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04/07/1995 | FRANCE | N°93-20202

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 juillet 1995, 93-20202


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. X..., mandataire-liquidateur de la liquidation judiciaire de la société Logitec international industries, demeurant ..., place de l'hôtel de ville à Nanterre (Hauts-de-Seine), en cassation d'un arrêt rendu le 29 juin 1993 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section A), au profit de la société Sharp Y... France, venant aux droits de la société Sharp Burotype Machines, société anonyme, dont le siège social est ... I

I à Tremblay-les-Gonesses (Seine-saint-Denis), défenderesse à la cassatio...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. X..., mandataire-liquidateur de la liquidation judiciaire de la société Logitec international industries, demeurant ..., place de l'hôtel de ville à Nanterre (Hauts-de-Seine), en cassation d'un arrêt rendu le 29 juin 1993 par la cour d'appel de Paris (5e chambre, section A), au profit de la société Sharp Y... France, venant aux droits de la société Sharp Burotype Machines, société anonyme, dont le siège social est ... II à Tremblay-les-Gonesses (Seine-saint-Denis), défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 23 mai 1995, où étaient présents : M. Nicot, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Léonnet, conseiller rapporteur, MM. Leclercq, Dumas, Gomez, Poullain, Canivet, conseillers, M. Lacan, Mme Geerssen, M. Huglo, conseillers référendaires, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Léonnet, les observations de Me Le Prado, avocat de M. X..., ès-qualités, de la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, avocat de la société Sharp Y... France, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 29 juin 1993), que la société Sharp électronics France (société Sharp), importateur en France et en Belgique du matériel de micro-informatique et de bureautique de la marque Sharp, a concédé, le 12 janvier 1990, à la société Logitec, la distribution de différents scanners portant la marque Sharp et, à titre exclusif, le "scanner" JX 100 pour une période déterminée ;

que la société Logitec s'est engagée à ne pas s'intéresser directement ou indirectement sur l'ensemble du territoire concédé à tous produits identiques à ceux prévus au contrat et susceptibles de les concurrencer pendant toute la durée du contrat et, au delà , durant deux ans ;

que, suivant avenant daté du 23 mai 1990, les quotas d'approvisionnement ont été supprimés et le terme de la convention a été fixé au 30 septembre 1990 avec un préavis de trois mois ;

que conformément à cet avenant, la société Sharp a, par lettre recommandée du 29 juin 1990, avisé la société Logitec qu'elle mettait fin au contrat le 30 septembre 1990 ;

que la société Logitec a assigné devant le tribunal de commerce la société Sharp en dommages-intérêts pour le préjudice qui lui avait été causé ;

que l'instance a été reprise par le liquidateur judiciaire de la société Logitec ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X..., liquidateur judiciaire de la société Logitec fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'ordonnance du 1er décembre 1986 prohibe l'exploitation abusive d'un état de dépendance économique ;

que la société Logitec a fait valoir que l'exclusivité qui lui a été consentie était subordonnée à des conditions d'achat quantitatives très strictes et à des prix anormalement élevés ;

que le fait qu'un avenant signé le 23 mai 1990 ait modifié ces conditions n'a en rien supprimé le caractère abusif de la dépendance qui lui a été initialement imposée par la société Sharp ;

que la cour qui écarte la demande en nullité formée par la société Logitec aux seuls motifs que les quotas d'achat ont été supprimés le 23 mai 1990 a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de l'ordonnance précitée ;

et alors, d'autre part, que les articles 85 et 86 du traité CEE prohibent les abus de position dominante pouvant consister notamment dans le fait d'imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction non équitables ;

que la société Logitec a dénoncé les pratiques abusives dont elle a été l'objet de la part de la société Sharp à l'occasion de l'exclusivité qui lui a été initialement consentie ;

que le fait qu'un avenant signé le 23 mai 1980 ait modifié ces conditions, ne dispensait pas la cour d'appel d'examiner la régularité de la convention du 12 janvier 1990 au regard des dispositions précitées du Traité de Rome ;

que faute d'avoir procédé à une telle recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;

Mais attendu que la preuve d'un état de dépendance économique ou d'un abus de position dominante ne saurait, en l'absence de toutes autres justifications, résulter des seuls quotas d'achat contenus dans un contrat de concession exclusive ;

qu'en la cause la cour d'appel qui a également constaté que les quotas quantitatifs avaient été supprimés par la société Sharp quatre mois après la signature du contrat initial, n'avait pas à effectuer de plus amples recherches ;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que le liquidateur judiciaire fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que manque à son obligation de bonne foi et commet une faute la société qui concède une exclusivité, assortie de quotas d'achat irréalistes, tout en sachant qu'elle ne sera pas en mesure d'assurer l'exclusivité territoriale promise ;

que la cour qui a écarté toute responsabilité de la société Sharp aux seuls motifs que cette dernière ne pouvait s'opposer aux importations parallèles a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 alinéa 3 et 1147 du Code civil ;

et alors, d'autre part, que M. X... faisait valoir dans ses conclusions et établissait par une lettre en date du 5 juillet 1990 régulièrement versée aux débats, que le concédant avait manqué à ses obligations contractuelles en proposant à un tiers la distribution exclusive des produits Sharp TX 100 ;

qu'en ne répondant pas à ces écritures attestant de la faute contractuelle commise par la société Sharp à l'encontre de son distributeur exclusif, la Cour a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt a relevé que le liquidateur ne justifiait pas que la société Sharp ait manqué à ses obligations contractuelles en livrant le "scanner" TX 100, dont elle avait concédé l'exclusivité à la société Logitec, à d'autres entreprises ou en participant à la création d'un réseau parallèle ;

que la cour d'appel, qui a ainsi répondu aux conclusions prétendument omises a légalement justifié sa décision ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que le liquidateur judiciaire fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le fait qu'il ait été mis fin à un abus de dépendance économique par un avenant du 23 mai 1990 n'était pas de nature à exonérer la société Sharp de sa responsabilité contractuelle pour la période antérieure, la société Logitec ayant fait valoir que l'attitude de son concédant lui avait occasionné un préjudice considérable ;

que la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil et alors, d'autre part, que la cour d'appel se devait également de rechercher si le fait que la société Sharp ait imposé à la société Logitec une clause de non-concurrence illégale au regard du droit communautaire ne lui avait pas occasionné un préjudice ;

que faute de l'avoir fait, elle a, à nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant constaté que les quotas d'achat avaient été supprimés quatre mois après la signature du contrat de concession et que la clause de non-concurrence, dont il n'était pas alléguée qu'elle ait été appliquée, était illégale au regard du droit communautaire, n'avait pas à faire des recherches que ses constatations rendaient inopérantes ;

que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches

Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que la société Sharp sollicite sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 12 000 francs ;

Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Rejette également la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne M. X..., ès-qualités, envers la société Sharp Y... France, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du quatre juillet mil neuf cent quatre-vingt-quinze.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 93-20202
Date de la décision : 04/07/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Concurrence - Ordonnance du 30 juin 1945 - Abus de position dominante.

REGLEMENTATION ECONOMIQUE - Concurrence - Ordonnance du 1er décembre 1986 - Etat de dépendance économique.

COMMUNAUTE ECONOMIQUE EUROPEENNE - Libre concurrence - Articles 85 et 86 du traité - Quotas d'importation dans une concession exclusive.


Références :

Ordonnance 45-1483 du 30 juin 1945
Ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986
Traité du 25 mars 1957 art. 85 et 86

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (5e chambre, section A), 29 juin 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 jui. 1995, pourvoi n°93-20202


Composition du Tribunal
Président : Président : M. NICOT conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.20202
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