AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Ricard, dont le siège social est à Marseille (14e) (Bouches-du-Rhône), ..., en cassation d'un jugement rendu le 8 mars 1991 par le tribunal de grande instance de Privas, au profit :
1 / de M. le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et du Budget, chargé du budget, pris en la personne de M. le directeur des services fiscaux de l'Ardèche, dont les bureaux sont situés à Privas (Ardèche), ...,
2 / de M. le directeur général des Impôts, domicilié en ses bureaux à Paris (12e), rue de Bercy, bâtiment E, défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 16 novembre 1993, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Vigneron, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Vigneron, les observations de la SCP Gatineau, avocat de la société Ricard, de Me Foussard, avocat de M. le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et du Budget et de M. le directeur général des Impôts, les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 26 de la loi du 19 janvier 1983, en sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que ce texte met à la charge des producteurs et des marchands en gros une cotisation au profit de la caisse nationale d'assurance maladie perçue à raison de l'achat, par les consommateurs, de boissons d'une teneur en alcool supérieure à 25 degrés ;
Attendu que, pour soumettre au paiement de la cotisation des bouteilles qu'à titre publicitaire la société Ricard a remises, au cours des années 1985 et 1986 gratuitement à ses clients, à l'occasion de la livraison des marchandises qu'elle leur vendait provenant du dépôt de Pestrin à Meyras, le jugement, après avoir relevé que tous les produits livrés figuraient sur la même facture, en a déduit "que les états établis par la société Ricard lient clairement la publicité dont le dégrèvement est sollicité à la vente puisqu'elle les intitule elle-même dans des documents "Publicité accompagnant la vente"" ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les marchandises n'avaient pas été achetées par les consommateurs, le Tribunal a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 8 mars 1991, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Privas ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance d'Aubenas ;
Condamne M. le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'Economie, des Finances et du Budget et M. le directeur général des Impôts, envers la société Ricard, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres du tribunal de grande instance de Privas, en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du dix-huit janvier mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.