AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société Afam, société anonyme, dont le siège social et rue Roger Salengro à Rixent (Pas-de-Calais),
2 / M. Henri X..., agissant ès qualités d'administrateur au redressement judiciaire de la société anonyme Afam, demeurant ... (Nord), en cassation d'un arrêt rendu le 20 février 1992 par la cour d'appel de Douai (2ème chambre), au profit de la Société Crédit du Nord, société anonyme, dont le siège est ... (Nord), défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt :
LA COUR, en l'audience publique du 5 avril 1994, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Leclercq, conseiller rapporteur, M. Nicot, Mme Loreau, MM. Vigneron, Dumas, Gomez, Léonnet, Poullain, Canivet, conseillers, M. Lacan, Mme Geerssen, M. Huglo, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Leclercq, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Afam et de M. X..., ès qualités, de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Crédit du Nord, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1937 du Code civil ;
Attendu que le banquier, même en l'absence de faute de sa part, et sauf faute de la part du titulaire du compte ou des préposés dont il répond, n'est libéré envers celui-ci de son obligation de restitution des fonds, reçus en dépôt qu'en vertu d'un ordre de paiement revêtu de sa signature authentique ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le chef comptable de la société Afam a, en imitant la signature du président du directoire de la société, établi de faux chèques et commis ainsi des détournements à son profit ; que la société a demandé au Crédit du Nord, banque tirée, de lui rembourser les sommes payées par elle au vu de faux ordres de paiement ;
Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt retient que la faute d'une banque ayant payé le montant de chèques falsifiés ne peut s'apprécier in abstracto, ni être tenue pour démontrée par cela seul que les chèques étaient revêtus d'une signature imitant celle du titulaire du compte, ainsi débité, dès lors qu'il ne s'est pas agi d'une imitation grossière ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, l'arrêt rendu entre les parties le 20 février 1992 par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Crédit du Nord, envers la société Afam et M. X..., ès qualités, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Douai, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du sept juin mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.