AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Colette X..., demeurant ... (Gironde), en cassation d'un arrêt rendu le 16 novembre 1989 par la cour d'appel de Bordeaux (Chambre sociale), au profit de M. Abdeslam Y..., demeurant ... à Morsang-sur-Orge (Essonne), défendeur à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 4 janvier 1994, où étaient présents :
M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Monboisse, conseiller rapporteur, MM. Merlin, Desjardins, conseillers, M. Frouin, conseiller référendaire, M. Terrail, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Monboisse, les observations de Me Guinard, avocat de Mme X..., les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 16 novembre 1989), Mme X... était employée depuis le 24 novembre 1965 au supermarché sis ... ; que, le 1er avril 1986, l'exploitation du magasin Unico, qui était installé à l'intérieur du supermarché, a été reprise par M. Y... ; que, le 11 décembre 1986, Mme X... a été licenciée pour faute grave ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins, notamment, de condamnation de son employeur au paiement d'indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de rappels de salaire, compte tenu d'une requalification ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que le juge doit établir les éléments sur lesquels est fondée la perte de confiance alléguée par l'employeur ; que, pour décider que le comportement de Mme X... justifiait la perte de confiance alléguée par M. Y..., la cour d'appel a énoncé que la salariée avait pratiqué pour ses achats personnels, des prix inférieurs à ceux affichés ;
qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la réduction des prix reprochée à Mme X... excédait la réduction de 10 % dont bénéficiait l'ensemble du personnel du magasin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-4 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la réduction que s'était octroyée Mme X... excédait celle qui était autorisée ;
que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli ;
Sur le second moyen :
Attendu que Mme X... fait encore grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes de rappel de salaire, de treizième mois, de congés payés et de complément d'indemnités de préavis et de licenciement, alors, d'une part, selon le moyen, que le chef de magasin deuxième degré, coefficient 230, de la convention collective nationale des magasins de vente, d'alimentation et d'approvisionnement général est celui qui, soit exerce d'une façon permanente un commandement sur plusieurs employés ou ouvriers professionnels spécialisés et en organise l'activité sous les ordres d'un supérieur, soit n'exerce pas de commandement ou de surveillance, mais est classé dans cette catégorie en raison de la compétence exigée ou de la responsabilité assumée ;
que, pour dénier cette qualification à Mme X..., l'arrêt, après avoir constaté qu'elle prenait des initiatives et commandait l'ensemble du personnel, disposait des clefs du coffre, recevait les VRP et intervenait dans la gestion de divers rayons, a énoncé que la responsabilité du magasin ne lui était confiée qu'occasionnellement en l'absence du directeur ; qu'en statuant par ce motif inopérant, alors que les critères de la qualification requise étaient remplis, la cour d'appel a violé l'annexe II de la convention collective nationale des magasins de vente, d'alimentation et d'approvisionnement général ; alors, d'autre part, que la salariée revendiquait subsidiairement le coefficient 200 de la convention collective nationale applicable ; qu'en négligeant de rechercher si les fonctions réellement exercées par Mme X... correspondaient ou non à ce coefficient hiérarchique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'annexe II de la convention collective nationale des magasins de vente, d'alimentation et d'approvisionnement général ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la salariée n'était pas responsable qualifié d'une surface de vente, ni responsable de la gestion, de l'organisation et de l'approvisionnement de son rayon, la cour d'appel a pu décider que l'intéressée n'avait pas droit aux classements revendiqués ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X..., envers M. Y..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. le président en son audience publique du seize février mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.