AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société civile immobilière "Park Avenue", dont le siège est à Lyon (3e) (Rhône), ... de Baraban, en cassation d'un arrêt rendu le 24 juin 1991 par la cour d'appel de Lyon (chambre des urgences), au profit de la société Tissages Voiron Chartreuse, société anonyme, société en liquidation amiable, dont le siège est ... représentée par son liquidateur Mme Y..., demeurant àFleuriau-sur-Saône (Rhône), ..., aux droits de laquelle se trouve M. Gérard X..., demeurant à Paris (2e), ..., défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 8 février 1994, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Cathala, conseiller rapporteur, MM. Valdès, Douvreleur, Capoulade, Peyre, Deville, Mme Giannotti, M. Aydalot, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Boscheron, Toitot, Mme Di Marino, M. Fromont, Mme Borra, conseillers, MM. Chollet, Chapron, Pronier, Mme Masson-Daum, conseillers référendaires, M. Vernette, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Cathala, les observations de Me Le Prado, avocat de la SCI "Park Avenue", de Me Brouchot, avocat de M. X..., les conclusions de M. Vernette, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 24 juin 1991), que la société Tissages Voiron Chartreuse, aux droits de laquelle se trouve M. X..., a vendu un immeuble par acte authentique du 7 janvier 1988, à la société Maia Sonnier, dans les droits de laquelle la société civile immobilière Park avenue a été substituée ; que le prix de la cession a été fixé à la somme de 6 300 000 francs dans la perspective de construire une surface de 6 500 mètres carrés de plancher hors oeuvre ; que les parties sont convenues, si le permis de construire autorisait une surface de construction supérieure, d'un supplément de prix égal à un pourcentage de la différence entre, d'une part, l'incidence foncière théorique de 1 230 francs par mètre carré et, d'autre part, l'incidence foncière réelle ; que le permis de construire ayant été accordé pour une surface de 8 666 mètres carrés, la SCI Park avenue a versé à la société Tissages Voiron Chartreuse un supplément de prix calculé en incluant dans l'incidence foncière réelle le montant de la taxe locale d'équipement ;
que, contestant ce mode de calcul, la société venderesse a assigné la SCI en paiement d'un supplément de prix ;
Attendu que la SCI Park avenue fait grief à l'arrêt de décider que, pour fixer le supplément dû à la société Tissages Voiron Chartreuse, il n'y a pas lieu d'inclure la taxe locale d'équipement, alors, selon le moyen, "1 ) que la cour d'appel n'a pu, sans violer les articles 1585 et 302 septies B II du Code général des impôts, dire que la taxe locale d'équipement ne constitue pas un élément de prix de revient du terrain ; 2 ) que la cour d'appel, si elle avait considéré que la taxe locale d'équipement ne pouvait être prise en compte parce que les terrains nécessaires à la construction, et parce que les parties n'ont entendu intégrer, dans la notion d'incidence foncière globale, que les charges se rattachant exclusivement au terrain à construire, aurait dénaturé la stipulation litigieuse du contrat, et violé l'article 1134 du Code civil ; qu'il résulte, en effet, clairement de cette stipulation que toutes les charges afférentes au terrain ont été prises en compte, les parties s'étant de toute évidence référées aux dispositions légales selon lesquelles la charge foncière, élément du prix de revient d'un ensemble immobilier, comprend toutes les taxes liées à la réalisation de la construction sur le terrain, et notamment la taxe locale d'équipement ; 3 ) que le motif de la cour d'appel selon lequel, s'agissant d'une charge préfixée, déterminable dès l'origine au prorata de la surface à construire, la taxe locale d'équipement ne pouvait constituer pour les parties un élément aléatoire de l'opération, susceptible de modifier l'économie du contrat et de justifier, en conséquence, qu'elle intervienne dans le processus de mise en jeu de la clause de supplément de prix, ignore totalement le problème posé, avec lequel il n'a aucun lien consistant à savoir si, pour la fixation de l'incidence foncière globale théorique, les parties ont pris en compte la taxe locale d'équipement, et si cette taxe devait corrélativement être prise en compte pour le calcul de l'incidence foncière réelle ; que la cour d'appel, par un tel motif, a méconnu les données du litige et a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile" ;
Mais attendu qu'ayant constaté le caractère vague du terme d'indemnités, employé pour désigner les éléments à prendre en compte pour évaluer le supplément de prix, et relevé le choix du qualificatif "foncière", au lieu de "financière", appliqué aux deux incidences, théorique et réelle, dont la différence devait faire ressortir l'existence d'un supplément de prix et en permettre le calcul, la cour d'appel, procédant à la recherche nécessaire de la volonté des parties, en présence d'une clause imprécise et ambiguë, exclusive de dénaturation, a, sans méconnaître la portée des dispositions de référence du Code général des impôts, ni modifier l'objet du litige, souverainement retenu que les parties n'avaient entendu viser que les éléments du prix de revient de l'opération se rattachant au terrain cédé et à l'acquisition de l'immeuble à démolir et non la taxe locale d'équipement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Park avenue à payer à M. X... la somme de huit mille francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
La condamne également aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du seize mars mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.