AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Denise X..., demeurant 33, rue du Centre, à Saint-Chaffrey (Hautes-Alpes), en cassation d'un arrêt rendu le 11 juin 1991 par la cour d'appel de Nîmes (chambre sociale), au profit de la maison de retraite Saint-Vincent, dont le siège est à Courthézon (Vaucluse), défenderesse à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 15 février 1995, où étaient présents : M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Monboisse, conseiller rapporteur, M. Merlin, conseiller, Mlle Sant, MM.
Frouin, Boinot, Mmes Bourgeot, Verger, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Monboisse, les observations de Me Blanc, avocat de Mme X..., de Me de Nervo, avocat de la maison de retraite Saint-Vincent, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 122-4 du Code de travail ;
Attendu que selon l'arrêt attaqué Mme X... a été engagée le 1er février 1976 en qualité de secrétaire de direction par la maison de retraite Saint-Vincent, à Courthézon ;
qu'elle a été nommée directrice adjointe en 1981, puis directrice le 1er novembre 1984 ;
que le 16 avril 1985, elle a été rétrogradée au poste de sous-directrice ;
qu'elle a fait l'objet d'un arrêt de travail pendant 16 mois ;
que prétendant que l'intéressée n'avait pas adressé de demande de prolongation d'arrêt de travail à l'issue d'un arrêt de travail qui venait à expiration le 31 août 1986, et qu'elle n'avait pas alors repris ses fonctions, l'employeur a pris acte de la rupture du fait du salarié ;
Attendu que, pour débouter Mme X... de ses demandes de paiement d'indemnité de préavis, d'une indemnité conventionnelle de licenciement, d'une indemnité compensatrice de congés payés, ainsi que de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, la cour d'appel a retenu que l'intéressée avait acquiescé à la rétrogradation dont elle avait fait l'objet, et qu'elle n'avait pas travaillé du 1er septembre au 10 septembre 1986 sans prévenir son employeur, ce dont il résultait que la rupture du contrat du travail était intervenue de son fait ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'omission de prévenir l'employeur d'une prolongation d'absence à l'issue d'un arrêt de travail ne pouvait seule caractériser une volonté claire et non équivoque de démission et que la prise d'acte de la rupture par l'employeur s'analysait en un licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 juin 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la maison de retraite Saint-Vincent, envers Mme X..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Nîmes, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du trente mars mil neuf cent quatre-vingt-quinze.