AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. Jimmy X..., demeurant ... (Landes),
2 / M. William X..., demeurant ... (Gironde), en cassation d'un arrêt rendu le 25 août 1992 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre, section B), au profit de la société d'assurances Les Mutuelles du Mans assurances IARD, dont le siège social est ..., défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 8 mars 1995, où étaient présents : M. Beauvois, président, Mme Di Marino, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Peyre, Mme Giannotti, MM. Aydalot, Boscheron, Toitot, Mme Borra, M. Bourrelly, conseillers, MM. Chollet, Pronier, Mme Masson-Daum, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mme Pacanowki, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Di Marino, les observations de Me Parmentier, avocat des consorts X..., de la SCP Boré et Xavier, avocat de la société Les Mutuelles du Mans assurances IARD, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1733 et 1734 du Code civil ;
Attendu que le preneur répond de l'incendie à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure ou par vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine ;
que le locataire, ou s'ils sont plusieurs, tous les locataires sont présumés responsables de l'incendie ;
que cette présomption cesse d'exister lorsque le propriétaire de l'immeuble occupe une partie des locaux dans les mêmes conditions qu'un locataire ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Bordeaux, 25 août 1992), que MM. X..., qui avaient donné à bail à la société Atlantique automobile des locaux situé dans un bâtiment ensuite détruit par un incendie, ont assigné la compagnie Les Mutuelles du Mans, assureur de leur locataire, afin d'être indemnisés des conséquences de l'incendie non réparées par leur propre assureur ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt, qui constate, d'une part, que l'appartement situé au premier étage du bâtiment et occupé par les propriétaires, disposait d'une entrée et d'un escalier indépendants mais, en façade arrière, d'un balcon et d'une "rochelle" donnant sur l'espace occupé au rez-de-chaussée par le locataire et, d'autre part, que l'incendie à éclaté dans le garage loué, sans que l'enquête ait permis d'en identifier les auteurs, retient que les propriétaires occupaient l'immeuble dans les mêmes conditions qu'un locataire et ne prouvaient pas que l'incendie aurait été causé par la faute du locataire ;
Qu'en statuant ainsi, sans caractériser une jouissance ou une occupation conjointe des lieux incendiés par les propriétaires et alors qu'elle avait constaté que le feu avait pris naissance dans les lieux loués, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 août 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;
Condamne Les Mutuelles du Mans assurances IARD à payer à MM. X..., ensemble, la somme de 8 000 francs, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Les condamne également aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Bordeaux, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze avril mil neuf cent quatre-vingt-quinze.