AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société Bonne Auberge Rostang et fils, société anonyme, dont le siège est Route nationale 7, Les ...,
2 / M. Philippe Y..., agissant en sa qualité d'administrateur du redressement judiciaire de la société anonyme Bonne Auberge Rostang père et fils, demeurant Route nationale 7, Les ...,
3 / M. Michel X..., ès qualités de représentant des créanciers du redressement judiciaire de la société anonyme Bonne Auberge Rostang père et fils, demeurant ..., en cassation de l'arrêt rendu le 9 septembre 1993 et de l'arrêt rectificatif rendu le 24 février 1994 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (4e chambre civile), au profit de la société civile immobilière (SCI) La Bonne Auberge, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 janvier 1996, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Bourrelly, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Aydalot, Boscheron, Toitot, Mmes Di Marino, Borra, Stephan, M. Peyrat, conseillers, MM. Chollet, Pronier, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Bourrelly, les observations de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de la société Bonne Auberge Rostang et fils, de MM. Y... et M. X..., ès qualités, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société civile immobilière (SCI) La Bonne Auberge, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le second moyen, en ce qu'il concerne le contrat d'entretien :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 septembre 1993, rectifié le 24 février 1994), que, propriétaire d'un immeuble à usage commercial loué à la société Bonne Auberge Rostang et fils, la société civile immobilière La Bonne Auberge (la SCI) a mis celle-ci en demeure d'exécuter certains travaux et, notamment le ravalement des façades ;
que la locataire s'est opposée à cette demande et a réclamé à la bailleresse le remboursement de dépenses d'entretien du réseau d'évacuation des eaux usées ;
Attendu que la société Bonne Auberge Rostang et fils fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de remboursement du coût du contrat d'entretien qu'elle a souscrit, alors, selon le moyen, "qu'aux termes des dispositions du Code civil constituant le droit commun du louage d'immeuble et notamment l'article 1756, les travaux d'entretien du réseau d'évacuation des eaux usées incombent au bailleur ;
qu'ainsi, la cour d'appel, qui après avoir constaté qu'en l'espèce la répartition des charges obéissait aux règles de droit commun en la matière, a néanmoins rejeté la demande de la société anonyme La Bonne Auberge en remboursement par le bailleur de factures se rapportant à l'entretien du réseau d'évacuation d'eaux usées, a violé les dispositions susvisées" ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la répartition des charges était régie par le droit commun, la cour d'appel a justement décidé que le prix du contrat d'entretien du réseau d'évacuation des eaux usées incombait à la locataire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1720 du Code civil, ensemble l'article 1754 de ce Code ;
Attendu que le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toutes espèces ; qu'il doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives ;
Attendu que, pour juger la société Bonne Auberge Rostang et fils tenue de supporter le coût du ravalement des façades, l'arrêt retient que ces travaux entrent dans la catégorie des réparations d'entretien dans la mesure où ils n'affectent pas l'intégrité des gros murs ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dépenses de ravalement ne constituent pas des charges locatives, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen, en ce qu'il concerne les factures :
Vu l'article 1756 du Code civil ;
Attendu que le curement des puits et celui des fosses d'aisance sont à la charge du bailleur, s'il n'y a clause contraire ;
Attendu que, pour débouter la société Bonne Auberge Rostang et fils de sa demande de remboursement de deux factures de curage des fosses d'aisances, l'arrêt retient que les dépenses ont trait à l'entretien du réseau d'évacuation des eaux usées et constituent de ce fait des charges locatives ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils ont jugé la société Bonne Auberge Rostang et fils tenue de supporter le coût du ravalement des façades de l'immeuble et d'effectuer les travaux dans les six mois de la signification de l'arrêt, et en ce qu'ils ont débouté la même société ainsi que M. Y... et M.
X..., ès qualités, de leur demande de remboursement de deux factures de curage des fosses d'aisances, les arrêts rendus le 9 septembre 1993 et le 24 février 1994, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Dit n'y avoir lieu à indemnité en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne la société civile immobilière (SCI) La Bonne Auberge, envers la société Bonne Auberge Rostang et fils, M. Y... et M. X..., ès qualités, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en marge ou à la suite des arrêts partiellement annulés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile , et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt et un février mil neuf cent quatre-vingt-seize.
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