AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société Codec, société anonyme, prise en la personne de son administrateur provisoire, M. Hubert, Didier B..., dont le siège est ...,
2 / M. Jean-Christophe, Patrick X..., pris en sa qualité d'administrateur au redressement judiciaire de la société Codec, demeurant ...,
3 / M. Y..., Camille A..., pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et de représentant des créanciers de la société Codec, demeurant ...,
4 / Mme Marie-Dominique Du Z..., prise en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et de représentant des créanciers de la société Codec, demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 20 octobre 1992 par la cour d'appel de Paris (3e chambre, section A), au profit du GIE Moet Hennessy, dont le siège est ..., défendeur à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 octobre 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Tricot, les observations de Me Bertrand, avocat de la société Codec, de MM. X..., A... et de Mme Du Z..., ès qualités, de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat du GIE Moet Hennessy, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 121 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que la clause par laquelle l'acheteur refuse toute réserve de propriété s'impose au fournisseur du seul fait qu'elle est portée à sa connaissance ;
que dès lors, le fournisseur ne peut invoquer le bénéfice d'une clause de réserve de propriété, dans les conditions énoncées par le texte susvisé, qu'en démontrant que l'acheteur a renoncé à ce refus avant la livraison ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Codec a été mise en redressement judiciaire sans avoir payé diverses marchandises que lui avait livrées le Groupement d'intérêt économique Moët Hennessy ;
que ce dernier, invoquant une clause de réserve de propriété, en a demandé la restitution ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient que la fiche "accord" concernant l'année des livraisons en cause, à laquelle étaient annexées les conditions générales d'achat de la société Codec, lesquelles excluaient toute réserve de propriété, n'a fait l'objet d'aucune acceptation mais, au contraire, a été expressément refusée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le refus par le fournisseur des conditions générales d'achat démontrait qu'il avait eu connaissance du refus, par l'acheteur, de toute réserve de propriété, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 octobre 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims ;
Condamne le GIE Moet Hennessy, envers les demandeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Paris, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du cinq décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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