Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 31 janvier 1992), que M. X... a été engagé en qualité d'expert conseil bâtiment et travaux publics le 19 novembre 1980 par la société Socabat filiale de la société SMABTP qui employait à l'époque des faits 44 personnes ; que le 21 mai 1986 il a demandé l'autorisation de prendre un congé pour création d'entreprise, ce que la société Socabat a refusé le 11 juin 1986 en invoquant la circonstance que chaque expert exerçait seul son activité dans une circonscription géographique et que le remplacement ne pouvait être effectué que par le recrutement d'un nouvel expert dont la formation exigeait plusieurs mois ; que M. X... a saisi par erreur la formation de référé du conseil de prud'hommes de Tourcoing d'une contestation de la décision patronale, et n'a réitéré sa demande devant le conseil de prud'hommes de Lille, compétent, que le 15 septembre 1986 ; que, dans l'intervalle, le 1er septembre, M. X... a remis les clés de son bureau d'affectation, à Marcq-en-Baroeul, à la secrétaire de la société Socabat et a cessé de travailler pour le compte de celle-ci ; que le 7 octobre 1986 la société l'a licencié pour faute grave ;
Sur le premier moyen :
Attendu, que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande en annulation du refus de congé pour création d'entreprise, d'avoir dit que son licenciement était justifié par une faute grave et de l'avoir débouté de ses demandes en dommages-intérêts au titre de la rupture, alors, selon le moyen, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 122-32.22 du Code du travail, la contestation du refus d'un congé pour création d'entreprise demandé par un salarié d'une entreprise de plus de 200 salariés n'est soumise à aucun délai ; que pour dire ce texte inapplicable, la cour d'appel a dit M. X... salarié de la seule Socabat ; que cependant, la qualité d'employeurs conjoints doit être reconnue à deux sociétés exerçant sur le même salarié leur contrôle et leur autorité ; qu'en ne répondant pas aux conclusions de M. X... faisant valoir que, rémunéré par la société Socabat et recevant des instructions de la SMABTP allant jusqu'à déterminer la répartition du temps de travail du salarié, ce dont il ressortait que les deux sociétés étaient employeurs conjoints de M. X..., la cour d'appel a violé les articles 455 du nouveau Code de procédure civile, L. 122-32.22 et L. 122-32.23 du Code du travail ; alors, d'autre part, que pour l'application des dispositions de l'article L. 122-32.23 du Code du travail, l'effectif à prendre en considération est celui de l'unité économique et sociale dont dépend le salarié ; qu'en disant pour écarter la demande du salarié, que l'unité économique et sociale ne pouvait être reconnue entre la SMABTP et la Socabat, dont il n'était pas contesté qu'elles employaient plus de 1 500 salariés, alors qu'elle avait notamment constaté l'existence d'un comité d'entreprise commun, sans rechercher s'il n'existait pas une interchangeabilité du personnel des deux sociétés leur permettant de pourvoir facilement un poste laissé vacant par un départ en congé pour création d'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 431-4, L. 122-32.22 et L. 122-32.23 du Code du travail ; et alors, encore que, l'absence d'un salarié ne saurait constituer un motif de rupture et encore moins une faute grave, lorsque l'autorisation de s'absenter lui a été illégitimement refusée ; que dans une entreprise de plus de 200 salariés, le refus d'un congé pour création d'entreprise étant illégitime, le fait pour le salarié de passer outre ne peut constituer une cause de rupture ; qu'en retenant pourtant l'existence d'une faute grave imputable à M. X..., la cour d'appel a violé les textes susvisés et les articles L. 122-6 et L. 122-9 du Code du travail ;
Mais attendu qu'il ne peut être tenu compte de l'ensemble des effectifs de deux sociétés pour la détermination du régime légal de congé pour création d'entreprise, que si les sociétés ont été conjointement, employeurs du salarié ;
Attendu, qu'après avoir relevé que l'existence d'instances représentatives communes à différentes sociétés, parmi lesquelles figurent la société Socabat et la SMABTP, était la conséquence d'un accord collectif limité à cet objet, la cour d'appel a constaté que ces deux firmes n'avaient pas les mêmes dirigeants, que la société Socabat exerçait une activité autonome d'expertise technique distincte de l'activité d'assurance de la SMABTP, et qu'elle exerçait seule le pouvoir hiérarchique de l'employeur à l'égard de M. X... et de tous les experts qui n'étaient liés qu'à elle ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la SMABTP n'avait pas la qualité d'employeur conjoint elle a pu décider qu'il convenait de ne tenir compte que de l'effectif de la société Socabat, inférieur à 200 salariés, pour apprécier le régime du congé pour création d'entreprise ; d'où il suit qu'en ses deux premières branches le moyen n'est pas fondé ; et qu'en sa troisième, il est inopérant ;
Et sur le second moyen : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.