AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Sarah Y..., épouse X..., demeurant ..., en cassation d'un arrêt rendu le 29 octobre 1993 par la cour d'appel de Paris (23e chambre, section B), au profit du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis ..., pris en la personne de son syndic, la société anonyme COFAP, dont le siège est ..., défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 18 juillet 1995, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Chemin, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Capoulade, Deville, Mlle Fossereau, MM. Fromont, Villien, conseillers, M. Chapron, conseiller référendaire, M. Weber, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Chemin, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de Mme X..., de Me Cossa, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis ... (3e), les conclusions de M. Weber, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 octobre 1993), que, propriétaire dans un immeuble en copropriété d'un lot comprenant un appartement, deux chambres de service, un cabinet de débarras, deux caves ainsi que 86/801e de six autres chambres de service, et représentant au total les 86 cent millièmes des parties communes de l'immeuble, Mme X... a assigné le syndicat des copropriétaires en annulation d'une décision de l'assemblée générale des copropriétaires du 20 juin 1990 portant sur la vente des six chambres de service indivises entre dix copropriétaires, adoptée à la double majorité des copropriétaires concernés ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen, "que, lorsqu'il est imprécis, le règlement de copropriété doit être éclairé par les mentions de l'état descriptif de division ;
qu'en l'espèce, le règlement de copropriété disposait en son article 2 intitulé "Propriété privative" , "Outre la propriété des parties communes déterminées ci-dessus, chaque copropriétaire aura la propriété exclusive et particulière des locaux compris dans son attribution" et l'état descriptif de division, inclus dans le règlement de copropriété ainsi que l'ont constaté les premiers juges, précisait que cette "attribution" portait notamment, pour les lots 4 à 15, sur "une quote-part" (variable pour chaque lot) des "801e des chambres n 7, 17, 18, 23, 31, 37 situées aux 7e et 8e étages de l'immeuble" ;
que, dès lors, en refusant de prendre en considération les mentions de l'état descriptif pour compléter la définition imprécise du règlement, motif pris d'une incompatibilité inopérante entre "propriété exclusive et particulière" et "attribution d'une quote-part de partie indivise", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions combinées des articles 2, 8 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble les dispositions de l'article 1134 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant relevé l'imprécision de la classification dans le règlement de copropriété des six chambres de service litigieuses au nombre des parties privatives ou des parties communes et constaté que ces locaux faisaient l'objet d'une propriété indivise entre plusieurs propriétaires, qu'aucun de ces locaux ne constituait un lot individualisé, ne se trouvait affecté de quotes-parts particulières de parties communes, et ne faisait l'objet d'une propriété exclusive et particulière, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant qu'en l'absence de caractère contractuel des mentions de l'état descriptif de division, la classification de ces chambres de service dépendait des présomptions légales et qu'elles devaient être considérées comme des parties communes spéciales aux copropriétaires titulaires de droits à leur égard ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen, "1 ) qu'en l'absence de disposition légale particulière, les copropriétaires de "parties communes spéciales", non réunis en syndicat secondaire, constituent une indivision forcée de droit commun ;
que la vente des "parties communes spéciales" suppose donc l'accord unanime des copropriétaires concernés ;
qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a, dès lors, violé l'article 815-3 du Code civil ;
2 ) que la décision d'aliéner des parties communes n'échappe à l'exigence d'un vote unanime des copropriétaires réunis en assemblée que si la conservation de celles-ci n'est pas nécessaire à la destination de l'immeuble ;
qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'aliénation des "chambres" litigieuses portait atteinte à la destination de l'immeuble, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 26 a) et du dernier alinéa du même article de la loi du 10 juillet 1965" ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de faire une recherche qui ne lui était pas demandée, a exactement retenu que les copropriétaires des parties communes spéciales ne constituaient pas une indivision forcée du droit commun, et que l'administration et la disposition de telles parties communes étaient régies par les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X..., envers le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis ... (3e), aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
1943