AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par les époux Dominique X..., demeurant ... à Dax (Landes), en cassation de deux jugements rendus les 19 août 1993 et 29 septembre 1993 par le tribunal de grande instance de Dax, au profit de la Direction des services fiscaux des Landes, dont le siège est à Mont-de-Marsan (Landes), représentée par son directeur en exercice, domicilié audit siège, défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 20 juin 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Poullain, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. Mourier, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Poullain, les observations de Me Balat, avocat des époux X..., de Me Goutet, avocat du directeur des services fiscaux des Landes, les conclusions de M. Mourier, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que les époux X... ont acquis un fonds de commerce pour un prix estimé inférieur à sa valeur vénale par l'administration fiscale qui leur a réclamé des droits d'enregistrement complémentaires et des pénalités ; qu'ils ont assigné le directeur des services fiscaux des Landes en annulation du redressement ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que M. et Mme X... reprochent au jugement d'avoir rejeté leur demande, alors, selon le pourvoi, qu'aux termes des articles 1351 du Code civil et 1480 du nouveau Code de procédure civile, l'autorité de chose jugée se trouve attachée au jugement qui décide de commettre un expert, dès lors que le juge ordonnant une expertise a statué sur un droit litigieux ;
qu'ainsi les jugements attaqués, rendus après désignation d'un expert ayant pour mission de fixer la valeur vénale du fonds, en retenant l'évaluation de la commission départementale de conciliation, pour rejeter la demande, bien que le jugement avant dire droit du 1er avril 1991, décidant de commettre un expert, ait définitivement jugé que la valeur fixée par ladite commission ne pouvait être retenue faute d'avis motivé, ont méconnu l'autorité de chose jugée dont ce jugement était revêtu, violant ainsi les textes susvisés ;
Mais attendu que le dispositif du jugement du 1er avril 1991 ordonne une mesure d'instruction sans écarter de prendre en compte l'avis de la commission de conciliation ;
qu'il n'a pas autorité de chose jugée à cet égard ;
que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l' article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande des époux X..., le jugement énonce que l'Administration ne prétend plus qu'à une évaluation à 1 120 000 francs, valeur fixée par la commission de conciliation ;
Attendu qu'en se bornant à faire état de l'appréciation de la commission administrative de conciliation, sans énoncer sa propre motivation, le Tribunal n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 août 1993 et rectifié le 29 septembre 1993, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Dax ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits jugements et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Bayonne ;
Condamne le directeur des services fiscaux des Landes, envers les époux X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du tribunal de grande instance de Dax, en marge ou à la suite des jugements annulés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-sept octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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