Attendu, selon l'arrêt critiqué (Versailles, 14 janvier 1993), que, pour l'exécution d'un marché public, la société des Entreprises Petit, entreprise principale, a confié la réalisation d'un lot à la société Bâti-Couvert ; que ce sous-traitant a émis deux factures sur la société des Entreprises Petit, l'une le 11 mai 1987, d'un montant de 91 915 francs, et l'autre le 21 mai 1987, d'un montant de 53 192,10 francs, puis a cédé ces créances à la Société marseillaise de crédit (la banque), selon les modalités de la loi du 2 janvier 1981 ; que la société des Entreprises Petit, à laquelle la cession avait été notifiée le 26 mai 1987, a refusé de payer les créances à la banque ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi principal :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande relative à la facture de 91 915 francs, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'à compter de la notification de cession du 21 mai 1987, la société des Entreprises Petit ne pouvait plus se libérer valablement qu'entre ses mains ; qu'en transmettant au maître de l'ouvrage pour paiement direct au sous-traitant cédant une situation établie le 21 mai 1987 et reçue le 25 mai 1987 qui avait le même objet que la facture cédée , soit postérieurement à la notification de cession, la société des Entreprises Petit ne s'est pas valablement libérée ; que, dès lors, en jugeant que lui était opposable le paiement ainsi intervenu, la cour d'appel a violé l'article 5 de la loi n° 81-1 du 2 janvier 1981 facilitant le crédit aux entreprises ; et alors, d'autre part, que la société des Entreprises Petit, qui avait connaissance de la facture cédée par la notification qui lui en avait été faite le 21 mai 1987, ne pouvait, sans commettre une faute, faire parvenir au maître de l'ouvrage, pour paiement direct, une situation reçue le 25 mai 1987 qui faisait double emploi avec la facture cédée ; que, dès lors, en jugeant que la société des Entreprises Petit n'avait commis aucune faute, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que la société des Entreprises Petit n'a pas effectué de paiement à la société Bâti-Couvert après la notification de la cession des créances ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel n'a pu violer l'article 5 de la loi du 2 janvier 1981 en faisant produire effet à un paiement non conforme à ce texte ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que la société Bâti-Couvert bénéficiait du paiement direct sur présentation de situations mensuelles présentées à l'entrepreneur principal, la cour d'appel a pu décider qu'on ne saurait reprocher à la société des Entreprises Petit d'avoir transmis au maître de l'ouvrage une situation qu'elle avait vérifiée, même si elle avait reçu quelques jours avant une notification de cession de créance ;
Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société des Entreprises Petit reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la banque la somme de 53 192,10 francs en principal, alors, selon le pourvoi, que la simple notification de la cession, en l'absence d'acceptation par le débiteur cédé, ne privant pas celui-ci du droit d'opposer à l'organisme de crédit des exceptions fondées sur ses rapports personnels avec le cédant, la cour d'appel a violé l'article 6 de la loi du 2 janvier 1981 ;
Mais attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que la société des Entreprises Petit ne se prévalait pas de la connexité de sa créance avec celle dont le paiement lui était réclamé, mais se bornait à invoquer la compensation légale entre les deux créances ; que, dès lors, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que celle-ci n'avait pu s'opérer parce que la créance alléguée par la société des Entreprises Petit n'avait été établie que par un mémoire du 3 juillet 1987, postérieur à la notification de la cession de la créance litigieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE tant le pourvoi principal que le pourvoi incident.