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04/10/1994 | FRANCE | N°92-15330

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 octobre 1994, 92-15330


Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué qu'en octobre 1987, la société à responsabilité limitée Trocadéro-Bellevue (la société Trocadéro) a pris le contrôle de la société anonyme La Taste, laquelle connaissait des difficultés financières ; que, le 6 novembre 1987, la société Trocadéro a adressé à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Alpes-de-Haute-Provence, banquier habituel de la société La Taste, une lettre mentionnant " nous vous confirmons l'intention de notre groupe de conserver son influence majoritaire au sein de la société La

Taste, et nous engageons à faire tout notre possible pour que cette société ...

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué qu'en octobre 1987, la société à responsabilité limitée Trocadéro-Bellevue (la société Trocadéro) a pris le contrôle de la société anonyme La Taste, laquelle connaissait des difficultés financières ; que, le 6 novembre 1987, la société Trocadéro a adressé à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Alpes-de-Haute-Provence, banquier habituel de la société La Taste, une lettre mentionnant " nous vous confirmons l'intention de notre groupe de conserver son influence majoritaire au sein de la société La Taste, et nous engageons à faire tout notre possible pour que cette société poursuive son activité de façon qu'elle puisse notamment tenir ses engagements vis-à-vis de votre banque... " ; qu'après l'ouverture d'une procédure de règlement judiciaire à l'encontre de la société La Taste, la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel a assigné la société Trocadéro en paiement d'une provision de 6 000 000 de francs en réparation du préjudice subi ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, que l'engagement du 6 novembre 1987 n'était nullement subordonné au redressement de la société La Taste et au remboursement par celle-ci de ses emprunts, mais contenait engagement de la part de la société Trocadéro-Bellevue de conserver son influence majoritaire au sein de cette société, et de faire tout son possible pour que cette dernière poursuive son activité et puisse tenir ses engagements vis-à-vis d'elle ; qu'en qualifiant cet engagement d'aléatoire aux motifs qu'il était subordonné au redressement de la société La Taste et au remboursement, par elle seule de l'emprunt contracté auprès d'elle, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'engagement susvisé, violant ainsi l'article 1134 du Code civil, et violé, par fausse qualification de l'engagement susvisé, l'article 1964 du même Code ;

Mais attendu qu'ayant constaté que, par sa lettre d'intention, la société Trocadéro s'engageait à faire tout son possible pour la société La Taste poursuive son activité de façon qu'elle puisse notamment tenir ses engagements vis-à-vis de la banque, l'arrêt retient à bon droit, hors toute dénaturation, que la société Trocadéro était tenue d'une obligation de moyens ; qu'en sa troisième branche, le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 1147 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande de la banque, l'arrêt retient qu'il n'a pas été procédé à l'augmentation du capital de 10 millions de francs projetée, le président du conseil d'administration de la société La Taste ayant décidé, face à de nouvelles difficultés, de recourir à une procédure de conciliation amiable au cours de laquelle les démarches effectuées en vue de la mise en place du plan de restructuration n'ont pas abouti, et que le bilan économique et social dressé par le conciliateur amiable fait apparaître un passif d'environ 60 millions de francs ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui avait été demandé, si la société Trocadéro avait mis en oeuvre tous les moyens dont elle disposait pour permettre à la société La Taste de poursuivre son activité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 janvier 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 92-15330
Date de la décision : 04/10/1994
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° LETTRE D'INTENTION - Engagement de tout mettre en oeuvre pour assurer la couverture des besoins financiers - Obligation de faire.

1° Ayant constaté que, par sa lettre d'intention, une société s'engageait à faire tout son possible pour qu'une filiale poursuive son activité de façon qu'elle puisse notamment tenir ses engagements vis-à-vis de la banque, une cour d'appel retient à bon droit, hors toute dénaturation, que cette société n'était tenue que d'une obligation de moyens.

2° LETTRE D'INTENTION - Obligation de faire - Inexécution - Faute - Contenu de l'engagement - Recherche nécessaire.

2° Ne donne pas de base légale à sa décision rejetant la demande de dommages-intérêts de la banque la cour d'appel qui retient qu'il n'a pas été procédé à l'augmentation du capital de 10 millions de francs projetée, le président du conseil d'administration de la filiale ayant décidé, face à de nouvelles difficultés, de recourir à une procédure de conciliation amiable au cours de laquelle les démarches effectuées en vue de la mise en place du plan de restructuration n'ont pas abouti et que le bilan économique et social dressé par le conciliateur fait apparaître un passif d'environ 60 millions de francs, sans rechercher, comme il le lui avait été demandé, si la société s'étant engagée par la lettre d'intention avait mis en oeuvre tous les moyens dont elle disposait pour permettre à sa filiale de poursuivre son activité.


Références :

1° :
2° :
Code civil 1134, 1964
Code civil 1147

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 janvier 1992

A RAPPROCHER : (2°). Chambre commerciale, 1991-01-15, Bulletin 1991, IV, n° 28, p. 18 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 oct. 1994, pourvoi n°92-15330, Bull. civ. 1994 IV N° 276 p. 221
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1994 IV N° 276 p. 221

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Bézard .
Avocat général : Avocat général : M. Curti.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Huglo.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, la SCP Delaporte et Briard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:92.15330
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