AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Roland X..., demeurant ...,
en cassation d'un jugement rendu le 14 septembre 1994 par le tribunal de grande instance de Saint-Etienne (1e chambre civile), au profit de M. le directeur général des Impôts, domicilié au ministère du Budget, ...,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 26 mars 1996, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Poullain, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. de Gouttes, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Poullain, les observations de Me Cossa, avocat de M. X..., de Me Goutet, avocat de M. le directeur général des Impôts, les conclusions de M. de Gouttes, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Saint-Etienne, 14 septembre 1994) que l'administration fiscale, estimant que M. X... avait sous-évalué dans sa déclaration à l'enregistrement le prix des actions d'une société non cotée en bourse dont il avait reçu la nue-propriété en donation a mis en recouvrement un complément de droits; que sa réclamation ayant été rejetée, M. X... a assigné le directeur des services fiscaux de la Loire pour faire annuler cette décision;
Attendu que, M. X... reproche au jugement d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la valeur vénale réelle des biens transmis, quels qu'ils soient, ne peut être déterminée qu'en fonction de comparaisons tirées de transmissions de biens intrinsèquement similaires; qu'en l'espèce, l'administration fiscale n'avait produit aucun élément de cette nature; que, dès lors, en décidant que les titres de la société Loire Matériaux valaient 400 F sans disposer de tels éléments de comparaison, le Tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales; alors, d'autre part, qu'en utilisant lui-même, à la suite de l'administration fiscale, une méthode ne comportant aucune comparaison avec la mutation d'un bien intrinsèquement similaire, sans avoir constaté qu'une telle comparaison était impossible ni que le prix retenu était celui qui aurait résulté, au jour de la mutation litigieuse, du jeu de l'offre et de la demande, le tribunal a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales; alors en outre, qu'en décidant que l'administration fiscale n'avait pas à motiver sa notification de redressement par des éléments de comparaison tirés de transmissions de biens intrinsèquement similaires, le tribunal a violé l'article L 57, alinéa 1, du livre des procédures fiscales; et alors, enfin, qu'en énonçant qu'il reprochait à l'administration fiscale de ne pas avoir motivé son redressement par la méthode de comparaison avec des cessions de fonds de commerce similaires, tandis qu'il invoquait de façon plus générale l'absence de toute comparaison, le Tribunal a dénaturé ses conclusions et par là-même les termes du litige, en violation tant de l'article 1134 du Code civil que de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile;
Mais attendu, en premier lieu, que le jugement relève que la mutation porte sur des titres non cotés, en déduit, exactement s'agissant de biens dont la cession ne saurait être comparée à celle de biens similaires, que la valeur vénale réelle de ces titres doit être appréciée en tenant compte de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi proche que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande, et vérifie que l'évaluation a été faite en fonction de la valeur des éléments pris en compte à la période de la donation; qu'ayant ainsi justifié sa décision, le Tribunal a pu statuer comme il a fait;
Attendu, en second lieu, que M. X... n'est pas recevable à soutenir un grief de dénaturation de conclusions qu'il ne produit pas à l'appui de son pourvoi;
D'où il suit que le moyen, mal fondé en ses trois premières branches et irrecevable en la quatrième, ne saurait être accueilli;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., envers M. le directeur général des Impôts, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt et un mai mil neuf cent quatre-vingt-seize.