Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. Y... et Mme X..., sa fille, étaient membres du conseil d'administration de la société Laboratoire d'études et de conditionnement (la société LEC) et de celui de la société Lorraine de produits chimiques (la société LPC) ; que, par un acte sous seing privé du 23 décembre 1971, M. Y... s'est engagé à céder à sa fille et à son gendre, les époux X..., la totalité des actions de la société LEC dont lui-même et des membres de sa famille étaient propriétaires ; que cet acte imposait des obligations à la société LEC au profit de la société LPC ; que ces clauses n'avaient pas été autorisées par le conseil d'administration de la société LEC et que l'assemblée générale de ses actionnaires a refusé de les approuver ; que la société LEC a assigné M. Y..., la société LPC et les époux X... et demandé l'annulation de l'acte du 23 décembre 1971 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 105 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société LEC, l'arrêt retient que si M. Y... et les époux X... ont engagé la société LEC à prendre en charge les dettes de la société LPC sans autorisation régulière du conseil d'administration, cet engagement illégal du patrimoine de la société LEC ne paraît pas avoir été le but principal de leur convention ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la nullité d'une convention conclue en méconnaissance des dispositions de l'article 101 de la loi du 24 juillet 1966 et non couverte par un vote de l'assemblée générale des actionnaires intervenu dans les conditions prévues à l'article 105, alinéa 3, de la même loi peut être prononcée dès lors que cette convention a eu des conséquences dommageables pour la société, la cour d'appel a violé le texte légal susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 105 de la loi du 24 juillet 1966 ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société LEC, l'arrêt relève que la finalité première de la convention litigieuse était de réaliser le désir de M. Y... de remettre à sa fille et à son gendre la conduite des affaires et retient que la société LEC ne pouvait en demander l'annulation sans s'ingérer de manière illégitime dans des rapports personnels et familiaux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la loi ne prend pas en considération les mobiles des auteurs de conventions passées en violation des dispositions de l'article 101 de la loi du 24 juillet 1966 pour régler l'exercice de l'action tendant à leur annulation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 décembre 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.