AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Marc Y..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 11 janvier 1994 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre), au profit :
1 / de la Caisse d'épargne Ecureuil de Périgueux, dont le siège est ...,
2 / du CGI Cegerec, dont le siège est ...,
3 / du Crédit foncier de France, dont le siège est ...,
4 / du GIE Gaumont Columbia films, RCA Vidéo Gie, dont le siège est ..., défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 28 juin 1995, où étaient présents : M. de Bouillane de Lacoste, président, Mme Catry, conseiller référendaire rapporteur, M. Fouret, conseiller, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Catry , les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de M. Y..., de Me Foussard, avocat de la Caisse d'épargne Ecureuil de Périgueux, les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi et arrêté la décision au 30 juin 1995 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 332-1 et L. 332-5 du Code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause ;
Attendu que la procédure collective de redressement judiciaire civil est destinée, par les mesures prévues au second des textes susvisés, à permettre au débiteur se trouvant dans la situation caractérisée au premier de ces textes, de faire face au remboursement de ses dettes exigibles et à échoir dans la mesure de ses ressources ;
Attendu que pour infirmer le jugement du tribunal d'instance en ce qu'il avait rééchelonné le remboursement des trois emprunts souscrits par M. Y... auprès de la Caisse d'épargne et dire que les crédits accordés par ce créancier continueront à être réglés suivant les modalités contractuelles, l'arrêt attaqué, statuant en matière de redressement judiciaire civil, retient que le débiteur n'a pas estimé nécessaire de produire devant elle le montant de ses ressources et charges, qu'il n'est pas contesté que mis à part un faible arriéré, les prêts accordés par la Caisse d'épargne étaient à jour lors de l'audience devant le premier juge, que si la loi n'interdit pas d'appliquer un traitement différent aux créanciers d'un même débiteur, l'équité conduit à ce que les créanciers ayant accordé le même type de prêts et se trouvant à peu près dans la même situation subissent un traitement sensiblement équivalent ;
Attendu qu'en statuant comme elle a fait, sans constater que la continuation du remboursement des emprunts souscrits auprès de la Caisse d'épargne, suivant les modalités contractuelles, était compatible avec les ressources de l'emprunteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 janvier 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ;
Condamne les défendeurs, envers M. Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Bordeaux, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. Fouret, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement de M. le président de X... de Lacoste, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile, en son audience publique du dix sept octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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