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11/06/1996 | FRANCE | N°94-15534

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 juin 1996, 94-15534


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 mars 1994), que la société Barclays Bank LPC (la banque), après avoir déclaré au passif du redressement judiciaire de la société Michel X... Hini ses créances résultant d'un prêt et d'effets escomptés impayés, a assigné M. X..., caution de cette société, en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la société Barclays Bank LPC une dette de 700 000 francs comprenant notamment une somme de 545 165,86 francs

au titre du solde d'un prêt qu'elle avait consenti à la société Michel X... Hini, a...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 mars 1994), que la société Barclays Bank LPC (la banque), après avoir déclaré au passif du redressement judiciaire de la société Michel X... Hini ses créances résultant d'un prêt et d'effets escomptés impayés, a assigné M. X..., caution de cette société, en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la société Barclays Bank LPC une dette de 700 000 francs comprenant notamment une somme de 545 165,86 francs au titre du solde d'un prêt qu'elle avait consenti à la société Michel X... Hini, alors, selon le pourvoi, d'une part, que jouissant du bénéfice de discussion, la caution simple peut se prévaloir de la suspension des poursuites individuelles ; qu'en déniant à cette caution un tel droit sans constater que son engagement eût été solidaire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 2021 du Code civil ainsi que 47 et 92 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que seule la caution solidaire est privée du droit de se prévaloir des dispositions du plan de cession ; qu'en déclarant que M. X... ne pouvait bénéficier de ce droit en sa qualité de caution sans constater que son engagement eût été solidaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 64 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, en outre, qu'aux termes de l'article 93, alinéa 2, de la loi du 25 janvier 1985, la charge du nantissement garantissant vis-à-vis du vendeur ou du prêteur le prix d'acquisition de l'outillage ou du matériel d'équipement est transmise au cessionnaire qui est alors tenu d'acquitter entre les mains du vendeur ou du prêteur les échéances stipulées avec eux et qui leur restent dues à compter du transfert de la propriété ; que, si la caution solidaire ne peut exciper des dispositions du plan de cession, elle est autorisée à invoquer ce texte qui prévoit la transmission de plein droit de la dette au cessionnaire et en conséquence libère le débiteur principal ; qu'en l'espèce, M. X... se fondait non pas sur les dispositions du jugement ayant arrêté le plan de cession mais sur cette règle légale ; qu'en décidant qu'en sa qualité de caution, il ne pouvait s'en prévaloir, dès lors que, selon l'article 64 de la loi du 25 janvier 1985, il ne pouvait invoquer les dispositions du jugement ayant arrêté le plan de cession, la cour d'appel n'a pas conféré de base légale à sa décision au regard de ces textes ; et alors, enfin, que les juges sont tenus de statuer dans les limites du débat telles que fixées par les conclusions des parties ; que M. X... soutenait que le prêt consenti à la débitrice principale était destiné à financer l'acquisition du matériel nanti ; que la banque n'avait nullement contesté cette prétention ni prétendu que le prêt aurait eu pour but de consolider les fonds propres de la société dans la perspective du développement du chiffre d'affaires ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 7 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni de ses conclusions ni de l'arrêt que M. X... ait soutenu devant la cour d'appel les prétentions contenues dans le moyen ;

Attendu, en outre, que l'arrêt retient que le prêt consenti n'a pas eu pour objet le financement de matériel et d'outillage mais a été destiné à consolider les fonds propres de la société Michel X... Hini " dans la perspective du développement de son chiffre d'affaires " ; que, par ce seul motif, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, enfin, que la banque avait fait porter l'argumentation de ses conclusions sur le fait qu'elle était titulaire d'un nantissement sur fonds de commerce et non de sûretés inscrites sur l'outillage ou le matériel, et, par suite, sans qualité pour réclamer aux cessionnaires le règlement du prêt antérieurement contracté par la société Michel X... Hini ; que la cour d'appel n'a donc pas méconnu l'objet du litige ;

D'où il suit qu'en ses deux premières branches, le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ; qu'il ne peut être accueilli en sa troisième branche et qu'il est mal fondé pour le surplus ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... fait aussi grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la banque une dette de 700 000 francs comprenant en partie le montant d'effets tirés par la société Michel X... Hini, escomptés par la banque et impayés à leur échéance, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, résultant d'une écriture de la banque qui porte le montant de l'effet au débit du compte du client, la contrepassation vaut paiement et prive le banquier de tous ses droits sur le titre contrepassé lorsque le remettant est encore in bonis ; qu'en l'occurrence, dès lors que la banque avait effectué une telle opération, elle ne pouvait donc revenir sur sa décision en créditant à nouveau ce compte et en portant le montant des effets impayés sur un compte spécial puisqu'elle n'avait plus aucun droit sur le titre contrepassé ; qu'en décidant que la contrepassation, dont elle n'a pas constaté qu'elle aurait été effectuée après l'ouverture du redressement judiciaire de la société débitrice, n'était qu'une opération matérielle et comptable ne révélant pas l'intention d'opter pour une contrepassation assortie des conséquences que la caution alléguait, dès lors qu'elle avait été réalisée sur un compte spécial d'effets impayés, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas, dans un premier temps, débité le compte courant de la société du montant des effets impayés, pour ensuite, dans un second temps, et tandis qu'elle était dépourvue de tout droit sur les titres contrepassés, virer leur montant sur un compte spécial, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et 121 du Code de commerce ; et alors, d'autre part, que la caution faisait valoir qu'il résultait du rapport de l'expert judiciaire que les effets impayés pour un montant de 1 302 565,03 francs avaient été d'abord débités du compte courant de la société puis avaient été " extournés " dans les jours suivants pour être virés au débit d'un compte " effets impayés " ; qu'il y avait donc eu dans un premier temps une véritable contrepassation sur un compte courant, opération qui avait été annulée, et dans un second temps une affectation sui generis sur un compte ouvert à cet effet, non révélé à la débitrice principale ni aux autres parties en cause, compte clandestin dont le caractère secret rendait impossible la constatation des remboursements ; qu'en délaissant ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de tout motif en méconnaisance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt fait apparaître qu'il résulte d'un rapport d'expertise ayant pour objet l'analyse du compte de la société Michel X... Hini et dont la valeur n'a pas été contestée par la caution, que l'inscription du montant des effets avait été effectuée par la banque dans " un compte spécial, compte contentieux d'impayés ", faisant ainsi ressortir que, ne résultant pas d'une écriture portant ce montant au débit du compte client, cette inscription, improprement qualifiée de contrepassation, n'avait pas l'effet extinctif invoqué ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 94-15534
Date de la décision : 11/06/1996
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

EFFET DE COMMERCE - Lettre de change - Escompte - Escompte en compte courant - Effet impayé - Contre-passation au débit du tireur - Absence - Portée - Action de l'escompteur contre le tireur - Fondement .

BANQUE - Compte - Compte d'effets impayés - Opposabilité au remettant - Condition

COMPTE COURANT - Contre-passation d'écriture - Effet non payé à l'échéance - Contre-passation au débit du tireur - Débit d'un compte spécial d'impayés (non)

EFFET DE COMMERCE - Lettre de change - Escompte - Escompte en compte courant - Effet impayé - Contre-passation au débit du tireur - Débit d'un compte spécial d'impayés (non)

Ayant fait apparaître du résultat d'une expertise que l'inscription du montant d'effets de commerce avait été effectuée par une banque dans " un compte spécial, compte contentieux d'impayés ", faisant ainsi ressortir que, ne résultant pas d'une écriture portant ce montant au débit du compte du client, cette inscription, improprement qualifiée de contre-passation, n'avait pas eu l'effet extinctif invoqué, une cour d'appel n'était pas tenue de répondre aux conclusions de la caution des engagements du client tirant les conséquences d'un prétendu débit du compte courant de celui-ci que ses constatations rendaient inopérantes.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 mars 1994

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1985-07-09, Bulletin 1985, IV, n° 207, p. 171 (rejet)

arrêt cité ; Chambre commerciale, 1988-11-03, Bulletin 1988, IV, n° 285, p. 195 (cassation), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 jui. 1996, pourvoi n°94-15534, Bull. civ. 1996 IV N° 166 p. 143
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 IV N° 166 p. 143

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Lafortune.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Badi.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, M. Spinosi.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.15534
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