Attendu qu'il résulte des énonciations du jugement déféré, que la société civile immobilière Le Port (la SCI) a acquis par acte notarié du 9 mai 1984 une parcelle de terrain cadastrée section B1 771 ainsi que des droits sur une autre parcelle et s'est engagée à construire sur le terrain acquis dans le délai de 4 années ; que, la commune de Fréjus s'étant portée acquéreur du terrain par voie d'expropriation, et faute de construction dans le délai, l'administration des Impôts a notifié à la SCI le 20 décembre 1988 un avis de mise en recouvrement des droits d'enregistrement et pénalités estimés dus ; que la SCI a demandé au tribunal la décharge de cette imposition ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief au jugement déféré d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, que la date de l'acte constituant le point de départ du délai de 4 ans prévu par l'article 691-II du Code général des impôts est la date de la publication de cet acte, qui lui donne date certaine, et rend exigibles les droits d'enregistrement normalement applicables, en sorte qu'en fixant cette date à la signature de l'acte le tribunal de grande instance a violé ledit article ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article 691-II du Code général des impôts, l'exonération est subordonnée à la condition que l'acte d'acquisition contienne l'engagement, par l'acquéreur, d'effectuer dans un délai de 4 ans à compter de la date de l'acte les travaux nécessaires ; que c'est donc à bon droit que le Tribunal a retenu que le délai de 4 ans avait commencé à courir le 9 mai 1984, date de l'acte d'acquisition ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la SCI fait également grief au jugement déféré d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, qu'en ne recherchant pas si l'expropriation dont a fait l'objet le terrain acquis sous le bénéfice du régime d'exonération de droits prévu par l'article 691-II du Code général des impôts et qui a mis la SCI Le Port dans l'impossibilité de se conformer à son engagement de construire dans le délai de 4 ans, se trouvait en relation avec la restriction apportée au droit de construire sur le terrain concerné par le classement de celui-ci, dont l'acquéreur avait connaissance, dans une zone NA réservée à une urbanisation future sous forme d'opération d'urbanisme concertée, et si l'événement ayant rendu la réalisation de l'engagement de construire impossible était ainsi prévisible, compte tenu de ce classement, au moment de l'acquisition, le tribunal de grande instance n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ladite disposition ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'acte de vente faisait état de la situation du terrain dans une zone destinée à recevoir une urbanisation ultérieure sous forme d'opérations d'urbanisme concertées et que la SCI Le Port n'a saisi les autorités municipales ni d'une demande de constitution de la zone d'aménagement concertée qui aurait rendu le terrain constructible ni d'une demande de permis de construire avant son adhésion à l'ordonnance d'expropriation, le Tribunal a pu en déduire que l'expropriation litigieuse ne constituait pas un fait de force majeure ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu les articles 683-I et 1840 G ter du Code général des impôts ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la SCI Le Port tendant à la réduction du montant des droits et pénalités estimés dus, le prix stipulé à l'acte du 9 mai 1984 ne s'appliquant qu'en partie à la vente du terrain ayant fait l'objet de l'engagement de construire et comportant également le prix de cession des droits et actions en revendication détenus par le vendeur sur une autre parcelle, le Tribunal retient qu'en l'absence de toute ventilation du prix d'acquisition entre le bien immeuble acquis et les droits et actions éventuels, l'on doit admettre que le prix correspond à celui du terrain litigieux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'à défaut de production de la justification prévue à l'article 691-II.2° du Code général des impôts, l'acquéreur est tenu d'acquitter l'imposition dont il avait été exonéré et que celle-ci ne peut porter, aux termes de l'article 683-I du même Code, que sur des actes civils ou judiciaires translatifs de propriété ou d'usufruit de biens immeubles, le Tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de la SCI Le Port en réduction des droits et pénalités fondée sur le montant du prix de vente du terrain sur lequel l'engagement de construire a été pris, le jugement rendu le 18 mars 1992, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Draguignan ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Grasse.