Attendu que, par quatre ordonnances du 11 février 1991, le président du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières a autorisé des agents de la Direction générale des Impôts, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, à effectuer des visites et saisies de documents dans les locaux de la SA de Panification industrielle respectivement ..., ..., rue de l'Abreuvoir, et au domicile de M. et Mme X..., à Charleville-Mézières (Ardennes) en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de la société PICC ; que la société PICC et M. X... ont assigné l'administration fiscale aux fins d'annulation des opérations d'exécution pour irrégularité ; qu'il se sont pourvus en cassation contre l'ordonnance du 27 août 1992 rendue sur leur assignation contradictoire ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société PICC et M. X... font grief à l'ordonnance d'avoir refusé d'annuler les opérations de visites et saisies alors, selon le pourvoi, d'une part, que selon l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, l'officier de police judiciaire qui accompagne les agents de l'administration des Impôts doit veiller au respect des droits de la défense, conformément aux dispositions de l'alinéa 3 de l'article 56 du Code de procédure pénale, lequel lui fait obligation de provoquer, préalablement à ses opérations, toute mesure utile pour que soient assurés les droits de la défense ; qu'en conséquence, même si aucune disposition légale n'oblige expressément les agents de l'Administration à informer l'intéressé du droit qu'il a de refuser de signer le procès-verbal, cette obligation se déduit de celle faite à l'officier de police judiciaire, qui assiste nécessairement les agents de l'Administration, de prendre préalablement toute mesure utile pour assurer le respect des droits de la défense ; qu'en décidant le contraire, le président du Tribunal a violé les articles L. 16 B III et IV du Livre des procédures fiscales et l'article 56, alinéa 3, du Code de procédure pénale ; et alors, d'autre part, que le fait de remettre une copie de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales à l'occupant des lieux (à qui doit être verbalement notifiée l'ordonnance autorisant la visite, mais qui doit être constamment présent aux opérations et qui, de ce fait, n'a pas le temps de lire le texte avant la fin des opérations et l'établissement du procès-verbal, lequel doit être dressé sur le champ) ne peut être considéré comme une garantie des droits de la défense dispensant les agents de l'Administration et l'officier de police judiciaire les accompagnant de l'obligation d'informer l'intéressé de l'étendue de ses droits et, notamment, de celui de refuser de signer le procès-verbal de saisie ; qu'en relevant que les droits de la défense avaient bien été respectés dès lors qu'avait été remis à chaque intéressé le texte de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, le président du Tribunal a violé l'article L. 16 B III et IV de ce texte, ainsi que les droits de la défense et alors, enfin, que les demandeurs au pourvoi faisaient valoir que, devant le comité fiscal de la mission d'organisation administrative, la Direction générale des Impôts avait expressément reconnu que le contribuable devait être informé qu'il avait le droit de ne pas signer le procès-verbal ; qu'en délaissant de telles conclusions qui étaient déterminantes puisque la doctrine de l'Administration s'impose à ses agents, le président du Tribunal a entaché sa décision d'un défaut de motifs, ne satisfaisant pas ainsi aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'obligation d'aviser la personne, en présence de qui les opérations de visite et saisie domiciliaires ont été effectuées, de son droit de refuser de signer le procès-verbal constatant leur exécution ou d'y consigner toutes observations qu'elle estimerait utiles, ne résulte pas des dispositions combinées des articles L. 16 B du Livre des procédures fiscales et 56 du Code de procédure pénale ;
Attendu, en second lieu, que le président du Tribunal n'est pas tenu de répondre à un moyen imprécis selon lequel, " lorsque l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales a été créé, la Direction générale des Impôts devant le comité fiscal de la mission d'organisation administrative s'est expressément référée à la garantie offerte au contribuable d'être avisé de sa possibilité de refuser de signer le procès-verbal de saisie ", non assorti de justifications et sans précision du fondement juridique, ni de l'acte administratif dans lequel cette doctrine serait exprimée ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société PICC et M. X... font enfin grief à l'ordonnance d'avoir refusé d'annuler les opérations de visites et saisies alors, selon le pourvoi, que, lorsqu'elle est constatée, la violation des droits de la défense entraîne nécessairement la nullité de toute la procédure ; qu'en l'espèce, même si chaque visite domiciliaire avait été autorisée par une ordonnance présidentielle distincte comme l'exige l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, il n'en demeurait pas moins qu'il n'existait qu'une seule et unique procédure introduite par l'Administration au moyen d'une requête unique adressée au juge aux fins d'être autorisée à visiter plusieurs locaux ; qu'ayant constaté une violation flagrante des droits de la défense ayant consisté, pour l'Administration, à procéder à des interrogatoires et à des fouilles à corps non autorisées, le juge se devait d'annuler l'ensemble des opérations sollicitées par la requête unique et non pas seulement les procès-verbaux des opérations de visite effectuées dans les locaux où avaient eu lieu les irrégularités ; qu'en décidant le contraire, le président du Tribunal a violé l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que le juge saisi du contrôle de la régularité des opérations de visite et saisie domiciliaires apprécie cette régularité au regard de chaque ordonnance d'autorisation ; qu'ayant ainsi procédé, le président du Tribunal n'encourt pas le grief qui lui est fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.