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08/06/1994 | FRANCE | N°93-82392

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 juin 1994, 93-82392


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le huit juin mil neuf cent quatre vingt quatorze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLIN, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de Me Le PRADO avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Virginie, partie civile, contre l'

arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, du 29 mars 199...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le huit juin mil neuf cent quatre vingt quatorze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BLIN, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, et de Me Le PRADO avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- Y... Virginie, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, du 29 mars 1993, qui, après avoir relaxé Jean-Philippe X... du chef du délit de blessures involontaires, l'a déboutée de ses demandes ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 320 du Code pénal et R. 194 du Code de la route ainsi que des articles 470-1 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé un prévenu des fins de la poursuite pour blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale temporaire supérieure à trois mois et débouté la partie civile de toutes ses demandes ;

"aux motifs qu'une faute n'engageait la responsabilité de son auteur que si elle était la cause du dommage ; qu'il appartenait au demandeur de rapporter la preuve du lien de causalité ; que la victime ne pouvait donner aucune explication des causes de l'accident dont elle n'avait aucun souvenir précis ;

que son compagnon avait déclaré qu'il l'avait vue, pour une raison indéterminée, quitter la piste sans pouvoir négocier la courbe, roulant approximativement à 30 kms/heure ; que si l'expert avait relevé une course trop importante sur l'ensemble des commandes ainsi qu'une direction durcie par manque de graissage, sans remarque sur la vitesse automatique ou l'accélération, il n'avait cependant pu dire que c'était la cause de l'accident, mais seulement que cela avait pu provoquer un handicap en cours d'utilisation ; que l'accident était survenu après trois quarts d'heure de conduite sans que la victime n'eût signalé de défaillance de la direction, mais seulement une difficulté à freiner ;

qu'aucun élément du dossier et des débats ne permettait de privilégier une hypothèse plutôt qu'une autre sur les causes de l'accident, si ce n'était le défaut de maîtrise, bien qu'il eût semblé résulter de l'enquête que le quadricycle avait fait un premier tonneau provoqué par le heurt d'une pierre située en bordure de la piste ; qu'il n'apparaissait pas en l'état de présomptions précises et concordantes pour qu'une relation de cause à effet pût être retenue entre les carences relevées par l'expert et la survenance du dommage subi par la victime ; qu'il y avait donc lieu de renvoyer le prévenu des fins de la poursuite (voir arrêt attaqué, p. 10, attendu n° 2, à p. 11, attendu n 3) ;

"alors que, d'une part, si les articles 319 et 320 du Code pénal punissent quiconque aura été involontairement la cause d'un homicide ou de blessures, ils n'exigent pas que cette cause soit directe, immédiate et exclusive ; qu'en l'espèce, pour infirmer le jugement de condamnation et relaxer le prévenu qui avait loué à la victime de l'accident un véhicule dangereux, puisque présentant des carences techniques au niveau de l'ensemble des commandes et de la direction susceptibles de constituer un handicap lors de son utilisation, la cour d'appel ne pouvait envisager l'hypothèse d'un défaut de maîtrise du véhicule sans rechercher si ce fait n'avait eu pour origine les défaillances techniques relevées ;

"alors que, au demeurant, il appartient aux juges correctionnels d'ordonner les mesures d'instruction dont la nécessité ressort de leurs énonciations ; qu'après avoir relevé que ni le rapport de l'expert -qui ne s'était pas expressément prononcé sur la causalité de l'accident- ni aucun autre élément du dossier ne permettaient de privilégier l'hypothèse selon laquelle les carences techniques relevées sur le véhicule avaient été à l'origine de l'accident plutôt que celle d'un défaut de maîtrise du véhicule, la cour d'appel ne pouvait infirmer le jugement de condamnation et relaxer le prévenu sans provoquer les mesures d'instruction complémentaires rendues nécessaires par les incertitudes dénoncées comme résultant de celles déjà diligentées ;

"alors que, en outre, tout cycle ou véhicule doit être muni de deux dispositifs de freinage efficace ; que le rapport de l'expert technique n'avait pas seulement mis en lumière des carences au niveau de la direction mais avait également souligné l'existence d'une défectuosité de ces deux systèmes de freinage, ce qui ne pouvait manquer d'être mis en relation avec le fait qu'avant l'accident, la demanderesse s'était plainte de rencontrer des difficultés pour freiner ;

que la cour d'appel ne pouvait donc s'abstenir de faire référence à toutes les anomalies constatées et notamment à celles susceptibles précisément d'établir l'existence d'un lien causal entre le mauvais fonctionnement de l'engin et la survenance de l'accident ;

"alors que, d'autre part, la cour d'appel se devait de préciser que l'organisateur du manège avait laissé la demanderesse et son ami partir seuls à l'extérieur du circuit sans même leur avoir ni imposé ni remis un casque de protection dont il recommandait pourtant le port sur une étiquette apposée sur ses engins, ces faits étant de nature à caractériser une faute d'imprudence à l'origine du dommage" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1147 et 1384, alinéa 1er, du Code civil ainsi que des articles 470-1 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a débouté la partie civile (Virginie Y...), victime d'un accident au volant d'un quadricycle, de sa demande indemnitaire dirigée contre le prévenu (Jean-Philippe X...), organisateur du circuit et loueur de l'engin ;

"aux motifs qu'en conséquence de la relaxe prononcée pour des motifs tenant à l'absence de causalité, la responsabilité du prévenu ne pouvait être retenue ni sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, ni sur celui des articles 1384 et 1147 du même Code ;

qu'au surplus, les consignes de sécurité mentionnées sur une étiquette placée sur le pare-boue avant gauche du quadricycle étaient visibles pour le conducteur ; que la demanderesse en connaissait le fonctionnement pour avoir déjà conduit ce type d'engin motorisé dont elle avait le pouvoir d'usage, de direction et de contrôle ; qu'en conséquence, il y avait lieu de déclarer mal fondée sa constitution de partie civile et de la débouter de toutes ses demandes (voir arrêt attaqué, p. 11, attendu n° 5, à p. 12, attendu n° 1) ;

"alors que, d'une part, la cassation à intervenir sur la décision de relaxe entraînera de plein droit l'annulation du chef de dispositif ayant rejeté la demande indemnitaire, lequel en est la suite ;

"alors que, d'autre part, la cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer que les consignes de sécurité étaient inscrites sur une étiquette apposée sur l'engin, sans rechercher si l'organisateur du circuit n'avait pas l'obligation de ne laisser partir ses clients à bord des engins qu'après s'être assuré qu'ils étaient en possession du casque de protection dont il recommandait le port ;

"alors que, enfin, l'organisateur d'un circuit d'engins motorisés qui les propose à la location conserve la garde de leur structure - notamment, celle des commandes et systèmes de freinage- qu'il a seul le pouvoir de contrôler et de réparer le cas échéant ; que la cour d'appel ne pouvait retenir que la demanderesse avait le pouvoir de direction et de contrôle du quadricycle qui lui avait été loué et qui présentait des carences techniques au niveau de toutes les commandes et de la direction, défaillances qu'elle ne pouvait nullement déceler et auxquelles elle n'aurait pu en tout cas remédier" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Virginie Y..., qui conduisait un quadricyle à moteur que lui avait loué Jean-Philippe X..., a perdu dans un virage le contrôle de cet engin qui s'est renversé ; qu'elle a été blessée ;

Attendu que, pour relaxer Jean-Philippe X... du chef de blessures involontaires et débouter la victime, partie civile, de ses demandes en réparation, la juridiction du second degré relève, d'une part, que les conclusions de l'expert ne permettent pas de retenir une relation de cause à effet entre les défectuosités du quadricycle et l'accident, d'autre part, que les consignes de sécurité étaient affichées sur l'engin, de façon visible pour Virginie Y... qui, de surcroît, en connaissait le fonctionnement ; que les juges en déduisent que la responsabilité du prévenu ne peut être retenue ni sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, ni sur celui des articles 1384 et 1147 du même Code ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, qui procèdent de l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que de la valeur et de la portée des éléments de preuve contradictoirement débattus, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Où étaient présents : M. Souppe conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Blin conseiller rapporteur, MM. Jean B..., Jorda, Martin conseillers de la chambre, Mmes Z..., Verdun, M. de A... de Champfeu conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 93-82392
Date de la décision : 08/06/1994
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, chambre correctionnelle, 29 mars 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 jui. 1994, pourvoi n°93-82392


Composition du Tribunal
Président : Président : M. SOUPPE conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1994:93.82392
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