AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. le maire de la commune de Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire), en cassation d'un arrêt rendu le 7 juillet 1992 par la cour d'appel d'Orléans (chambre des expropriations), au profit de la Compagnie des chemins de fer départementaux, dont le siège est ... (Hauts-de-Seine),
EN PRESENCE :
1 / de la SCI des Entrepôts de Touraine, dont le siège est Levée de Rochepinard, avenue Jacques Duclos à Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire),
2 / de la SCI des Entrepôts de Rochepinard, dont le siège est ... (Indre-et-Loire),
3 / de la société des Docks de France, zone industrielle de Mannetou, avenue Charles Bedeaux à Tours (Indre-et-Loire),
4 / de la SCI Les Perrées, dont le siège est Levée de Rochepinard, avenue Jacques Duclos à Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire),
5 / de la SNC Bergeret, dont le siège est centre industriel Rochepinard à Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire),
6 / de M. X...,
7 / de Mme X..., demeurant ensemble ... à Saint-Avertin (Indre-et-Loire),
8 / de M. le directeur des services fiscaux, domicilié ..., défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 14 décembre 1994, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Deville, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Capoulade, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Fromont, Villien, conseillers, M. Chapron, conseiller référendaire, M. Baechlin, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Deville, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la commune de Saint-Pierre-des-Corps, les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la commune de Saint-Pierre-des-Corps du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la SCI des entrepôts de Touraine, la SCI des entrepôts de Rochepinard, la société des Docks de France, la SCI Les Perées, la société Bergeret, les époux X... et le directeur des services fiscaux ;
Sur le second moyen :
Attendu que la commune de Saint-Pierre-des-Corps fait grief à l'arrêt attaqué (Orléans, 7 juillet 1992) qui fixe le montant des indemnités dues à la Compagnie des chemins de fer départementaux (CFD) à la suite de l'expropriation, au profit de la commune, de parcelles appartenant à la CFD, d'ordonner la communication à celle-ci des accords amiables passés par la commune, alors, selon le moyen, "que les accords amiables intervenus entre les expropriés et l'autorité expropriante ne peuvent constituer des éléments de comparaison utiles dont le juge de l'expropriation doit tenir compte que s'ils concernent des biens de même catégorie que le bien dont l'évaluation est soumise à son appréciation ; qu'en s'abstenant de rechercher si les accords amiables, visés par le commissaire du gouvernement, n'étaient pas les seuls susceptibles de constituer des termes de comparaison valables, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 13-16 du Code de l'expropriation" ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que seuls étaient produits les termes de comparaison visés par le commissaire du gouvernement et a retenu, à bon droit, que les accords réalisés à l'amiable entre l'expropriant et les différents titulaires de droit à l'intérieur du périmètre des opérations faisant l'objet de la déclaration d'utilité publique constituaient des termes de comparaison privilégiés, a, en l'absence de la communication à l'exproprié des accords ainsi intervenus, légalement justifié sa décision de ce chef en ordonnant cette communication ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 13-14 du Code de l'expropriation ;
Attendu que la juridiction fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ;
Attendu que l'arrêt, qui constate le désaccord des parties sur la qualification des divers locaux, renvoie les parties à se pourvoir devant la juridiction compétente afin de déterminer l'affectation de chaque catégorie de bâtiments ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la contestation portait sur la consistance matérielle des biens expropriés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il invite la CFD et la commune de Saint-Pierre-des-Corps à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront pour trancher le litige quant à l'affectation devant être donnée aux divers bâtiments et immeubles expropriés d'une surface totale de 8 176 m, l'arrêt rendu le 7 juillet 1992, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la Compagnie des chemins de fer départementaux aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel d'Orléans, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-cinq janvier mil neuf cent quatre-vingt-quinze.