AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Sefa, société à responsabilité limitée, dont le siège est à Corravillers, 70310 Fauconney, en cassation d'un arrêt rendu le 6 décembre 1991 par la cour d'appel de Besançon (chambre sociale), au profit :
1 / de M. Joël X..., demeurant 18 bis, voie Gela, 70000 Froideconche,
2 / de l'ASSEDIC de Belfort-Montbéliard et Haute-Saône, dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 octobre 1995, où étaient présents :
M. Gélineau-Larrivet, président, M. Merlin, conseiller rapporteur, MM. C..., Y..., A..., Z...
B..., MM. Desjardins, Finance, conseillers, MM. Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Trassoudaine-Verger, conseillers référendaires, M. Martin, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Merlin, les observations de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société Sefa, les conclusions de M. Martin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu les articles L. 122-32-4 et L. 122-32-5 du Code du travail ;
Attendu que M. X..., engagé, le 25 juin 1973, en qualité d'ouvrier paysagiste et ouvrier agricole spécialisé, a été victime d'un accident du travail le 31 mars 1987 ;
qu'après plusieurs arrêts de travail, dont le dernier en date du 14 décembre 1987, le médecin du Travail l'a déclaré apte à la reprise du travail sous réserve d'éviter le port de charges de plus de 25 kgs et la conduite d'engins et/ou pratiquer la conduite d'engins en alternance ;
que l'employeur ayant provoqué, au vu des tâches confiées au salarié, une nouvelle consultation du médecin du Travail, ce dernier, dans un avis du 3 mars 1989, maintenait son précédent avis en précisant que la seule contre-indication absolue était l'abattage et la taille d'arbres dangereux en zones escarpées et rocheuses et que, pour les autres travaux, il s'agissait de contre-indications relatives concernant plus la durée du travail que le travail lui-même, ces activités ne pouvant être exécutées par le salarié en continu ;
qu'à la suite de ce nouvel avis, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité d'aménager ses conditions de travail et de le reclasser ;
Attendu que, pour condamner l'employeur au paiement de l'indemnité prévue à l'article L. 122-32-7 du Code du travail, la cour d'appel énonce, qu'en cas de contestation sur l'appréciation émise par le médecin du Travail, il appartenait à l'employeur de saisir l'inspecteur du Travail, conformément à l'article L. 241-10-1, dernier alinéa, du Code du travail, de la difficulté tenant à la portée de l'avis d'aptitude ;
qu'elle ajoute que l'employeur ne pouvait de son propre chef décider que le salarié était inapte à son emploi et qu'en l'absence de décision contraire prise par l'inspecteur du Travail, l'avis d'aptitude s'imposait à l'employeur ;
qu'après avoir constaté que le salarié n'avait pas retrouvé son emploi, ni un emploi similaire, elle en conclut qu'il était en droit de se prévaloir de l'indemnité prévue à l'article L. 122-32-7 du Code du travail ;
Attendu, cependant, que, sans contester l'avis du médecin du Travail sur l'aptitude de l'intéressé, l'employeur soutenait qu'en raison des restrictions émises dans cet avis, le salarié ne pouvait pas exercer son emploi et qu'il lui était impossible d'aménager son poste de travail ou de le reclasser ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier si l'employeur, comme il le soutenait, justifiait de l'impossibilité d'aménager le poste du salarié ou de lui proposer un autre emploi conforme aux prescriptions du médecin du Travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement dans ses dispositions condamnant l'employeur au paiement de l'indemnité prévue à l'article L. 122-32-7 du Code du travail, l'arrêt rendu le 6 décembre 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne M. X... et l'ASSEDIC de Belfort-Montbéliard et Haute-Saône, envers la société Sefa, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Besançon, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale , et prononcé par M. le président en son audience publique du six décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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