AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Produits Métallurgiques des Savoies (PMS), dont le siège social est ..., en cassation d'un arrêt rendu le 23 mars 1992 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1ère section), au profit de M. Jean-Claude X..., mandataire, demeurant ... Chambéry, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la liquidation judiciaire de M. Serge Z..., demeurant ..., fonctions auxquelles il a été nommé par jugement rendu en matière commerciale par le tribunal de grande instance d'Albertville le 30 septembre 1988, défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 5 janvier 1994, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Lassalle, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Lassalle, les observations de Me de Nervo, avocat de la société Produits Métallurgiques des Savoies, de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de M.
Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 107-4 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z..., entrepreneur de bâtiments et travaux publics a, par acte sous seing privé du 10 août 1988, cédé à la société Produits Métallurgiques des Savoies, en paiement de fournitures impayées, une créance qu'il détenait sur la société ABC Immobilier ; que M. Z... a été mis le 13 septembre 1988 en redressement judiciaire et, par la suite, en liquidation judiciaire ; que la date de cessation des paiements a été fixée au 1er juillet 1988 ;
Attendu que pour déclarer nulle cette cession, consentie en période suspecte, l'arrêt énonce que la cession de créance ne constitue pas un mode de paiement communément admis dans les relations d'affaires, et retient que la cession litigieuse était d'autant plus anormale qu'elle n'était pas prévue par les contrats de livraison ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si dans les relations d'affaires du secteur professionnel de la construction considéré, le paiement des fournisseurs par la cession de créances que l'entrepreneur détient sur des tiers n'est pas communément admise, peu important qu'une telle cession n'ait pas été prévue dès l'origine par les parties, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
REJETTE la demande présentée par la société PMS sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
Condamne M. X..., ès qualités, envers la société Produits Métallurgiques des Savoies, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Chambéry, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt deux février mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.