Sur les deux moyens, pris en leurs diverses branches et réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 27 février 1992), que la Société française du raccord ayant été mise en redressement judiciaire le 23 mars 1988, la société Camebail, aux droits de laquelle est venue la société Equipbail, a mis l'administrateur de la procédure collective en demeure de lui faire connaître s'il entendait poursuivre le contrat de location d'un télécopieur antérieurement conclu avec la société débitrice ; que le juge-commissaire, par ordonnance du 16 mai 1988, a accordé à l'administrateur, sur le fondement de l'article 37, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, une prolongation du délai pour prendre parti ; que la prolongation a expiré sans que l'administrateur ait pris position sur la continuation du contrat ; que par ordonnance du 19 octobre 1988, le juge-commissaire a rejeté la créance de la société Camebail afférente aux loyers échus postérieurement à l'ouverture du redressement judiciaire ;
Attendu que la société Equipbail fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé cette décision au motif, selon le pourvoi, que la revendication du matériel objet du contrat de location était irrecevable comme tardive alors, d'une part, que l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985, qui impose de revendiquer les meubles dans le délai de 3 mois du jugement déclaratif n'est pas opposable au crédit-bailleur titulaire d'un droit non contesté sur le bien qui a par ailleurs fait l'objet d'une publication légale le rendant opposable aux tiers et notamment aux créanciers du débiteur ; qu'ainsi en décidant que la société Camebail ne pouvait plus faire valoir son droit de propriété sur le matériel litigieux, faute de l'avoir revendiqué dans le délai de 3 mois, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé ; alors, d'autre part, que l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985 en ce qu'il imposerait au crédit-bailleur de revendiquer le bien dans les 3 mois du jugement déclaratif à peine d'être déchu de son droit de propriété opèrerait une expropriation de fait sans indemnité ou une ingérence de l'Etat dans l'usage des biens ne répondant à aucun motif d'intérêt général et serait donc contraire à l'article 1er du Protocole additionnel du 20 mars 1952 à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; et alors, enfin, que tant que l'administrateur n'a pas exercé l'option en faveur de la continuation ou de l'abandon du contrat dans les délais que lui ouvre l'article 37, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 l'expiration du délai de revendication de l'article 115 de la même loi est inopposable au crédit-bailleur qui ignore si le contrat sera ou non poursuivi et s'il est fondé à revendiquer le bien ; qu'ainsi en considérant que la société Camebail n'avait pas revendiqué le bien dans le délai de 3 mois du jugement déclaratif tout en relevant que l'administrateur avait obtenu du juge-commissaire une prorogation du délai d'option jusqu'à la fin de la période d'observation, la cour d'appel a violé les deux textes susvisés ;
Mais attendu, en premier lieu, que les dispositions de l'article 115 de la loi du 25 janvier 1985, aux termes desquelles la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de 3 mois à compter du jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire, ne sont pas contraires à celles de l'article 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ce qu'il protège le droit de propriété, et sont applicables à la revendication exercée par le bailleur sur le bien mobilier faisant l'objet du contrat de location ;
Attendu, en second lieu, que la prolongation de délai accordé par le juge-commissaire à l'administrateur de la procédure collective pour prendre parti sur la poursuite du contrat ne faisait pas obstacle à ce que, dans le délai préfix imparti par le texte précité, la société Camebail fasse reconnaître à l'égard de la procédure collective son droit de propriété sur le bien mobilier donné en location au moyen de l'action en revendication, en vue de sa restitution sauf poursuite du contrat par l'administrateur ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.