 p. 93

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Beauvois .
Avocat général : Avocat général : M. Weber.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Pronier.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Boré et Xavier, M. Cossa, la SCP Tiffreau et Thouin-Palat.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.18004
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