AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société de traitement et protection des métaux, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 6 janvier 1994 par la cour d'appel de Rouen (2e chambre civile), au profit :
1 / de la société Mannesmann Demag, dont le siège est ...,
2 / de M. Daniel X..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de cession de la société GAD SAD et de représentant des créanciers du règlement judiciaire de la société GAD SAD, demeurant ...,
3 / de la compagnie la Préservatrice foncière accidents, dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 2 novembre 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Leclercq, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Leclercq, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de la Société de traitement et protection des métaux, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la compagnie la Préservatrice foncière accidents, de Me Roger, avocat de la société Mannesmann Demag, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 6 janvier 1994), que la Société de traitement et protection des métaux (STPM), a pris un compresseur en location, avec option d'achat, auprès du constructeur de l'appareil, la société Manesmann Demag ;
qu'invoquant des difficultés de fonctionnement, la STPM a cessé de payer les loyers ;
Attendu que la STPM fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée au paiement des loyers impayés, ainsi que de diverses sommes accessoires, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le bailleur est tenu de délivrer au preneur la chose louée, d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée et d'en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
que la cour d'appel a écarté la responsabilité du bailleur aux motifs que le preneur avait déclaré connaître les caractéristiques du matériel et que les formalités d'entretien étaient expliquées par une documentation ;
qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants visant uniquement l'obligation d'entretien à la charge du preneur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1719 et 1720 du Code civil ;
alors, d'autre part, que la cour d'appel a écarté la responsabilité du bailleur aux motifs que le représentant local a manqué à ses obligations de conseil et de résultat ;
qu'en statuant par un tel motif inopérant au regard de l'obligation de délivrance du bailleur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1719 et 1720 du Code civil ;
alors, en outre, que la cour d'appel a retenu que le preneur n'avait pas démontré que le matériel était affecté d'un vice lors de la livraison ;
que non seulement l'exposante n'avait pas allégué un vice caché mais un défaut de conformité, le vice ayant été apparent mais en outre la preuve d'un vice caché n'était pas indispensable pour prouver le défaut d'une délivrance adéquate ;
qu'en statuant par ces motifs inopérants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1719 et 1720 du Code civil ;
et alors, enfin, qu'un constructeur professionnel est tenu envers un utilisateur, qui n'est pas un spécialiste du matériel livré même s'il l'utilise, d'une obligation d'information ;
qu'en prétendant que le constructeur bailleur n'était pas tenu à une telle obligation, la cour d'appel a violé l'article 1135 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que les défaillances de l'appareil résultent d'erreurs de remontage du filtre à air, et d'une déformation d'un support de contacteur de sécurité, les unes et les autres postérieures à la délivrance du matériel, et imputables à l'entreprise chargée de l'entretien, dont il n'a pas été soutenu que la société Manesmann soit garante ;
que par là -même, il écarte l'existence d'un défaut de conformité et un manquement de la société Manesmann à une prétendue obligation d'entretien, celui-ci ne relevant pas d'elle ;
que la cour d'appel a, ainsi, légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que la société Manesmann avait, dans la documentation technique remise à la société locataire, clairement expliqué le mode de montage du filtre, et que les déformations volontairement apportées au matériel relevaient de l'obligation de conseil de l'entreprise chargée de l'entretien, la cour d'appel a pu retenir qu'aucune obligation supplémentaire de conseil, en relation avec le dommage, ne pesait sur la société Manesmann ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société de traitement et protection des métaux, envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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