La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/12/1995 | FRANCE | N°93-20978

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 décembre 1995, 93-20978


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Constructions modernes parisiennes (CMP), SA, représentée par son président du conseil d'administration, M. Philippe Y..., dont le siège est ..., en cassation d'une ordonnance rendue le 15 novembre 1993 par le président du tribunal de grande instance de Créteil qui a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts à effectuer des visites et des saisies qu'il estimait lui faire grief ;

La demander

esse invoque, à l'appui du mémoire ampliatif, trois moyens de cassation et, à l'...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Constructions modernes parisiennes (CMP), SA, représentée par son président du conseil d'administration, M. Philippe Y..., dont le siège est ..., en cassation d'une ordonnance rendue le 15 novembre 1993 par le président du tribunal de grande instance de Créteil qui a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts à effectuer des visites et des saisies qu'il estimait lui faire grief ;

La demanderesse invoque, à l'appui du mémoire ampliatif, trois moyens de cassation et, à l'appui de son mémoire personnel, quatre moyens de cassation, annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 2 novembre 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Geerssen, conseiller référendaire rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Geerssen, les observations de Me Choucroy, avocat de la société CMP, de Me Foussard, avocat du directeur général des Impôts, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que, par ordonnance du 15 novembre 1993 n 1111, le président du tribunal de grande instance de Créteil a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux des sociétés anonymes SAR Entreprise (Société d'application et de revêtement), CMP (Constructions modernes parisiennes), ... (Val-de-Marne), en vue de rechercher la preuve de la fraude prohibée par l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 des sociétés SAR, SAR Entreprise, SAR Entreprise générale, SFGSE (Société financière de gestion de service entreprise) SGSE (Société de gestion de service entreprise), SAR International, CMP, SN Soteba et société Holding Francis Poullain ;

Sur le premier moyen du mémoire ampliatif et sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il appartient au juge de vérifier que la demande a été faite par délégation expresse du ministre chargé de l'Economie et qu'une délégation permanente ne saurait répondre à cette condition ;

et alors, d'autre part, qu'à la date du dépôt de la demande, la délégation de signature était caduque à raison de la cessation des fonctions de son auteur et qu'ainsi le juge n'en a pas vérifié la validité ;

qu'ainsi, il a privé sa décision de base légale ;

Mais attendu, d'une part, que si les visites et saisies prévues par l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne peuvent être autorisées que dans le cadre des enquêtes demandées soit par le ministre chargé de l'Economie, soit par le conseil de la concurrence, il n'est pas interdit au ministre de déléguer ses pouvoirs conformément aux lois et règlements ;

que la délégation permanente de signature des ministres de l'Economie et du Budget donnée par le décret du 27 avril 1993 publié au Journal officiel du 29 avril au profit de M. Patrice X..., sous-directeur à la Direction générale des Impôts pour signer, au nom du ministre de l'Economie, les demandes d'enquêtes mentionnées à l'article 48 de l'ordonnance précitée portant sur l'application de son article 31, permet au délégataire de prendre au nom du ministre les décisions qui, dans la limite de ses attributions, relèvent de la compétence de ce ministre sans que cette délégation implique l'absence par le ministre de la possibilité d'exercer personnellement ses pouvoirs ;

que le président du Tribunal n'avait donc pas à constater que M. X... agissait sur instructions expresses du ministre chargé de l'économie ;

Attendu, d'autre part, que la circonstance que l'ordonnance attaquée vise une délégation permanente de signature caduque et non la délégation régulièrement donnée à M. X... pour signer les demandes d'enquête au nom du ministre en exercice n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la demande d'enquête retenue par l'ordonnance ;

Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen du mémoire ampliatif et sur le deuxième moyen du mémoire personnel, pris en sa première branche, réunis :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait aussi grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, que le juge autorisant une visite domiciliaire en vertu de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne peut se référer qu'aux documents produits par le demandeur et détenus par celui-ci de manière apparemment licite et qu'il doit mentionner dans sa décision l'origine des pièces sur lesquelles il s'est fondé ;

qu'en ne respectant pas cette exigence, le juge a privé sa décision de base légale ;

Mais attendu que l'ordonnance indique l'origine des pièces et que celles-ci paraissent en possession de l'Administration de manière licite, la pièce 5 étant un extrait du rapport de vérification de comptabilité d'une société GEI sise à Monaco et Nice établie par les agents des impôts français et la pièce 27 étant détaillée, quant à son contenu, p. 4 de l'ordonnance aux rubriques 7/1 et 7/2 ;

que les moyens ne sont pas fondés ;

Sur le troisième moyen du mémoire ampliatif :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait encore grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, qu'il appartient au juge de se référer à des éléments d'information et de vérifier concrètement qu'ils sont de nature à laisser présumer que la personne visée ne satisfait pas aux règles, notamment relatives aux factures, de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

que l'évocation des éléments fournis par l'auteur de la demande ne s'accompagne pas d'une analyse concrète permettant de vérifier le bien fondé de la demande et l'utilité de l'autorisation demandée alors même que l'Administration était d'ores et déjà en possession des éléments visés par la demande ;

qu'en outre, la proximité terminologique des raisons sociales et l'identité de locaux ne sauraient suffire à asseoir la présomption justifiant la demande d'autorisation ;

que l'ordonnance est donc dépourvue de base légale ;

Mais attendu que le moyen tend à contester la valeur des éléments retenus par le juge comme moyens de preuve du bien fondé des agissements ;

que de tels moyens sont inopérants pour critiquer l'ordonnance dans laquelle le juge a recherché par l'appréciation des éléments fournis par l'Administration s'il existait des présomptions d'agissements visés par la loi justifiant la recherche de la preuve de ces agissements au moyen d'une visite en tous lieux même privés et d'une saisie de documents s'y rapportant ;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, quatrième rameau et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du mémoire personnel :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait, de plus, grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, qu'il y aurait eu détournement de procédure, l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ne permettant que l'exercice d'un contrôle administratif de la concurrence et non pas de la facturation, et l'Administration disposant d'autres moyens juridiques tel son droit de communication ;

Mais attendu que les dispositions de l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 permettent à l'administration des Impôts de bénéficer du mode d'investigation prévu par l'article 48 pouvant être autorisé au cours de l'enquête prévu à l'article 47, que la possibilité de mise en oeuvre du droit de communication par l'administration fiscale n'interdit pas de recourir aux visites et saisies domiciliaires prévues à l'article 31 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

que les moyens ne sont pas fondés ;

Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche, du mémoire personnel :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait, au surplus, grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, que le juge délégué a méconnu les exigences de l'article 45 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 en ne vérifiant pas les habilitations des contrôleurs des impôts qu'ils désignaient ;

Mais attendu que le juge a autorisé des inspecteurs des Impôts à effectuer la visite et saisie et à être assistés de contrôleurs et de chefs de section mentionnant page 7 de son ordonnance que tous ces agents étaient des impôts et habilités ;

que le moyen manque en fait ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, premier rameau du mémoire personnel :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait aussi grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, que le juge aurait dû préciser la nature des documents à saisir ;

Mais attendu que le juge n'a pas à désigner expressément les documents à saisir ;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, seconde branche, troisième rameau dudit mémoire :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait encore grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, que le juge n'a pu analyser les documents, ni vérifier le bien-fondé de la demande, étant donnée la concordance dans le temps entre la date de la requête et celle de la reddition de l'ordonnance ;

Mais attendu que les motifs et le dispositif de l'ordonnance rendue en application de l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 sont réputés être établis par le juge qui l'a rendue et l'a signée ;

que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, seconde branche, du deuxième rameau et sur le quatrième moyen du mémoire personnel :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait, de plus, grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, qu'il ressort du procès-verbal de visite et saisie que des documents ont été saisis irrégulièrement par des agents incompétents et sans rédaction de procès-verbal ;

Mais attendu que de tels griefs relèvent du contrôle de la régularité des opérations et non de celui de la légalité de l'autorisation ;

que les moyens sont irrecevables ;

Sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du mémoire personnel :

Attendu que la société Constructions modernes parisiennes fait enfin grief à l'ordonnance d'avoir autorisé la visite et saisie litigieuses, alors, selon le pourvoi, que l'Administration n'a pas découvert d'éléments supplémentaires permettant d'étayer ses présomptions ;

Mais attendu que la demanderesse n'est pas fondée à critiquer l'opportunité de la mesure sollicitée dès lors que le juge doit se borner à apprécier si les conditions légales de cette mesure sont réunies ;

que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société CMP, envers le directeur général des Impôts, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.

2173


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 93-20978
Date de la décision : 12/12/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Président du tribunal de grande instance de Créteil, 15 novembre 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 déc. 1995, pourvoi n°93-20978


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.20978
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award