AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Martine X..., demeurant ... (Grand Duché du Luxembourg), en cassation d'un arrêt rendu le 19 octobre 1993 par la cour d'appel de Metz (chambre civile), au profit :
1 / de l'Union financière de location de matériel "UNIMAT", société anonyme, dont le siège est ..., immeuble Crédit Agricole, 78280 Guyancourt,
2 / de la société La Table d'Italie, société à responsabilité limitée, dont le siège est ..., actuellement en liquidation judiciaire et représentée par M. Robert Tresse, liquidateur judiciaire, défenderesses à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 octobre 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Armand-Prevost, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Mourier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Armand-Prevost, les observations de Me Vincent, avocat de Mme X..., de Me Roger, avocat de l'UNIMAT, les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que l'interdiction faite au créancier d'agir en relevé de forclusion plus d'une année après le jugement d'ouverture enlève à tout juge le pouvoir de se prononcer sur le fond de la demande ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société UNIMAT, se prétendant créancière de la société La Table d'Italie en vertu de deux contrats de crédit-bail, a saisi, le 19 mars 1992, le juge-commissaire du redressement judiciaire de cette dernière d'une requête en relevé de forclusion, faute d'avoir déclaré sa créance dans le délai légal ;
que, par ordonnance du 15 avril 1992, le juge-commissaire a rejeté cette requête au motif que le redressement judiciaire de la société La Table d'Italie avait été ouvert le 21 février 1991, soit plus d'un an avant la requête ;
que, sur opposition formée à l'encontre de cette ordonnance, le Tribunal a relevé la société UNIMAT de la forclusion encourue ;
que Mme X..., gérante de la société en redressement judiciaire, a formé contre ce jugement un appel nullité ;
Attendu que, pour déclarer cet appel irrecevable, l'arrêt retient que le vice invoqué n'est pas suffisamment grave eu égard à la mauvaise foi de la gérante de la société débitrice ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a ordonné une rectification d'erreur matérielle, l'arrêt rendu le 19 octobre 1993, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar ;
Condamne l'UNIMAT et la société La Table d'Italie, envers Mme X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Metz, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt et un novembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
1938