Attendu, selon l'arrêt attaqué que la société UDG France limited a demandé la restitution des droits de consommation sur les importations d'alcools de céréales en provenance du Royaume-Uni, pour la période du 1er février 1981 au 31 janvier 1983 ; que le tribunal de grande instance de Toulouse, saisi de cette action, ne l'a déclarée recevable que pour le seul mois de janvier 1983 et a ordonné une expertise sur la répercussion par la société des droits acquittés ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société UDG France limited fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné une expertise sur la répercussion des droits acquittés en janvier 1983, alors, selon le pourvoi, qu'en application de l'article 1376 du Code civil, " celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû, s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu " ; que la condition exorbitante du droit commun de la répétition fiscale, selon laquelle celui qui a indûment aquitté des droits peut en obtenir le remboursement, " à moins que les droits n'aient été répercutés sur l'acheteur ", n'est contenue que dans l'article 1965 du Code général des impôts tel qu'il ressort de la loi du 30 décembre 1986 postérieure aux paiements litigieux, et à l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes, annulant les effets de l'ancien article 1965 FA, déclarant les taxes en cause contraires aux dispositions du traité et faisant naître à la charge de l'Etat membre qui a reçu ces taxes une obligation pure et simple de remboursement ; que dès lors, en donnant un effet rétroactif à une norme fiscale aggravant la situation du contribuable au regard d'un droit à restitution reconnu par la Cour de justice des Communautés européennes, la cour d'appel a violé ensemble les articles 2 et 1376 du Code civil ;
Mais attendu que, dans son arrêt du 25 février 1988 (Bianco), la Cour de justice des Communautés européennes a seulement dit pour droit qu'un Etat membre n'est pas en droit d'adopter des dispositions qui subordonnent le remboursement de taxes nationales perçues en violation du droit communautaire à la preuve que ces taxes n'ont pas été répercutées sur les acheteurs des produits les ayant supportées, en rejetant la charge de cette preuve négative sur les seules personnes physiques ou morales sollicitant le remboursement ; qu'elle a précisé dans le même arrêt que la question de la répercussion ou de la non-répercussion dans chaque cas d'une taxe indirecte constitue une question de fait qui relève de la compétence du juge national qui est libre dans l'appréciation des preuves ; qu'en conséquence, si les dispositions de l'article 13 V de la loi du 30 décembre 1980 en ce qu'elles mettent à la charge du demandeur en répétition la preuve de l'absence de répercussion des taxes indues ne peuvent être opposées au contribuable, elles doivent continuer à recevoir application dès lors que le juge est libre d'apprécier, dans chaque cas, les preuves présentées par les parties et, s'il estime nécessaire, d'ordonner une expertise ; que, par ce motif de pur droit, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 2262 du Code civil, ensemble l'article R. 196-1 du Livre des procédures fiscales ;
Attendu que le litige relatif à l'exercice du droit à restitution de taxes perçues en violation du droit communautaire, demandée sur le fondement d'arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes établissant la contrariété des taxes en cause au Traité, n'entre pas dans les prévisions des articles L. 190, dans sa rédaction antérieure à la loi du 29 décembre 1989 et L. 199 du Livre des procédures fiscales, mais a trait à une action de droit commun en répétition de l'indu, même si l'engagement de l'action est subordonné à la présentation préalable d'une réclamation à l'Administration ; que la prescription de l'action est la prescription trentenaire de droit commun ;
Attendu que, pour rejeter la demande présentée par la société UDG France limited en restitution des droits de consommation sur les alcools de céréales importés du 1er février 1981 au 31 décembre 1982 et fondée sur l'arrêt rendu le 27 février 1980 par la Cour de justice des Communautés européennes (Commission contre France) ayant déclaré contraires à l'article 95 du Traité les articles 403 et 406 du Code général des impôts, la cour d'appel a jugé que, " s'il n'est pas contesté que l'action engagée trouve son fondement dans la notion de répétition de l'indu, la nature fiscale du litige n'est pas modifiée et que, dès lors, les dispositions des articles R. 196-1 et suivants du Livre des procédures fiscales s'appliquaient à la présente procédure " ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société UDG France limited pour la restitution des droits de consommation acquittés du 1er février 1981 au 31 décembre 1982, l'arrêt rendu le 29 octobre 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau.