AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Edmond X..., exerçant sous l'enseigne "Transports X...", dont le siège est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 21 janvier 1992 par la cour d'appel de Paris (5ème chambre section A), au profit de la société anonyme Bail équipement, dont le siège est ... (1er), défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 janvier 1994, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Leclercq, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. de Gouttès, avocat génral, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Leclercq, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. X..., de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de la société Bail équipement, les conclusions de M. de Gouttès, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 1992), que M. X... a contesté le montant de l'indemnité de résiliation, qui lui avait été notifiée par la société Bail équipements, après qu'il eût cessé de payer les loyers dus en exécution d'un contrat de crédit-bail ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la crédit-bailleresse une somme qu'il estime excessive, alors, selon le pourvoi, d'une part, que si la peine stipulée peut se concevoir aussi bien comme un moyen de contraindre les parties à l'exécution que comme une évaluation conventionnelle anticipée d'un préjudice futur, elle n'en peut pas moins, dans l'un et l'autre cas, être réduite par le juge ; que la cour d'appel s'est bornée à faire une stricte application de la clause pénale du contrat litigieux, en ce qu'elle fixait l'indemnité forfaitaire de réparation due par le locataire dans l'éventualité d'une résiliation pour manquement à son obligation de payer les loyers, tandis que, usant exactement du pouvoir de révision judiciaire que lui confère l'article 1152 du Code civil, elle a, par ailleurs, relevé le caractère manifestement excessif de cette clause pénale dans son aspect purement coercitif ;
qu'en se déterminant ainsi, sans procéder à la réduction de l'indemnité dite de résiliation, ni même rechercher si cette peine devait être également modérée comme étant excessive, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et énonciations et, partant, a méconnu le pouvoir que lui conférait l'article 1152 du code civil, et, par suite, a violé ce texte ; et alors, d'autre part, qu'en se bornant à affirmer, pour entériner le montant contesté par M. X... de l'indemnité de résiliation réclamée par la société Bail équipements, sous déduction du prix de revente du véhicule, que les détériorations présentées par le véhicule lors de sa restitution seraient de nature à diminuer fortement sa valeur sans que M. X..., bien qu'il en ait eu la possibilité, ait présenté un repreneur offrant un prix supérieur à
celui de 170 000 francs, auquel la société Bail équipements a cédé le véhicule, sans préciser en quoi lesdites détériorations justifieraient une diminution de 100 000 francs par rapport à la cotation à l'Argus, et sans rechercher, à cette fin, si ces détériorations ne résultaient pas de l'usure normale du véhicule, ni si M. X... avait été mis en mesure de procéder aux éventuelles réparations de nature à permettre la revente du véhicule à sa juste valeur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des conclusions soutenues par M. X... devant la cour d'appel, qu'il lui ait demandé d'exercer son pouvoir de modération, conféré par l'article 1152 du Code civil, non seulement sur la "peine stricto sensu égale à 10 % du prix d'origine du matériel", peine qu'elle a effectivement réduite, mais encore sur l'indemnité constituée du montant des loyers restant àéchoir à la date de la résiliation ; que la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui avait pas été demandée ;
Attendu, d'autre part, que, par motifs adoptés, l'arrêt, se référant à la facture du garage ayant procédé aux réparations du véhicule litigieux, en déduit qu'il était en mauvais état lorsqu'il a été repris par la société bailleresse ; qu'il a, ainsi, été procédé à la recherche prétendument omise, selon la seconde branche du moyen ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., envers la société Bail équipement, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du premier mars mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.