AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société A.A.F.I.P., dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 13 mars 1992 par la cour d'appel de Paris (18ème chambre section C), au profit de Mme Michèle X..., demeurant ..., défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 18 juillet 1995, où étaient présents : M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Merlin, conseiller rapporteur, M. Monboisse, conseiller, Mlle Sant, M. Frouin, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Merlin, les observations de Me Choucroy, avocat de la société A.A.F.I.P., les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que Mme X..., engagée depuis le 11 avril 1988, par la société AAFIP, en qualité de conductrice de machine, a été victime d'un accident du travail le 29 octobre 1990 ;
qu'après avoir repris son travail, le 26 novembre 1990, elle a été licenciée pour fautes graves, par lettre du 13 décembre 1990 ;
Sur le second moyen :
Attendu que, l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à la salariée une indemnité de préavis, une indemnité de congés payés afférents au préavis, une indemnité de licenciement ainsi qu'une indemnité sur le fondement de l'article L. 122-32-7 du Code du travail, alors, selon le moyen, que viole l'article L. 122-44 du Code du travail l'arrêt attaqué qui refuse d'examiner la quasi-totalité des faits invoqués par l'employeur pour justifier le licenciement de la salariée, au motif qu'ils étaient antérieurs de plus de deux mois au licenciement, tout en constatant que certains d'entre eux dataient du 6 décembre 1990 et que la procédure de licenciement avait été initiée dès le 7 décembre 1990, ce qui autorisait l'employeur à prendre en compte tous les faits survenus plusieurs mois auparavant ;
Mais attendu que le défaut d'énonciation du ou des motifs du licenciement dans la lettre de licenciement équivaut à une absence de motifs ;
que la cour d'appel qui a constaté que la preuve n'était pas rapportée que la lettre de licenciement, dépourvue de motifs, était accompagnée d'une annexe comportant l'indication des motifs du licenciement a, abstraction faite d'un motif surabondant, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 122-32-7 du Code du travail ;
Attendu que, pour condamner l'employeur à payer à la salariée une indemnité en application de l'article L. 122-32-7 du Code du travail, la cour d'appel énonce que l'employeur n'a pas fait procéder à la visite de reprise du travail par le médecin du travail et qu'il a ainsi fait perdre à la salariée le bénéfice de la protection prévue par les articles L. 122-32-4 et suivants du Code du travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, qu'en l'absence d'une visite de reprise du travail par le médecin du travail, la suspension du contrat de travail n'avait pas pris fin, et alors, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 122-32-7 du Code du travail ne sont pas applicables lorqu'en méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-32-2 du même Code, l'employeur, au cours de la suspension du contrat de travail provoquée par un accident du travail ou une maladie professionnelle, prononce la résiliation de ce contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions condamnant l'employeur à payer à la salariée l'indemnité prévue par l'article L. 122-32-7 du Code du travail , l'arrêt rendu le 13 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Paris, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale , et prononcé par M. le président en son audience publique du sept novembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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