AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Loiret, dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 27 février 1992 par la cour d'appel d'Orléans (Chambre sociale), au profit de Mlle Jacqueline X..., demeurant ..., défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 juin 1995, où étaient présents : M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mlle Sant, conseiller référendaire rapporteur, MM. Monboisse, Merlin, conseillers, MM. Frouin, Boinot, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mlle le conseiller référendaire Sant, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Loiret, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu qu'employée par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Loiret depuis le 25 juin 1968, Mlle X... a été mise à la retraite, à l'âge de 60 ans, par lettre du 11 janvier 1989, à compter du 16 février 1989, avec un préavis de trois mois ;
que la salariée ne pouvait bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein à la date de la rupture ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Orléans, 27 février 1992) de l'avoir condamné à payer à la salariée une somme représentant la différence entre l'indemnité conventionnelle de licenciement et la prime de mise à la retraite déjà versée, alors, selon le moyen, que si la loi du 30 juillet 1987, codifiée, garantit au salarié, lors de son départ en retraite, le minimum des avantages légaux afférents à un licenciement, lorsqu'il ne peut pas jouir du bénéfice d'une pension de vieillesse à taux plein, elle n'a ni pour objet, ni pour effet de lui ouvrir droit à une indemnité conventionnelle, quelle qu'elle soit ;
qu'en ouvrant à Mlle X..., à la suite d'une rupture reposant sur une cause réelle et sérieuse, une option sur le plan conventionnel, tirée de l'article 14 de la convention collective nationale, propre à un mode de rupture distinct de celui mis en oeuvre sur le seul fondement des articles 38 et 39 de la même convention collective, l'arrêt attaqué a violé la loi des parties et l'article 1134 du Code civil, ensemble les articles L. 122-14-12, L. 122-14-13 et L. 132-4 du Code du travail, dont les dispositions ne pouvaient être substituées par le juge à des avantages purement conventionnels ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 14 de la convention collective nationale du Crédit agricole mutuel que l'indemnité de licenciement est due au salarié dès lors que ce licenciement n'a pas été prononcé pour faute grave ;
qu'ayant exactement retenu qu'en application de l'article L. 122-14-13 du Code du travail, la mise à la retraite de la salariée qui ne pouvait bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein constituait un licenciement, la cour d'appel a décidé, à bon droit, que l'intéressée avait droit à l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
que le moyen n'est pas fondé ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que Mlle X... sollicite sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 5 000 francs ;
Et attendu qu'il y a lieu d'accueillir cette demande ;
PAR CES MOTIFS ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Loiret, envers Mlle X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
La condamne également à payer à Mlle X... la somme de 5 000 francs, exposée par cette dernière et non comprise dans les dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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