AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mlle Annie X..., demeurant ...Ecole Normale, 34000 Montpellier, en cassation d'un arrêt rendu le 31 mars 1993 par la cour d'appel de Grenoble (chambre des urgences), au profit :
1 / de la société Gimi Systèmes, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,
2 / de la société Paul Argoud, société anonyme, dont le siège est ...,
3 / de M. A..., administrateur judiciaire syndic, pris en sa qualité de représentant des créanciers et liquidateur de Mlle Annie X..., demeurant ..., L'Impérial, 26000 Valence,
4 / de M. Y..., mandataire liquidateur, pris en sa qualité de liquidateur de la société Gimi Systèmes, demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 octobre 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, MM. Edin, Grimaldi, Apollis, Mme Clavery, MM.
Lassalle, Badi, Armand-Prevost, conseillers, MM. Z..., Rémery, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mlle Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Tricot, les observations de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat de Mlle X..., les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt déféré (Grenoble, 31 mars 1993), que la société Gimi Systèmes a fourni à Mlle X... un équipement informatique comprenant divers matériels et logiciels destinés à l'activité de l'entreprise ;
qu'elle a demandé la condamnation de Mlle X... à lui payer le solde de sa facture, soit 121 513 francs, tandis que Mlle X... a sollicité, par une demande reconventionnelle, le versement de dommages-intérêts par la société Gimi Systèmes et par la société Paul Argoud, qui était intervenue dans la réalisation de ce marché ;
qu'en cours de procédure d'appel, l'entreprise de Mlle
X...
a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires ;
que le liquidateur judiciaire est intervenu à l'instance ;
que la cour d'appel a fixé à la somme principale de 121 513 francs la créance de la société Gimi Systèmes à l'encontre de Mlle X..., a condamné la société Gimi Systèmes à payer à Mlle X... la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts, a constaté la compensation entre ces deux créances à hauteur du solde subsistant en faveur de la société Gimi Systèmes et a rejeté la demande de dommages-intérêts présentée par Mlle X... contre la société Paul Argoud ;
Sur le premier moyen du pourvoi qui est dirigé contre la société Gimi Système :
Attendu que Mlle X... reproche à l'arrêt d'avoir fixé à la somme principale de 121 513 francs, outre les intérêts jusqu'au jour du jugement d'ouverture de son redressement judiciaire, la créance de la société Gimi Systèmes alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'aux termes de l'article 1184, alinéa 2, du Code civil, la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix, ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages-intérêts ;
que, dès lors, en demandant à la cour d'appel, d'abord de juger que la société Paul Argoud et la société Gimi Systèmes avaient failli à leurs obligations en s'abstenant de faire les études "nécessaires suffisantes" et en fournissant un service télématique inadapté à la finalité de l'entreprise, ensuite de condamner "conjointement et solidairement" la société Paul Argoud et la société Gimi Systèmes à lui payer la somme de 197 402,40 francs à titre de restitution des sommes exposées pour des investissements inutiles en matériel et logiciel ainsi que diverses sommes à titre de dommages-intérêts, Mlle X... avait nécessairement demandé la résolution du contrat litigieux ;
qu'en conséquence, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1184, alinéa 2, du Code civil, 4 et 12 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ;
qu'en se bornant à énoncer, pour déclarer Mlle X... redevable envers la société Gimi Systèmes, de la somme de 121 513 francs, que la demande était incontestable dans son principe et dans son montant dès lors que la résolution du contrat n'était pas demandée, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences des dispositions des articles 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des conclusions déposées par Mlle X... que celle-ci, après avoir demandé à la cour d'appel de déclarer les sociétés Paul Argoud et Gimi Systèmes responsables de la défaillance de l'équipement informatique, a évalué l'indemnisation de son préjudice en distinguant le remboursement des investissements inutiles, tant en matériels qu'en logiciels, des dommages-intérêts de nature à réparer le préjudice subi à la suite d'une saisie-arrêt prétendument abusive, le préjudice financier lié à la perte de bénéfices et le préjudice né des agios supplémentaires supportés par l'entreprise ;
qu'en demandant le remboursement des investissements inutiles, Mlle X..., loin de proposer la restitution des matériels et des logiciels, s'est bornée à solliciter la prise en charge de l'achat d'un second ordinateur et des acomptes versés à la société Gimi Systèmes pour le logiciel qu'elle avait fourni ;
qu'ainsi, en énonçant que la résolution du contrat n'était pas demandée, la cour d'appel n'a pas modifié l'objet du litige et a répondu aux conclusions invoquées ;
d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Paul Argoud ;
Vu l'article 152, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que Mlle X... s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel qui a rejeté, le 31 mars 1993, sa demande tendant à l'indemnisation par la société Paul Argoud du préjudice subi par son entreprise personnelle mise en liquidation judiciaire le 11 août 1992 ;
que le liquidateur n'est pas intervenu à la procédure avant l'expiration du délai imparti par la loi pour le dépôt du mémoire en demande ;
que dès lors le pourvoi formé par Mlle X..., qui n'est pas représentée par le liquidateur, est irrecevable ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen qui n'est dirigé que contre la société Paul Argoud :
REJETTE le pourvoi formé par Mlle X..., en tant qu'il est dirigé contre la société Gimi Système ;
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé par Mlle X..., en tant qu'il est dirigé contre la société Paul Argoud ;
Condamne Mlle X..., envers les défendeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du cinq décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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