AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Ader et Y..., commissaires-priseurs, dont l'étude est ... (2ème), en cassation d'un arrêt rendu le 23 mars 1993 par la cour d'appel de Paris (1ère chambre), au profit de Mme Maryvonne Z..., née Le Tallec, demeurant ... à Saint-Mandé (Val-de-Marne), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 juin 1995, où étaient présents : M. Thierry, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Ancel, conseiller rapporteur, MM. Lemontey, Chartier, Gélineau-Larrivet, Mme Gié, conseillers, M. Savatier, Mme Bignon, conseillers référendaires, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Ancel, les observations de Me Copper-Royer, avocat de la société Ader et Y..., de la SCP Vier et Barthélemy, avocat de Mme Z..., les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les trois moyens, réunis et pris en leurs diverses branches :
Attendu que selon les juges du fond, M. X... a confié à M. Y..., commissaire-priseur, la vente de sa collection d'objets d'art ;
que par lettre du 15 mars 1990, le commissaire-priseur, précisant les conditions de la vente, mentionnait : "il est bien entendu que les frais de vente ne pourront en aucun cas être supérieurs à 15 % TTC y compris la plus-value" ;
Attendu que la société civile professionnelle Ader-Tajan fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 23 mars 1993) de l'avoir condamnée à payer à Mme Z..., ayant-droit de M. X..., la somme de 884 760 francs représentant le montant de la taxe forfaitaire de 4 % pour plus-value, que le commissaire-priseur n'avait pas eu à règler en raison de l'ancienneté de l'acquisition des objets mis en vente ;
qu'il est reproché à la cour d'appel, d'une part, d'avoir modifié la convention de forfait fixant à 15 % la retenue pour frais, d'autre part, d'avoir méconnu le sens du terme "plus-value", utilisé dans son sens général et non comme visant la seule taxe forfaitaire, et d'avoir inversé la charge de la preuve en énonçant que le commissaire-priseur "ne justifiait pas avoir informé le vendeur de la possibilité d'exonération avant son acceptation du forfait", enfin d'avoir pris en considération une lettre de M. X... du 5 mars 1991 sans vérifier que cette pièce avait été communiquée régulièrement ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés du jugement, la cour d'appel a souverainement retenu que la convention sur les frais de la vente y incluait le montant de la taxe de 4 % sur les plus-values, dont M. X... a par la suite été exonéré, de sorte que, dans le respect de la convention et pour assurer son exécution de bonne foi, le commissaire-priseur ne pouvait pas prélever sur le produit des ventes le montant d'une taxe qu'il n'avait pas règlée ;
que la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision, indépendamment du motif surabondant relatif à l'information du vendeur sur les possibilités d'exonération ;
Et attendu qu'il résulte du dossier de la procédure que la pièce visée par le troisième moyen a été régulièrement communiquée ;
Et attendu que le pourvoi revêt un caractère abusif ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Ader et Y... à une amende civile de 20 000 francs, envers le Trésor public ;
la condamne, envers Mme Z..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
La condamne également à payer à Mme Z... la somme de 12 000 francs au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
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