AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq septembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de Me BERTRAND, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jérôme, contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 20ème chambre, en date du 14 septembre 1994, qui, pour infractions aux règles sur le stationnement des véhicules, l'a condamné à 49 amendes de 220 francs et 31 amendes de 500 francs ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les parties ont été entendues dans l'ordre suivant : "Me Y..., substitué par Me Chevanne, avocat du prévenu, en ses conclusions et plaidoirie, M. Balit, avocat général, en ses réquisitions" ;
"alors que, selon l'article 513, alinéa 3 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, les parties doivent avoir la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 de ce Code ;
qu'il s'en déduit que la défense du prévenu doit être présentée après les réquisitions du ministère public ;
que la cour d'appel, dont l'arrêt révèle que le prévenu a été astreint à présenter sa défense avant les réquisitions de l'avocat général, a violé les textes visés au moyen" ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 21-1 du Code de la route, 529-2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'infractions au Code de la route (stationnement) du 27 mars 1991 au 17 avril 1992, commises avec le véhicule Austin immatriculé 206 GMA 75 ;
"aux motifs qu'il résulte du dossier et des débats que le premier juge a correctement exposé les faits de la procédure et par des motifs pertinents que la Cour adopte, et qui répondent par avance aux moyens soulevés en appel, a déclaré le prévenu coupable des 80 contraventions aux règles du stationnement qui lui étaient reprochées ;
que l'article 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne met pas obstacle aux présomptions de droit ou de fait instituées en matières pénale ;
qu'il en est ainsi de l'article L. 21-1 du Code de la route aux termes duquel le titulaire du certificat d'immatriculation est responsable pécuniairement des infractions à la réglementation sur le stationnement des véhicules pour lesquels une peine d'amende est encourue, à moins qu'il n'établisse l'existence d'un cas de force majeure ou qu'il ne fournisse des renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction ;
que l'article L. 21-1 permet d'apporter la preuve contraire et laisse entiers les droits de la défense ;
qu'il résulte du rapprochement des articles L. 21-1 du Code de la route et 592-2 du Code de procédure pénale que, pour bénéficier des dispositions exonératoires du premier de ces textes, l'indication de l'utilisateur du véhicule doit être donnée lors de la réclamation adressée au ministère public par le propriétaire poursuivi pour contravention aux règles du stationnement public, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ;
que la dernière contravention a été contestée par Mme X..., mais cette correspondance ne mentionne pas le véritable utilisateur du véhicule 206 GMA 75, immatriculation pourtant relevée dans chaque procès- verbal, avec la date, l'heure et le lieu de l'infraction, renseignements qui permettaient l'identification de l'utilisateur du véhicule en infraction (arrêt attaqué p. 7, al. 2, 5, 6, 7 et p. 8, al. 1) ;
"1 ) alors que le titulaire du certificat d'immatriculation d'un véhicule sur lequel une responsabilité pécuniaire, encourue en raison d'infractions à la réglementation sur le stationnement, dispose du droit de s'exonérer de cette responsabilité lorsqu'il fournit les renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction ; qu'aucun texte ne réglemente le moment où ces renseignements doivent être apportés et aucune forclusion n'est prévue à l'encontre du prévenu qui ne fournit pas ces renseignements dans le délai de 30 jours courant à compter de l'infraction, qu'en subordonnant l'exercice du droit de s'exonérer de la responsabilité pécuniaire à la condition que le titulaire du certificat d'immatriculation fournisse les renseignements utiles lors de sa réclamation adressée au ministère public près du tribunal de police, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"2 ) alors que X... avait soutenu dans ses conclusions d'appel que le seul utilisateur du véhicule en cause était Jacqueline X... ;
que celle-ci avait reconnu ce fait et sa responsabilité pour les différentes infractions, objet des poursuites, dans cette attestation qui était annexée aux conclusions de X... ;
qu'en omettant de répondre à ce moyen qui, non seulement, apportait la démonstration de l'innocence de X..., mais en outre donnait toutes indications utiles permettant d'identifier l'auteur véritable des infractions qui avaient été reconnues, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision en violation des textes susvisés" ;
Attendu que les infractions reprochées au prévenu constituent des contraventions ;
qu'elles ne sont pas visées au 2 de l'article R. 256 du Code de la route et qu'elles ont été commises avant le 18 mai 1995 ;
que, dès lors, elles sont amnistiées par l'effet de l'article 1er de la loi du 3 août 1995 ;
Par ces motifs ;
DECLARE l'action publique ETEINTE .
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Jorda, Mme Baillot, MM. Pibouleau, Le Gall conseillers de la chambre, M.
Poisot conseiller référendaire, M. Perfetti avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;