AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société à responsabilité limitée Sud Primeurs, dont le siège est 79, Cours Bournissac à Cavaillon (Vaucluse), en cassation d'un jugement rendu le 15 octobre 1992 par le conseil de prud'hommes d'Ajaccio (section commerce), au profit de M. Mohamed Y... chez M. X..., Précojo Route de Bonifacio à Portovecchio (Corse), défendeur à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 mai 1995, où étaient présents : M. Lecante, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, Mme Brouard, conseiller référendaire, rapporteur, MM. Carmet, Boubli, Brissier, conseillers, Mme Girard-Thuilier, conseiller référendaire, M. Kessous, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Brouard, les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles 455, alinéa 1er, et 458, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que les jugements doivent être motivés, à peine de nullité ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. Y... a été embauché par la société sud Primeurs à compter du 1er juillet 1985 jusqu'au 31 mars 1991 ;
que soutenant avoir été licencié, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour inobservation de la procédure de licenciement et des indemnités de rupture ;
Attendu que, pour condamner la société Sud primeurs à payer à M. Y... des indemnités de préavis et de licenciement et des dommages-intérêts pour inobservation de la procédure de licenciement, le jugement attaqué se borne à énoncer que l'intéressé a plus de deux ans d'ancienneté, que l'employeur l'a licencié sans respecter la procédure de licenciement et que, bien que régulièrement convoqué, l'employeur ne s'est pas présenté à l'audience ;
Qu'en se déterminant par ces seules affirmations, sans donner aucun motif lui permettant d'énoncer que le salarié avait été licencié par la société Sud primeurs et sans dire en quoi la procédure de licenciement n'avait pas été respectée, le conseil de prud'hommes n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 15 octobre 1992, entre les parties, par le conseil de prud'hommes d'Ajaccio ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Bastia ;
Condamne M. Y..., envers la société Sud Primeurs, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du conseil de prud'hommes d'Ajaccio, en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt huit juin mil neuf cent quatre-vingt-quinze.