Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 septembre 1992) et les productions, que M. X..., salarié de la société Y..., a été victime, le 4 avril 1985, d'un accident du travail au cours duquel quatre doigts de l'une de ses mains ont été écrasés ; qu'hospitalisé, il a dû subir, à la suite d'hémorragies, des transfusions sanguines ; qu'une sérologie positive, consécutive à une contamination par le virus d'immuno-déficience humaine (VIH) s'est révélée courant avril 1985 ; que, reprochant à son employeur d'avoir commis une faute inexcusable, le salarié lui a réclamé réparation des préjudices qu'il a subis ; que la cour d'appel l'a débouté de sa demande d'indemnisation du préjudice résultant de la contamination par le VIH ; qu'il a accepté, le 22 février 1993, l'offre d'indemnisation du préjudice de contamination qui lui avait été proposée le 12 février 1993 par le Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le VIH, créé par l'article 47 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, de première part, que le préjudice, dont la réparation est demandée à l'employeur, auteur d'une faute inexcusable, au titre de la législation sur les accidents du travail, est présumé imputable au travail s'il est apparu au cours d'un traitement consécutif à l'accident ; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait, sans renverser la charge de la preuve, après avoir constaté que M. X... était devenu séropositif pendant son hospitalisation consécutive à l'accident du travail du 4 avril 1985, rejeter la demande de celui-ci tendant à ce que les conséquences dommageables de cette contamination soient mises à la charge de l'employeur, au seul motif qu'il n'était pas établi avec certitude que la victime était devenue séropositive à la suite des transfusions subies par elle pendant son hospitalisation, violant ainsi les articles L. 411-1, L. 411-2, L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale et 1315 du Code civil ; alors, de deuxième part, qu'en tout état de cause, en jugeant que le professeur Lortholary n'avait pas estimé avec certitude que la contamination de M. X... résultait des transfusions subies par celui-ci à l'occasion de son hospitalisation consécutive à l'accident du travail, la cour d'appel a dénaturé le rapport de cet expert qui, avec simplement les réserves d'usage qu'impose la matière, avait conclu qu'une telle hypothèse était " très hautement probable, l'hypothèse de la pure et simple coïncidence (étant) beaucoup plus hasardeuse ", violant ainsi l'article 1134 du Code civil ; alors, de troisième part, qu'en exigeant de M. X... qu'il établisse avec certitude que sa contamination par le virus du Sida résultait des transfusions subies par lui à l'occasion de son hospitalisation consécutive à l'accident du travail, la cour d'appel a mis à sa charge une preuve impossible à rapporter, violant ainsi l'article 1315 du Code civil ; alors, de quatrième part, que l'institution d'un système d'indemnisation des personnes ayant contracté le virus du Sida à l'occasion de transfusions sanguines par l'article 47 de la loi du 31 décembre 1991, pas plus que le versement à ces personnes d'une allocation de solidarité, ne font obstacle à ce qu'elles recherchent, devant les juridictions compétentes, la responsabilité de ceux à qui leur préjudice de contamination est imputable ; que la cour d'appel a ainsi violé ce texte ; alors, enfin, de cinquième part, que la victime d'un dommage peut, lorsque celui-ci est susceptible d'avoir plusieurs auteurs, rechercher la responsabilité de chacun d'eux, sans que l'action menée contre l'un de ces auteurs fasse obstacle à l'action menée contre les autres ; que la cour d'appel a ainsi violé les articles L. 452-1 à L. 452-3 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que, selon l'article 47 de la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991, la réparation intégrale du préjudice spécifique de contamination par le VIH causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de produits dérivés du sang est assurée par un fonds d'indemnisation, tenu de présenter à toute victime qui l'a saisi une offre d'indemnisation ; que l'action intentée par M. X... ayant eu pour seul objet l'indemnisation de ce préjudice, l'acceptation par lui de l'offre qui lui a été faite par le Fonds rend le moyen inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.