AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Michel H..., demeurant ..., Saint-Lô (Manche), en cassation d'un arrêt rendu le 16 juillet 1992 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile et commerciale), au profit :
1 / de M. B..., demeurant à Saint-Sever (Calvados),
2 / des Mutuelles du Mans assurances, ..., défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 mai 1995, où étaient présents :
M. de X... de Lacoste, président, Mme Lescure, conseiller rapporteur, MM. C..., G..., E...
A..., Marc, M. Aubert, conseillers, M. D..., Mme Catry, conseillers référendaires, M. Roehrich, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Lescure, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. H..., de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. B... et des Mutuelles du Mans, les conclusions de M. Roehrich, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi et arrêté la décision au 30 juin 1995 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, suivant acte reçu le 10 juillet 1974 par M. B..., notaire, les époux Auguste H... et les époux Michel H... se sont reconnus débiteurs solidaires de la somme de 20 000 francs à l'égard des consorts Z..., dans les droits desquels ont été subrogés les consorts F... ;
qu'une hypothèque de premier rang a été consentie par Mme Y..., épouse d'Auguste H..., en garantie de cette dette ;
que Mme Y... ayant été mise en liquidation des biens, M. B... a produit, pour le compte des consorts F..., à titre chirographaire, leur faisant perdre le bénéfice de leur garantie ;
que les immeubles hypothéqués ont été mis en vente ;
que le prix de vente a été réparti entre les créanciers de Mme Y..., bénéficiaires de privilèges et d'une hypothèque de cinquième rang ;
que les consorts F..., remboursés de leurs créances par M. B... et son assureur, les Mutuelles du Mans, les ont subrogés dans leurs droits ;
que ces derniers ont formé une action en paiement contre M. Michel H..., qui a, lui-même, formé une demande reconventionnelle en dommages-intérêts contre l'officier public ;
Attendu que, pour débouter M. H... de cette demande, la cour d'appel a énoncé que la faute commise par M. B... était "sans lien direct" avec l'obligation de paiement pesant sur M. Michel H... en vertu de l'acte de prêt du 10 juillet 1974 et que l'obligation d'exécuter la convention par lui souscrite ne pouvait constituer un préjudice ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi, tout en relevant qu'il résultait des pièces produites, qu'en l'absence de faute de M. B..., le prix de vente des immeubles aurait servi à désintéresser les créanciers subrogeants, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juillet 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne M. B... et les Mutuelles du Mans assurances, envers M. Michel H..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Caen, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. Fouret, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement de M. le président de X... de Lacoste, conformément à l'article 452 du nouveau Code de procédure civile, en son audience publique du dix juillet mil neuf cent quatre-vingt-quinze.