REJET des pourvois formés par :
- X... Illich, alias Y...,
contre les arrêts nos 11 et 12 de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 6 février 1995, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de complicité d'assassinats, tentatives d'assassinats, dégradation par explosifs de biens immobiliers et mobiliers, infractions à la législation sur les explosifs, en relation avec une entreprise terroriste, ont le premier, rejeté sa demande de publicité des débats et du prononcé de l'arrêt sur son appel de l'ordonnance de placement en détention provisoire rendue par le juge d'instruction ; le second, confirmé ladite ordonnance.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt rejetant la demande de publicité :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 199, 216, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de X... tendant à ce que les débats se déroulent et l'arrêt soit rendu en audience publique sans mentionner la lecture du rapport conformément à l'article 199, alinéa 1er du Code de procédure pénale " ;
Attendu que l'arrêt mentionne que, dès l'ouverture des débats, leur publicité, comme celle de l'arrêt, a été demandée par l'un des avocats de Illich X..., que le président a procédé à l'interrogatoire d'identité de l'appelant, que des observations ont été présentées par l'avocat général et par l'avocat de la partie civile, et que l'appelant comparant a eu la parole en dernier ;
Attendu que l'arrêt a ainsi satisfait aux exigences de l'article 199 du Code de procédure pénale, dont les dispositions de l'alinéa 5, relatives à la publicité en cas de comparution personnelle, n'imposent pas la formalité du rapport ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 199, alinéa 5 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de X... tendant à ce que les débats se déroulent et l'arrêt soit rendu en audience publique ;
" aux motifs que les faits reprochés au requérant sont en relation avec une entreprise terroriste et qu'en conséquence il apparaît que la publicité des débats est de nature à nuire à l'ordre public ;
" alors qu'en n'énonçant pas les faits de la poursuite, la chambre d'accusation ne permet pas à la Cour de Cassation de s'assurer de la légalité de sa décision " ;
Attendu que pour rejeter la demande tendant à ce que les débats se déroulent et l'arrêt soit rendu en audience publique, la chambre d'accusation se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en cet état, les juges, qui ont souverainement apprécié la suite à donner à la demande de publicité et qui n'avaient pas à s'en expliquer autrement, ont justifié la décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt confirmant l'ordonnance de placement en détention provisoire :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 186, 186-1, 201, alinéa 2 et 593 du Code de procédure pénale, 5 § 1, 5 § 4 et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la chambre d'accusation a confirmé l'ordonnance de mise en détention provisoire de X... en date du 18 janvier 1995 ;
" aux motifs que dans leur mémoire les avocats de l'appelant demandent à la Cour de constater l'illégalité de la détention de Illitch X... aux motifs qu'il aurait été interpellé à Khartoum et détenu de Khartoum à Villacoublay dans des conditions illégales ; qu'il convient d'observer sur la régularité du placement en détention que X... a été interpellé et arrêté non dans le cadre de la présente procédure, mais dans celui d'une autre procédure d'information ouverte à la suite de l'attentat commis le 22 avril 1982 rue Marbeuf ; qu'en conséquence, la chambre d'accusation, saisie de l'appel de X... contre l'ordonnance du juge d'instruction le plaçant en détention provisoire n'est pas compétente pour statuer sur la validité d'actes de procédure accomplis dans le cadre d'une autre affaire dans laquelle, au demeurant, la Cour a statué par arrêt du 7 novembre 1994 ;
" alors que par dérogation à la règle de l'unique objet de l'appel des ordonnances prévues par les articles 186 et 186-1 du Code de procédure pénale, la personne mise en examen a le droit de fonder son appel d'une ordonnance de placement en détention provisoire sur l'absence de procédure d'extradition ; que ce principe doit recevoir application non seulement lorsque les actes critiqués font matériellement partie de la procédure même dont la chambre d'accusation est saisie par le recours mais encore chaque fois que, comme dans la présente espèce, l'ouverture d'une série d'informations théoriquement distinctes centralisées au cabinet du même juge d'instruction permet à celui-ci de puiser à son gré des éléments de preuve dans les différentes procédures dont il a la charge pour alimenter l'ensemble des dossiers, ce mode d'opérer ayant nécessairement pour but et pour effet de porter atteinte aux droits de la défense " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que le 12 septembre 1994, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Valence a requis la réouverture, sur charges nouvelles, de l'information, clôturée par une ordonnance de non-lieu du 5 février 1991, concernant deux attentats par explosifs perpétrés le 31 décembre 1983, l'un dans le train à grande vitesse Marseille-Paris à Tain-l'Hermitage, l'autre dans la gare Saint-Charles à Marseille ; qu'après dessaisissement du juge d'instruction de Valence au profit de celui de Paris, Illich X...a été mis en examen et placé en détention provisoire, le 18 janvier 1995, pour complicité d'assassinats, tentatives d'assassinats, dégradation par explosifs de biens immobiliers et mobiliers, infractions à la législation sur les explosifs, en relation avec une entreprise terroriste ;
Attendu que, pour déclarer irrecevable l'exception d'illégalité de cette détention prise par l'appelant de l'irrégularité de son arrestation à Khartoum et de son transfèrement à Villacoublay, la chambre d'accusation énonce notamment qu'elle n'est pas compétente pour statuer sur la validité d'actes de procédure accomplis dans le cadre d'une autre affaire ;
Attendu qu'en cet état, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que s'il est vrai que, par dérogation à la règle de l'unique objet de l'appel des ordonnances prévues par les articles 186 et 186-1 du Code de procédure pénale, la personne mise en examen a le droit de fonder son appel d'une ordonnance de placement en détention provisoire sur l'absence de procédure d'extradition, et sur l'irrégularité prétendue de son arrestation ou de sa détention, encore faut-il que les actes critiqués fassent partie de la procédure même dont la chambre d'accusation est saisie par le recours ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ;
Doù il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.