AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société X... France, société anonyme, dont le siège social est ... à Varennes-sur-Allier (Allier), en cassation d'un arrêt rendu le 9 octobre 1991 par la cour d'appel de Riom (3ème chambre civile), au profit de la Société Eurocho, société à responsabilité limitée, dont le siège social est ... (3ème), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 juillet 1993, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Huglo, conseillerréférendaire, rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. de Gouttes, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat de la société X... France, de Me Le Prado, avocat de la société Eurocho, les conclusions de M. de Gouttes, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. Pascal Y..., demeurant ... (Allier), pris en sa qualité de liquidateur de la société X... France de ce qu'il reprend l'instance engagée par ladite société ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, selon l'arrêt infirmatif attaqué, la Société X... France a poursuivi la Société Eurocho pour concurrence déloyale en se fondant sur l'envoi par cette dernière à plusieurs de ses clients, dont la Société Castorama, d'une lettre datée du 16 juin 1989 faisant état de la fermeture pour dépôt de bilan de fournisseurs espagnols de la Société X... France ainsi que des qualités techniques de ses produits d'une façon estimée dénigrante par la Société X... France ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la Société X... France, l'arrêt retient que celle-ci n'a subi aucun préjudice, la Société Castorama étant toujours sa cliente, et qu'il n'est pas allégué que la Société Eurocho ait évincé la Société X... France auprès d'autres clients ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi alors qu'un trouble commercial est constitutif d'un préjudice, la cour d'appel, qui a constaté que les allégations contenues dans la lettre du 16 juin 1989 avaient mis en péril les relations commerciales que la société X... France entretenait avec la société Castorama, obligeant celle-là à entreprendre des actions commerciales destinées à maintenir sa clientèle et pour lesquelles elle sollicitait l'octroi de dommages-intérêts, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 octobre 1991, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société Eurocho, envers la société X... France, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ordonne qu'à la diligence de M. le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Riom, en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du neuf novembre mil neuf cent quatre-vingt-treize.