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14/11/1995 | FRANCE | N°92-16331;92-16503

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 novembre 1995, 92-16331 et suivant


Joint les pourvois nos 92-16.331 et 92-16.503 qui attaquent le même arrêt ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que les sociétés cubaines Y... Garcia Y X... Ltd (société Y... Garcia) et Por Larranaga-Fabrica de Tabacos (société Larranaga) ont effectué le dépôt, la première, des marques H. Upmann et Monte-Cristo, la seconde, de la marque Por Larranaga, dont les premiers dépôts ont été effectués, en 1936, pour la marque H. Upmann et, en 1946, pour les deux autres, pour désigner principalement les cigares ; qu'en janvier 1959, ces deux sociétés ont qu

itté, en raison des événements politiques, leur pays ; que par arrêté du 15 ...

Joint les pourvois nos 92-16.331 et 92-16.503 qui attaquent le même arrêt ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que les sociétés cubaines Y... Garcia Y X... Ltd (société Y... Garcia) et Por Larranaga-Fabrica de Tabacos (société Larranaga) ont effectué le dépôt, la première, des marques H. Upmann et Monte-Cristo, la seconde, de la marque Por Larranaga, dont les premiers dépôts ont été effectués, en 1936, pour la marque H. Upmann et, en 1946, pour les deux autres, pour désigner principalement les cigares ; qu'en janvier 1959, ces deux sociétés ont quitté, en raison des événements politiques, leur pays ; que par arrêté du 15 septembre 1960, les nouvelles autorités cubaines ont placé sous contrôle les industries du tabac au nombre desquelles figuraient les deux sociétés ; qu'en 1966, a été créée l'entreprise cubaine du tabac (société Cubatabaco) qui " concentre toutes les phases de l'économie nationale du tabac ", le dirigeant de la société Cubatabaco étant l'administrateur des deux sociétés ; que les administrateurs successifs de ces sociétés ont fait procéder au renouvellement des dépôts suscités, les 22 juin 1961, 5 mai 1976 et 30 avril 1986, pour la marque Por Larranaga, les 6 décembre 1966, 18 novembre 1976 et 18 novembre 1986, pour la marque H. Upmann et les 21 avril 1961, 20 avril 1976 et 16 mai 1986, pour la marque Monte-Cristo ; que, parallèlement, ces trois marques ont fait l'objet du renouvellement de leurs dépôts par les sociétés Larranaga et Y... Garcia et par la société Cuban Cigar Brands à laquelle elles ont été cédées ; que le dépôt de la marque Por Larranaga, cédée le 27 avril 1978, a été renouvelé le 22 décembre 1976, enregistré sous le numéro 1 004 591, et le 11 juin 1986, enregistré sous le numéro 1 369 502 ; que le dépôt des marques H. Upmann et Monte-Cristo, cédées le 4 juin 1976, a été renouvelé, pour la première, le 12 novembre 1976 et le 6 octobre 1986, enregistré sous le numéro 1 373 610, et, pour la seconde, le 18 octobre 1976, puis le 6 octobre 1986, enregistré sous le numéro 1 398 605 ; que depuis 1961, la Société nationale d'exploitation industrielle des tabacs et allumettes (société Seita) assure l'importation et la distribution des cigares portant les marques litigieuses, ces produits étant exportés par la société Cubatabaco dont la société Coprova assure la représentation exclusive sur le territoire français ; que courant 1985 et 1986, la société Seita est entrée en relations avec la société Congar, devenue la société Tabaccalera de Garcia (société Congar) qui lui a proposé de distribuer en France des cigares portant lesdistes marques, en lui précisant qu'elle avaient été acquises par la société Cuban Cigar Brands ; que ces pourparlers n'ont pas abouti après la mise en garde de la société Seita par la société Coprova qui a contesté la validité de ces marques ; que le 17 juillet 1986, les sociétés Larranaga, Cubatabaco et Coprova ont assigné la société Congar en contrefaçon de la marque Por Larranaga ; que le même jour, les sociétés Y... Garcia, Cubatabaco et Coprova ont assigné la société Congar en contrefaçon des marques H. Upmann et Monte-Cristo ; que le 16 octobre 1987, la société Cuban Cigar Brands a assigné les sociétés Larranaga, Cubatabaco, Coprova et Seita en usurpation et contrefaçon de la marque Por Larranaga ; que le même jour, la société Cuban Cigar Brands a assigné les sociétés Y... Garcia, Cubatabaco, Coprova et Seita en usurpation et contrefaçon des marques H. Upmann et Monte-Cristo ; que ces instances ont été jointes ;

Sur le premier moyen du pourvoi n° 92-16.331 et le premier moyen pris en ses deux branches du pourvoi n° 92-16.503 :

Attendu que par ces moyens pris du défaut de base légale au regard des articles 30, 31, 117, 118, 122, 123, 371 et suivants et 648 du nouveau Code de procédure civile ainsi que de la règle Nul en France ne plaide par procureur, les sociétés Cubatabaco, Coprova, Larranaga, Y... Garcia et Seita font grief à l'arrêt d'avoir déclaré la société Cuban Cigar Brands, titulaire des trois marques litigieuses alors que par un acte du 16 septembre 1991, antérieur à l'ordonnance de clôture rendue le 25 novembre 1991, elle a cédé ses droits sur lesdites marques à la société ITB Corporation et sans avoir recherché si la société Cuban Cigar Brands avait un siège au moment de l'assignation et si elle l'avait conservé pendant la procédure ;

Mais attendu, en premier lieu, que les sociétés Cubatabaco, Coprova, Larranaga, Y... Garcia et Seita font état de la date de l'acte de cession des marques litigieuses et non de celle de la publication dudit acte ; que, par application des dispositions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1964, seule cette publication a pour effet de rendre l'acte opposable aux tiers ; qu'en l'état, il n'est pas établi, ni soutenu, qu'à la date de l'ordonnance de clôture, la cession desdites marques avait été publiée au registre national des marques ; qu'en retenant que la société Cuban Cigar Brands était, pour les tiers, à cette date, titulaire des marques, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève que la société Cuban Cigars Brands justifie avoir été constituée en 1976 suivant la loi des Antilles Néerlandaises et avoir son siège social à Curaçao ; que de ces constatations et appréciations la cour d'appel, qui a retenu qu'il était satisfait aux exigences de l'article 648 du nouveau Code de procédure civile, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

Mais sur le deuxième moyen pris en sa première branche du pourvoi n° 92-16.331 et du pourvoi n° 92-16.503 :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour décider que les sociétés Cubatabaco, Coprova, Larranaga, Y... Garcia et Seita avaient commis des actes de contrefaçon des marques litigieuses, l'arrêt relève qu'en 1960, les mesures prises à Cuba même si elles n'ont pas eu pour effet juridique la dissolution des sociétés Larranaga et Y... Garcia ou le transfert à l'Etat de leur patrimoine, ont abouti par l'absence d'indemnisation et la gestion sous couvert d'une situation provisoire durant depuis 30 années, à une spoliation interdisant de considérer que les sociétés cubaines portant le même nom que les sociétés spoliées étaient les continuateurs de ces dernières et avaient pu valablement renouveler pour leur propre compte les dépôts des marques qui n'avaient pas fait l'objet d'une cession régulière à leur profit ; que l'arrêt relève également que les sociétés Larranaga et Y... Garcia, si elles n'ont pas accompli de formalités tendant au transfert de leur siège et à leur reconstitution à l'extérieur de Cuba, ont, néanmoins poursuivi une activité en établissant des centres d'affaires à New York pour la première et Madrid pour la seconde et en prenant les décisions nécessaires avec le concours de tous leurs associés pour effectuer la cession des marques ; qu'à partir de ces constatations et appréciations, la cour d'appel retient que les véritables titulaires des marques " sont en droit, comme c'est le cas en l'espèce, de s'en faire au contraire attribuer le bénéfice " ;

Attendu qu'en statuant par des motifs impropres à établir que les sociétés Larranaga et Y... Garcia avaient pu fonctionner hors de Cuba dans des conditions régulières au regard de la loi et des statuts qui leur étaient applicables et que les personnes qui avaient décidé et effectué la cession des marques litigieuses avaient la capacité juridique de le faire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 92-16331;92-16503
Date de la décision : 14/11/1995
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

MARQUE DE FABRIQUE - Cession - Publicité - Défaut - Inopposabilité aux tiers .

Par application des dispositions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1964, seule la publication de l'acte de cession d'une marque au registre national des marques a pour effet de rendre l'acte opposable aux tiers. Justifie légalement sa décision la cour d'appel qui, dès lors qu'il n'était ni établi ni soutenu qu'à la date de l'ordonnance de clôture, la cession avait été publiée, retient que la société cédante était, pour les tiers, à cette date, titulaire des marques.


Références :

Loi 64-1360 du 31 décembre 1964 art. 11

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 mars 1992

A RAPPROCHER : Chambre commerciale, 1994-05-24, Bulletin 1994, IV, n° 188 (1), p. 150 (cassation partielle), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 nov. 1995, pourvoi n°92-16331;92-16503, Bull. civ. 1995 IV N° 261 p. 240
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1995 IV N° 261 p. 240

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : Mme Piniot.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Gomez.
Avocat(s) : Avocats : Mme Thomas-Raquin, M. Bertrand, la SCP Célice et Blancpain.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:92.16331
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