AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Pierre, Julien X..., avocat, demeurant ..., La Résidence, à Saint-Raphaël (Var), en cassation d'un arrêt rendu le 9 septembre 1991 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1ère chambre civile -section A), au profit de la Société civile immobilière (SCI) de la Tour de Mare, dont le siège social est cité romaine de la Tour de Mare, à Fréjus (Var), défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 1er décembre 1993, où étaient présents : M. Burgelin, conseiller le plus ancien non empêché faisant fonctions de président, M. Chartier, conseiller rapporteur, M. Laplace, Mme Vigroux, M. Buffet, conseillers, M. Bonnet, conseiller référendaire, M. Tatu, avocat général, Mme Lagardère, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Chartier, les observations de la SCP Defrénois et Levis, avocat de M. X..., de Me Pradon, avocat de la SCI de la Tour de Mare, les conclusions de M. Tatu, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches, tel que reproduit en annexe :
Attendu, selon l'arrêt infirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 9 septembre 1991) et les productions, que, dans une procédure de saisie immobilière contre la SCI La Tour de Mare (la SCI) convertie en vente volontaire, les terrains saisis ont été adjugés au prix de huit millions six cent dix mille (8 610 000) francs ; que M. X..., avocat agissant pour le compte de la société Erasol, a fait une surenchère et que les terrains ont été adjugés à cette société pour la somme de neuf million quatre cent soixante et onze mille (9 471 000) francs ; que le règlement de cette somme ayant été effectué, la SCI qui, entre temps, s'était rétablie en désintéressant les créanciers poursuivants et inscrits et qui avait obtenu la résolution judiciaire de la vente pour non paiement du prix, a assigné M. X... en réparation du préjudice qu'elle avait subi du fait de cette résolution, estimant que cet avocat avait engagé sa responsabilité professionnelle ; que la SCI a été déboutée de sa demande par un jugement dont elle a interjeté appel ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir, en violation des articles 688, 689 du Code de procédure civile, 1382 du Code civil, 455 du nouveau Code de procédure civile et par manque de base légale au regard des articles 711 du Code de procédure civile et 1382 du Code civil, condamné M. X... à payer des dommages et intérêts à la SCI ;
Mais attendu que c'est à bon droit que l'arrêt a retenu que la responsabilité professionnelle de l'avocat qui avait surenchéri pour le compte d'une personne notoirement insolvable, ne pouvait être recherchée, à défaut de lien contractuel entre lui et le créancier poursuivant ou toute autre personne qui lui est substituée dans une procédure de saisie immobilière, que sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ;
Attendu qu'en retenant que l'avocat n'aurait pu obtenir le chèque certifié conforme exigé par le cahier des charges, la cour d'appel s'est exactement placée, pour l'appréciation de l'insolvabilité notoire du surenchérisseur, au moment de la déclaration de surenchère, qu'elle a souverainement retenue ; que, dès lors, la cour d'appel a pu décider, sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, que l'insolvabilité du surenchérisseur, qui avait rendu impossible le paiement du prix de l'adjudication, était la cause du préjudice invoqué, sans que puisse être retenue à l'encontre de la SCI une faute pour n'avoir pas contesté la surenchère, à défaut de prouver que celle-ci avait eu connaissance, en temps utile pour agir, de la défaillance de l'avocat adverse dans la réalisation de la consignation, cette défaillance ne pouvant résulter du simple examen du dossier de la procédure ;
Et attendu qu'il ne ressort, ni de l'arrêt, ni des productions, que M. X... ait soutenu devant la cour d'appel que la plus-value acquise par les terrains saisis pendant la période concernée devait être déduite du montant de la réparation ; que ce moyen est donc nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable ;
D'où il suit que le moyen, pour partie non fondé et pour partie irrecevable, ne saurait être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., envers la SCI de la Tour de Mare, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du douze janvier mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.