AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Philippe Z..., demeurant ... (Seine-Maritime), agissant en sa qualité de mandataire liquidateur de la liquidation judiciaire de M. Jackie Y..., en cassation d'un arrêt rendu le 30 janvier 1992 par la cour d'appel de Rouen (2e chambre civile), au profit de la société anonyme Crédit foncier de France, dont le siège est à Paris (1er), ..., défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 janvier 1994, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Rémery, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pasturel, MM. Edin, Grimaldi, Apollis, Mme Clavery, MM. Lassalle, Tricot, conseillers, M. Le Dauphin, conseiller référendaire, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Rémery, les observations de la SCP Delaporte et Briard, avocat de M. Z..., ès qualités, de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la société Crédit foncier de France, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 102, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985 et 25, alinéa 3, du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu que les ordonnances rendues par le juge- commissaire lorsqu'il se borne à statuer sur une demande en relevé de forclusion ne sont susceptibles que d'un recours devant le tribunal ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été mis en redressement puis en liquidation judiciaires le 10 octobre 1989 ;
que le Crédit foncier de France, qui n'avait pas adressé au représentant des créanciers sa déclaration de créance, a formé, le 16 novembre 1990, une demande en relevé de forclusion que le juge-commissaire a rejetée ;
Attendu que pour déclarer recevable l'appel formé par le Crédit foncier de France contre cette décision, l'arrêt retient que l'ordonnance entreprise ne s'est pas bornée à rejeter la demande de relevé de forclusion mais a également rejeté la créance en visant les articles 101 et suivant de la loi du 25 janvier 1985 et que, dès lors, quelle que soit la valeur du raisonnement par lequel le juge, après avoir consacré la forclusion, a cru devoir examiner le bien fondé de la demande, l'appel, qui possède un caractère "hybride", est recevable par application de l'article 102 de la loi précitée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le juge commissaire avait rejeté la demande en relevé de forclusion aux seuls motifs qu'elle était irrecevable comme tardive et que la défaillance du créancier était due à son fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu en vertu de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, de casser sans renvoi en mettant fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt rendu le 30 janvier 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable l'appel interjeté par le Crédit foncier de France contre l'ordonnance rendue le 21 janvier 1991 par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Rouen ;
Condamne le Crédit foncier de France, envers M. Z..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Met en outre à sa charge les dépens afférents aux instances devant les juges du fond ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Rouen, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-deux février mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.