Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt critiqué (Rennes, 15 mai 1991), que, le 19 octobre 1981, la Société générale a accordé un crédit à la société Etablissements X... ; que M. X..., président du conseil d'administration de cette société, et Mme X..., son épouse et associée, se sont portés cautions au profit de la Société générale ; que la société Etablissements X... a été déclarée en règlement judiciaire en octobre 1982, puis en liquidation des biens en 1984 ; qu'assignés en paiement, les époux X... ont soutenu que la Société générale avait commis une faute en accordant un crédit à une entreprise dont la situation était irrémédiablement compromise ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'action en responsabilité engagée par les époux X..., cautions, à l'encontre de la Société générale, pour octroi abusif de crédit au débiteur, alors, selon le pourvoi, d'une part, que commet une faute l'établissement de crédit qui octroie un crédit à une société, dont il connaît la situation irrémédiablement compromise, même si ce crédit a été consenti dans le cadre d'un plan de redressement établi avec d'autres créanciers, dont certains organismes publics ; que l'approbation donnée par ces organismes -surtout si, comme en l'espèce, ils sont créanciers du débiteur en difficulté, et ont intérêt à l'octroi du crédit qui permettra de les désintéresser, au moins en partie- n'exonère pas, par elle seule, le banquier de sa responsabilité ; qu'en écartant toute faute de la Société générale, au motif que le prêt avait été accordé dans le cadre d'un plan de redressement approuvé par le trésorier-payeur général, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, qu'en statuant comme elle l'a fait, au lieu de rechercher si le débiteur, les Etablissements X..., n'était pas dans une situation irrémédiablement compromise au moment de l'octroi du crédit par la Société générale le 19 octobre 1981, et si, en l'état des informations privilégiées dont il disposait sur la situation de la société X..., cet établissement de crédit ne savait pas, dès l'octroi du crédit, que le plan de redressement était voué à l'échec, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, enfin, que le fait que les époux X..., cautions, aient été parfaitement informés de la situation financière de la société X..., et que M. X..., en qualité de chef d'entreprise, ait lui-même sollicité le crédit accordé, ne saurait constituer une cause d'exonération totale de la responsabilité de l'établissement de crédit, qui se devait de refuser de consentir un crédit à une société en état de cessation des paiements ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient que, s'il est exact que la Société générale n'ignorait rien de la situation de la société, il ne peut lui être fait grief d'avoir, au côté des pouvoirs publics, dans le cadre d'un projet de restructuration approuvé par le trésorier-payeur général, accordé un concours bancaire que sollicitait lui-même le chef d'entreprise, désireux de maintenir l'activité de sa société ; que, par ce seul motif, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.