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09/11/1993 | FRANCE | N°91-17524

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 09 novembre 1993, 91-17524


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° C/91-17.524 formé par Mme Janine A... épouse B..., demeurant ... (Charente),

II - Sur le pourvoi n° J/91-17.645 formé par M. X..., Léon Marie B..., demeurant ... (Charente), en cassation d'un arrêt rendu le 16 mai 1991 par la cour d'appel de Bordeaux (2ème chambre), au profit de la Société pour le développement économique du Centre et du Centre Ouest (SODECCO), dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;


La demanderesse au pourvoi n° C/91-17.524 invoque, à l'appui de son recours, le moy...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° C/91-17.524 formé par Mme Janine A... épouse B..., demeurant ... (Charente),

II - Sur le pourvoi n° J/91-17.645 formé par M. X..., Léon Marie B..., demeurant ... (Charente), en cassation d'un arrêt rendu le 16 mai 1991 par la cour d'appel de Bordeaux (2ème chambre), au profit de la Société pour le développement économique du Centre et du Centre Ouest (SODECCO), dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;

La demanderesse au pourvoi n° C/91-17.524 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Le demandeur au pourvoi n° J/91-17.645 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 juillet 1993, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Bézard, président, M. Dumas, conseiller rapporteur, M. Nicot, Mme Loreau, MM. Vigneron, Leclercq, Gomez, Léonnet, Poullain, conseillers, M. Lacan, Mme Geerssen, M. Huglo, conseillers référendaires, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Dumas, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme B..., de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la société SODECCO, de la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, avocat de M. B..., les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joint le pourvoi n° 91-17.524 formé par Mme A..., épouse B... et le pourvoi n° 91-17.645 formé par M. Claude B..., qui attaquent le même arrêt ;

Donne acte à Mme A..., épouse B..., de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en tant que dirigé contre M. Z..., en sa qualité de syndic de la liquidation des biens de la société B... et Fils ;

Attendu, selon l'arrêt critiqué (Bordeaux, 16 mai 1991), qu'en 1971, 1973, 1979, puis le 9 juin 1983, la Société pour le développement économique du Centre et du Centre-Ouest (SODECCO) a accordé quatre prêts à la société B... et Fils ; que M. Claude B... s'est porté caution, par actes des 9 et 20 juin 1983 pour les trois premiers prêts et par acte du 9 juin 1983 pour le quatrième ;

que, la société B... et Fils ayant été déclarée en règlement judiciaire, la SODECCO a assigné M. Claude B... en paiement ; que celui-ci a demandé reconventionnellement des dommages-intérêts à la SODECCO, à laquelle il reprochait, en se fondant, notamment, sur un rapport d'audit, établi à la demande de la société
B...
et fils, d'une part d'avoir consenti abusivement des crédits à cette société, et d'autre part de s'être immiscée dans son fonctionnement ; que Mme A..., épouse de M. Claude B..., est intervenue pour réclamer une indemnité à la SODECCO à laquelle elle imputait également une faute dans l'octroi des crédits ;

Sur les deux premières branches du moyen du pourvoi formé par M. Claude B..., et sur les troisième et quatrième branches du moyen, du pourvoi formé par Mme A..., épouse B..., réunis :

Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir condamné M. Claude B... à payer à la SODECCO, en qualité de caution, la somme de 768 468,18 francs et celle de 3 188 833 francs, outre les intérêts de droit depuis le 21 février 1984, de l'avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts, et d'avoir débouté Mme A..., épouse B... de sa demande en paiement de dommages-intérêts dirigée contre la SODECCO à raison de la faute commise par celle-ci pour avoir obtenu la caution de son époux, M. B..., pour garantir des prêts consentis à la société B... et Fils, alors selon le pourvoi, d'une part, que la responsabilité de l'établissement de crédit peut être engagée, quand bien même la société financée n'était pas en état de cessation des paiements au moment de l'octroi des crédits, si ces crédits ont contribué à prolonger artificiellement l'activité de cette entreprise dont la situation était irrémédiablement compromise ; qu'en se bornant à écarter la responsabilité de la SODECCO dans le maintien artificiel de la société B... et Fils, déclarée en règlement judiciaire un an après l'octroi du dernier crédit, au seul motif que la société
B...
et fils n'était pas en cessation des paiements à la date de la conclusion du contrat de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; et, alors, d'autre part, que le rapport d'audit concluait que les mesures financières prises depuis 1981 n'avaient fait que reculer les échéances, et il constatait les pertes graves d'exploitation de la société B... et Fils depuis 1980 ; qu'en omettant de s'expliquer sur ces éléments du rapport d'expertise, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir apprécié souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, notamment le rapport d'audit, la cour d'appel a constaté, par motifs adoptés que les bilans et comptes d'exploitation de la société
B...
et fils, bien que peu satisfaisants, n'étaient pas catastrophiques et qu'il semblait exister encore des possibilités de redressement de cette entreprise, d'ailleurs attestées par l'audit comptable, et par motifs propres que lorsque les prêts ont été accordés et les cautionnements souscrits, la société débitrice pouvait faire face à ses engagements et réalisait des bénéfices, ce dont il résulte clairement que la situation de cette société n'était pas irrémédiablement compromise aux dates considérées ; que l'arrêt se trouve ainsi légalement justifié ; que ni le moyen du pourvoi formé par M. Claude B..., pris en ses deux premières branches, ni le moyen du pourvoi formé par Mme A..., épouse B..., pris en ses troisième et quatrième branches, ne sont fondés ;

Sur la troisième branche du moyen du pourvoi formé par M. Claude B... :

Attendu que M. Claude B... reproche encore à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors selon le pourvoi, que, dans ses conclusions d'appel, il avait expressément fait valoir que la SODECCO s'était immiscée dans la gestion de la société B... et Fils, en lui imposant le maintien des effectifs actuels et en lui imposant également le respect de ses engagements comme condition à la mise en place du prêt sur la procédure "emploi et compétitivité" ; qu'il avait en outre fait valoir que la SODECCO avait commis une faute de nature à soi seule, à engager sa responsabilité en accordant le moratoire et le prêt du mois de juin 1983, alors que les commissaires aux comptes n'avaient pas fourni leur satisfecit ;

qu'en déclarant néanmoins que la SODECCO n'avait commis aucune faute, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, devant laquelle M. Claude B... soutenait que la faute d'ingérence était caractérisée par les conditions affectant les prêts, a relevé d'une part que certaines conditions avaient été remplies avant la signature de la convention de crédit du 9 juin 1983, et d'autre part que, pour les autres conditions, la SODECCO n'avait ni subordonné à leur réalisation la remise des fonds, ni même vérifié si elles avaient été effectivement remplies après cette remise ; que dès lors, s'agissant de l'immixtion alléguée, elle a répondu, en les écartant, aux conclusions invoquées ;

que le moyen du pourvoi formé par M. Y... n'est pas fondé en sa troisième branches ;

Et sur les première et seconde branches du moyen du pourvoi formé par Mme A..., épouse B... :

Attendu que Mme A..., épouse B..., fait encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de dommages-intérêts, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; que le jugement du tribunal de grande instance de Limoges du 9 juillet 1986 rejetait une action engagée par Mme B..., en inopposabilité de l'engagement de caution souscrit par son mari et de l'affectation en garantie d'un immeuble commun, sur le fondement de l'article 215, alinéa 3, du Code civil ; que ce jugement n'avait donc pas pour objet la faute commise par la SODECCO à l'occasion de cette prise de garantie, et n'avait donc pas autorité de chose jugée dans l'action en responsabilité introduite par Mme B... à l'encontre de la SODECCO sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil par fausse application ; et alors, d'autre part, que les créanciers d'un débiteur en règlement judiciaire ou en liquidation des biens, sont recevables à poursuivre individuellement le tiers qu'ils prétendent responsable du préjudice personnel qu'il leur a causé par ses fautes ; qu'en subordonnant l'action en responsabilité délictuelle de Mme B... à l'encontre de la SODECCO à l'existence d'une contestation à l'encontre de la production de celle-ci au règlement judiciaire, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi, violant les articles 1382 du Code civil et 42 de la loi n° 67-563 du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu que la cour d'appel a également retenu, au sujet de la demande d'indemnité formée par Mme A..., épouse B..., qu'il avait été déterminé que la SODECCO n'avait commis aucune faute, qu'il ne pouvait y avoir lieu à dédommagement ; qu'ainsi, abstraction faite des motifs surabondants dont fait état le moyen, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli en ses deux premières branches ;

Et sur les demandes présentées au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que la SODECCO demande, sur le fondement de ce texte, que M. Claude B... soit condamné à lui payer la somme de 12 000 francs et Mme A..., épouse B..., celle de 20 000 francs ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Rejette les demandes présentées par la SODECCO sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne les demandeurs aux pourvois n s 91-17.524 et 91-17.645, envers la société SODECCO, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le président en son audience publique du neuf novembre mil neuf cent quatre-vingt-treize.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 91-17524
Date de la décision : 09/11/1993
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux (2ème chambre), 16 mai 1991


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 09 nov. 1993, pourvoi n°91-17524


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1993:91.17524
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