AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la SEML Mondelange Expansion, dont le siège est Hôtel de Ville à Mondelange (Moselle), représentée par ses dirigeants en exercice domiciliés audit siège en cette qualité, en cassation d'un arrêt rendu le 13 octobre 1993 par la cour d'appel de Metz (Chambre civile), au profit de M. Robert X..., demeurant ..., défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 juin 1995, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Villien, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Capoulade, Deville, Mlle Fosereau, MM. Chemin, Fromont, conseillers, Mm. Chapron, conseiller référendaire, M. Lucas, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Villien, les observations de la SCP Lesourd et Baudin, avocat de la SEML Mondelange Expansion, de Me Parmentier, avocat de M. X..., les conclusions de M. Lucas, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les trois moyens, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 13 octobre 1993), qu'en 1988, la société d'économie mixte locale Mondelange Expansion (SMEL), a chargé M. X..., architecte, d'une mission de maîtrise d'oeuvre relative à la réalisation d'un lotissement ;
qu'après exécution, M. X... a réclamé au maître de l'ouvrage des honoraires pour travaux supplémentaires, que la SEML a refusé de régler ;
que l'architecte l'a assignée pour en obtenir le paiement ;
Attendu que la SEML fait grief à l'arrêt d'accueillir partiellement cette demande, alors, selon le moyen, "1 / qu'en vertu de l'article 1315 du Code civil, violé par l'arrêt attaqué, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ;
2 / que ne déduit pas de ses propres constatations, les conséquences légales qui en découlent et viole derechef l'article 1315 du Code civil ainsi que les articles 6, 9 et 12 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel qui condamne la société SEML au paiement d'honoraires supplémentaires dont elle constate qu'ils ne sont justifiés par le demandeur à l'instance par la production d'aucun contrat ou écrit ;
3 / qu'en relevant d'office ce moyen mélangé de fait et de droit, sans provoquer, préalablement, les observations contradictoires des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / qu'aux termes de l'article 1347 du Code civil, ne peut valoir commencement de preuve par écrit qu'un acte émané de celui contre lequel la demande est formée ou de celui qu'il représente ;
qu'ayant constaté que la lettre du 27 juin 1990, (établie sur entête de la commune et faisant état de versements effectués par la ville) était signée par le maire de Mondelange, agissant en qualité de premier magistrat de la commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ce texte, puisqu'il en résultait que ce courrier n'émanait pas du représentant légal de la société d'économie mixte, personne morale de droit privé distincte de la collectivité publique qu'est la commune, agissant en cette qualité, et qu'il émanait du maitre, dans le cadre d'éventuelles obligations communales distinctes, étrangères au litige auquel la commune n'est pas partie ;
5 / que la cour d'appel ne pouvait, sans violer l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, omettre de répondre au chef des conclusions de la société SEML faisant valoir que "M. X... n'était pas intervenu dans la cadre de la démolition de l'immeuble de Schemerten et que pour preuve, elle produisait l'attestation de l'entreprise Vaglio qui y avait seule procédé" ;
6 / que manque de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil, l'arrêt attaqué qui fait droit à la demande en paiement de l'architecte, sans rechercher si celui-ci avait exécuté les prestations convenues" ;
Mais attendu qu'ayant constaté, sans se fonder sur un moyen relevé d'office, et sans inverser la charge de la preuve, que la lettre du 27 juin 1990, produite par M. X..., et émanant de celui contre lequel la demande était formée, admettait que la somme de 253 573 francs réclamée par l'architecte était conforme non seulement aux données budgétaires, mais également aux données contractuelles du marché, et relevé que cette lettre constituait un commencement de preuve par écrit rendant vraisemblable le fait allégué, complété par d'autres éléments de preuve établissant que la mission de maîtrise d'oeuvre avait été effectuée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a souverainement retenu que la demande de M. X... en paiement d'honoraires supplémentaires était justifiée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SEML Mondelange Expansion à payer à M. X... la somme de 8 000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
La condamne également aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-neuf juillet mil neuf cent quatre-vingt-quinze.